Chapitre 32 - Partie 1 (/!\ Scène violente)

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Une main me cloue au sol. Mon bras tordu dans mon dos me fait grincer des dents. Non. C’est plus que mon bras : tout mon corps crie, tendu, broyé, sali. Mais j’encaisse en silence. J'ai appris à ne plus lutter contre ses assauts depuis longtemps. Je finis juste par avoir encore plus mal.

En face, mes parents. Ma mère clique sur son clavier, absorbée par son jeu de cartes. Elle est assise sur le dos de mon père, à quatre pattes sous elle. Ils lèvent parfois les yeux, puis les détournent aussitôt. Comme si je n’étais pas là. Comme si ça n’arrivait pas.

Et puis la voix de mon frère s’élève derrière moi :

  • Tu sais que tout est de ta faute. Que tu dois m’aimer deux fois plus maintenant !

Je sais bien qu’il me provoque. Il veut une réaction. Ça l'excite de me voir me débattre. Mais je me replie dans ma tête. Loin. Là où il ne peut pas m’atteindre.

  • Allez, Maddie… Tu peux faire mieux que ça.

Je déteste ce surnom. Je le hais, lui, encore plus. Mon regard me trahit. Il le voit. Et son visage se tord d’une rage euphorique. Ses yeux m’accusent, me somment de me soumettre.

  • Tu veux jouer les dures ? Tu sais pas encore qu’il y a des conséquences ?

Sa main se referme sur mes cheveux. Il me force à lever la tête.

  • Clara est partie à cause de toi. Soufre comme elle a souffert.

Ses mots frappent, coupent. La honte m’envahit, la peur me ronge. Puis il me jette en avant. Mon visage s’écrase dans l’oreiller. L’instinct de survie reprend le dessus. J’agite bras et jambes comme je peux. Je respire à peine. Son rire claque derrière moi.

  • Faut assumer ses fautes !

Je me débats dans un brouillard de peur et de cris muselés. Le tissu m’étouffe, avale mes cris. J’ai mal partout. J’attends l’odeur rance du coussin. Le goût amer de la sueur et de la poussière. Comme toujours. Comme d’habitude. Mais non. Cette fois, ce n’est pas ça. C’est chaud. C’est doux. Boisé. Sucré. Solaire. Un parfum qui me rassure. D’une personne qui m’apaise. Mon cœur rate un battement. Ce n’est pas possible.

“Un détail qui prouve que c’est pas réel.”

Sa voix résonne dans ma tête, claire, tenace. La logique revient. À cette époque-là, il n’existait même pas dans ma vie. Son odeur ne peut pas être là. Sauf si…


Et soudain, le cauchemar se fissure.

Mes yeux papillonnent dans la pénombre, mon nez est enfoui dans l’oreiller de Zed. Je tremble encore, mes muscles endoloris par l’intensité du rêve, mais je suis éveillée. Pour la première fois depuis longtemps, je sens un fragment de contrôle sur ce que je vis. L’émotion me sert la gorge : j’ai mis fin au cauchemar.

J’ai envie de le réveiller, de lui dire que ses mots m’ont sauvée, que c’est grâce à lui que j’ai réussi à reprendre le contrôle, mais quand je tourne la tête, je le trouve endormi. Son visage est détendu, presque méconnaissable sans son éternel éclat malicieux. J’aime croire que c’est parce que ses yeux sont fermés, eux qui trahissent toujours toutes ses émotions.

Je n’ai pas le cœur d’interrompre ce calme fragile, alors je me glisse contre lui, la joue posée sur sa poitrine et je laisse le sommeil m’emporter à nouveau.

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