04h05
Un sourire s’esquisse sur ses lèvres.
Sous le ciel étoilé, au petit matin, résonne un mélodieux bourdonnement.
Les firins nous éclairent, telle la lune printanière.
Tandis que d’un léger clapotis, les aquinas dansent sans soucis.
Ses paupières s’ouvrent d’un geste fluide.
Son regard fixe les vieilles poutres en chêne du plafond.
Du revers, sa main gauche glisse sur le filet de bave qui macule sa joue.
D’une contraction abdominale, elle se redresse.
La couverture glisse de sa poitrine jusqu’à ses cuisses.
Son corps frissonne légèrement.
Le reflet du miroir renvoie son regard en amande et son visage ovale aux traits juvéniles.
Ses iris vert sombre me rappellent la couleur de l’émeraude.
Ses mains glissent dans ses courts cheveux noirs à la teinte ébène.
Avec des gestes méticuleux, ses doigts ajustent les quelques mèches qui dépassent.
Ils repoussent si vite…
Je passerai chez Annie pour une coupe tout à l’heure.
Elle observe le cadre en noyer sculpté de nombreux motifs en forme de gardénia.
De mon côté, une idée germe dans mes réflexions.
Mon gardien des connaissances a-t-il délibérément laissé ma conscience intacte.
Cela explique pourquoi le flux mental de mon hôte m’est perceptible.
Il est aussi envisageable que mon ancienne existence était celle d’un Chishiki…
Dans tous les cas, l’apparence physique de Mizuki ne me laisse aucun doute.
Elle est bien une représentante du peuple des Hahaoya censée avoir disparu il y a très longtemps.
Elle baille doucement.
Michel doit encore dormir, mais j’entends les pas de papa dans le couloir du rez-de-chaussée.
Alors que les derniers épis se plient sous ses gestes maîtrisés, une porte claque au rez-de-chaussée. Son regard glisse sur sa modeste poitrine dont les tétons pointent.
Je suis heureuse qu’ils aient arrêté de grossir, mais j’ai souvent cette réaction le matin.
Yumi m’a expliqué que c’est une réaction physio…
Physiologique lié à la puberté.
D’un geste vif, sa main droite écarte la literie, puis son bassin pivote.
Une fois assise sur le côté, elle observe le calendrier accroché au mur en pierre.
Dire qu’on est déjà le vingt-deux…
Mes règles sont pour bientôt.
Elle pousse un soupir léger.
Cela me laisse constater douze mois de vingt-huit jours et un de vingt-neuf.
En me basant sur les données à ma disposition…
La date actuelle du vingt-deux luminea lunae quatre cent vingt correspond au…
Jeudi 22 avril 3126 du calendrier grégorien, mais il n’est plus utilisé visiblement.
Elle se met à observer la table en pin en dessous.
De nombreuses feuilles sont posées sous un encrier.
Je dois aussi finir ma chanson et en écrire une pour l’anniversaire de Tom et de Yuki.
Son cou pivote sur la gauche pour suivre les insectes virevoltant derrière la fenêtre entrouverte.
J’adore leurs oscillations de couleur et de luminosité, surtout la reine.
Son index glisse sous la poignée métallique de la table de nuit. Le tiroir grince faiblement, puis ses doigts saisissent le briquet à silex. D’un geste, son pouce enclenche le mécanisme près de la mèche de la bougie et la flamme l’embrase. La cire distille instantanément un parfum citronné qui se répand dans la petite chambre minimaliste à l’allure rustique.
Le cadeau de papa est génial, il faut que je demande à James s’il peut en commander d’autres.
Ses pieds exercent une pression sur le tapis en laine et son corps se redresse avec calme. Elle avance d’un pas large et se tourne face à son miroir. Son index gauche glisse sous l’élastique de sa culotte pour ramener le tissu sur sa fesse.
Il me faut aussi de nouvelles culottes.
Tatsuya m’en a emprunté une parce que la sienne était sale, mais elle ne me la rendra pas.
Ses bras s’étirent vers le plafond en gardant les mains ouvertes, ses poumons inspirent une bouffée d’air, puis l’expire partiellement. Les secondes s’écoulent pendant qu’elle tient sa posture. Son torse s’abaisse sans que ses genoux ne plient, puis ses paumes se plaquent sur le sol.
Elle passe ainsi du tadasana à la posture de l’uttanasana.
Brusquement, un son mécanique strident résonne à travers la cloison attenante au lit.
Il ne fait aucun doute que c’est celui d’un réveil mécanique.
Mizuki fronce les sourcils et plisse les lèvres.
— Michel !
Sa voix bien que douce résonne avec puissance.
— Éteins ce stupide engin !
— Désolé, laisse-moi une minute.
Une voix monotone et encore endormie provient de la pièce attenante.
— Je peux venir te réveiller si tu veux ?
— C’est gentil, mais ça fait partie de mes responsabilités.
— Très bien, je n’insiste pas.
Mizuki émet un léger rire.
Michel est parfois trop obstiné, mais c’est une de ses qualités.
Ma connexion avec Mizuki s’efface et mes perceptions se connectent aux sensations de Michel.
Mon Chishiki a donc choisi de me faire observer un autre hôte…
Un instant…
Ma réserve en ERA a diminué d’un point.
Ce déplacement m’est donc imputable, mais involontaire.
Cela est sûrement lié à ces souvenirs étrangers qui ne m’appartiennent pas.
Il baille et cela me laisse un moment de réflexion sur mon Énergie Restante Activable.
Annotations
Versions