Chapitre 16

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L’Alignement est un jour formel où l’élève se doit de se montrer sous son plus beau jour et accueillir avec joie la tâche qui lui sera confiée, selon ses capacités et son potentiel d’évolution respectifs. Ainsi, l’inspecteur en charge de l’établissement – généralement le chef des Gardes de l’arrondissement – passera devant les jeunes promus alignés en rang et leur attribuera la caste pour laquelle ils seront formés pendant les cinq prochaines années. Aucun refus n’est autorisé. Aucun changement de formation n’est autorisé. Seule la possibilité de rétrograder est possible. Ainsi, des métiers hautement qualifiés, comme Trappeur, Marchand ou Chercheur par exemple, ne peuvent être entrepris que si l’élève est considéré par la plus haute autorité comme compétent pour. L’inverse est aussi vrai : un jeune promu qualifié peut rétrograder pour suivre une voie dans un métier à moins grandes responsabilités comme Agriculteur ou Facteur. Évidemment, ce genre de pratique est rare et souvent mal vue par le reste de la communauté : après tout, en faisant cela, ils refusent de contribuer à l’avenir rayonnant de notre société !

Extrait du Guide du futur faiseur d’avenir

du Compte Zérontis


Soupir.

- Merci encore pour votre aide. Bonne journée.

- Bonne journée à vous, madame. Au plaisir de vous revoir très bientôt.

Bip !

Je raccroche le combiné.

Clic !

Remis à sa place. Solidement ancré. Prédestiné. Je me renfrogne.

- Mais qu’es-tu en train de faire, Hari’ ?

Hier, puis maintenant aujourd’hui ; cela fait deux jours que tu ne t’es pas présenté aux Archives. Un travail que tu me dis si passionnant. Prenant. N’est-ce donc pas une bonne raison pour ne pas le quitter ? De filer sur la ligne droite qui est toute tracée ? On en avait pourtant discuté.


- Sol’. N’as-tu donc jamais été curieuse de savoir d’où tu viens ? Qui sont tes parents ? Quel genre de personne ils sont ?


- Ah…

Un vague souvenir me revient. Une vieille image. Celle d’un jeune homme brisé à la poursuite d’un fugace espoir. Je me frotte les bras pour chasser les frissons qui les parcourent. Le genre d’histoire qui ne se termine jamais bien. Le malaise m’envahit à mesure que les scènes se rappellent à moi. Les mots échangés. Les actions commises. Aucun retour en arrière n’est permis. Je secoue la tête, dirige mon regard vers l’extérieur de la cabine. Le petit matin se lève. Le soleil pointe derrière les toits les plus bas de Tarn. Les rues se réveillent. Leurs bruits de ville bourdonnent dans les airs. Et tous ces gens.

Ils pourraient être n’importe qui.

Cet homme-là, fringuant, la barbe grisonnante. Cette femme-ci, d’un âge mûr, au sourire éclatant. Tous. Des possibles tableaux de vie de famille se dessinant devant mes yeux.

  Hari’…

Mes doigts se posent sur le carreau de la cabine.

  Si tu es parti pour courir une nouvelle fois après cette illusion…

Comme pour frôler ce rêve.

  … je ne te soutiendrai pas.

Ma main s’éloigne de la vitre. Nous sommes trop cassés pour débarquer dans leur vie. Tu auras beau les retrouver, te présenter sous ton meilleur jour, il sera déjà trop tard.

Ils ont renoncé à leur rôle de parents il y a déjà trop longtemps .

Mes doigts hésitent un instant au-dessus du combiné. Mais je me ravise. Sors immédiatement de cette cabine. Hari’. Les pavés défilent, rapides, sous mes pieds. Je te laisse le bénéfice du doute pour l’instant ; je n’appellerai pas madame D. Elle qui t’attend encore. Qui tremble de te retrouver derrière sa porte à chaque sonnerie. Prête à éclater en larmes de joie. Ou de terreur. Sur le fil du rasoir, elle appréhende de te découvrir derrière ce battant. Au bras du papa et de la maman dont tu as toujours voulu être le fils.

- Droite, gauche, gauche, droite.

Petit à petit, alors que mes pensées continuent de vagabonder vers toi, je trace mon chemin dans la ville. Tournant après tournant. Rue après rue. Mes souvenirs des allées me guident. Préoccupant de plus en plus mon esprit. Je profite d’une brève accalmie dans les virages pour jeter un coup d’œil au ciel, clair, sans aucun nuage. Pour une dernière pensée pour toi. Presque une prière.

- J’espère, et ce du plus profond de mon cœur…

À peine dite, tout de suite assourdie. Les bruits de Tarn dévorent le début de ma phrase sans merci.

- … que tu trouveras ton bonheur cette fois-ci.

Une soudaine bourrasque de vent balaie la rue. Son souffle puissant vient frapper mon visage, claquer les pans de ma veste. Avant de disparaître presque aussitôt. Comme un signe du destin.

- Ah !

À cette pensée, un petit rire m’échappe. On dirait que ma lecture nocturne d’hier m’est un peu montée à la tête. Alors que mes doigts replacent mes mèches en bataille, j’en mordille nerveusement une au passage. Non, distraitement. Il n’y a aucune raison de stresser pour ces écrits pseudo-philosophiques. Prestement, je me remets en route pour me préoccuper d’autre chose. Mes pas sont si rapides que je me retrouve face à elle en un rien de temps. À cette statue de chat devant chez Martha et son énorme pièce porte-bonheur. Arrêt bref devant elle. Mes yeux se fixent sur les siens joliment peints. Une telle babiole, peut-elle vraiment apporter chance et fortune dans la vie d’une personne ? Je plisse des yeux. Il est plus probable qu’il s’agisse simplement d’un attrape-nigaud pour superstitieux ; aussi chère que peut être cette statue, il est impossible qu’elle possède un réel pouvoir mystique.

Sans trop y penser, je caresse du bout des doigts sa pièce dorée. Contact bref. Avant de rentrer dans la maison.

- Ah ! Mais quel plaisir de vous voir déjà levée à cette heure-ci.

La voix forte de mon hôtesse m’accueille de plein fouet. La voilà. La Pourfendeuse des Mers, adossée au cadran de la porte menant au séjour. Ses boucles brunes encore un peu embroussaillées sur le côté de son visage. Une tête à la sortie du lit.

- Bonjour, madame Vollenzosky. Avez-vous bien dormi ?

Elle éclate d’un rire puissant.

- Parfaitement bien ! Je crois n’avoir jamais dormi aussi profondément depuis mes jours en haute mer. Ah… Je me sens en pleine forme !

Sa bonne humeur une fois déclamée au monde entier, son grand sourire se fige. Diminue. Se transforme en une moue soudain beaucoup plus soucieuse.

- Mais je dois avouer que quelque chose me préoccupe quelque peu.

Elle se gratte la nuque d’un air penaud.

- Que s’est-il passé exactement hier soir ?

Ah.

Je ne sais quoi répondre à cela. La vérité ? Ou celle-ci un peu déguisée ? Je ne veux pas du tout la mettre dans l’embarras.

- Disons que…

- Tu t’es bourrée la gueule jusqu’à voir des étoiles au plafond.

Je me retourne. Le jeune garçon se tient assis sur la volée d’escalier faisant face à la porte d’entrée. Tiloméo. Une lueur menaçante dans le regard. Cependant, celle-ci n’est pas dirigée vers sa mère, mais clairement vers moi. Ses iris verts ne me quittent pas une seconde. La mâchoire serrée, la posture fermée, il faudrait être aveugle pour ne pas remarquer l’hostilité qu’il me porte. Les boucles noires tombant devant son champ de vision n’arrange en rien ce tableau. C’est tout juste s’il se retient de me sauter à la gorge.

Comme pour répondre à sa provocation, je me tiens plus droite, le menton haut. À cela, il renifle de dédain. Alors même que Martha s’adresse à lui, il continue de me fixer du regard.

- Ah oui ? J’ai fait ça, moi ?

- Oui. Même que tu pues encore de la gueule maintenant.

- Ce n’est pas vraiment ce qui s’est…

- Ah ouuuiii ? Mais encore ?

- Tu as vidé tellement de bouteilles de ton cher Bom Ânimo qu’elles ne rentraient plus dans la poubelle.

Et ainsi de suite. Les événements de la veille sont dévoilés les uns après les autres, tous grassement détaillés par le jeune garçon. Sans aucune gêne, il se moque de sa mère sans retenue. La tournant en dérision totale devant une inconnue sans aucun remord. Martha, elle, ne se démonte pas devant sa morgue. L’Aventurière de légende reste de marbre face aux provocations de son fils.

- Mmm mmm ! Je vois. Tu es très observateur, dis donc toi.

- Tu aurais dû te voir chanceler comme une alcolo de première classe ! Tu étais parti tellement loin que je me suis demandée si tu n’allais pas sortir dans la rue en criant que les « écureuils » t’avaient dévalisée, toi, madame l’Aventurière.

Et moi, au milieu de tout ça, je me tais. Gênée, désœuvrée, je ne sais comment intervenir dans ce carnaval de piques. Je me retrouve comme coincée entre deux mastodontes dans leur guerre de territoire.

Mais il serait idiot de croire qu’ils sont sur un même pied d’égalité.

- Et comment peux-tu savoir tout ça, petit garnement ?

Sans conteste, la Pourfendeuse des Mers gagne sans difficulté.

- N’étais-tu pas consigné dans ta chambre hier soir ?

-…

Aucune réponse.

Les deux se dévisagent mutuellement un instant.

Puis soudain, Til’ se lève. Descends les marches quatre à quatre. Saute pour passer les derniers paliers. Droit sur moi.

Je l’évite de justesse.

Boum !

Le corps frêle du garçon encaisse l’impact. Mais cela ne le ralentit guère. D’une main habile, il attrape un béret sur le porte-manteau tout près. Et disparaît. Ne laissant derrière qu’une porte grande ouverte et un souffle de vent. Martha se précipite à sa suite. Mais elle s’arrête presque aussitôt. Se contentant juste de pointer le bout de sa tête dehors et de crier :

- Dire « bonne journée », c’est donc si difficile que ça ! Ah… j’vous jure, les gosses de nos jours.

L’Aventurière rentre. Un soupir lui échappe. Cependant, je ne suis pas dupe. Je le vois bien, ce petit sourire pointant au coin de ses lèvres. Ce genre de situation l’amuse bien plus qu’elle ne veut bien l’avouer à voix haute. Secrètement, je soupire de soulagement. J’avais peur. Peur de ce qu’elle ferait suite aux paroles acerbes de son fils. Même s’il semble flirter avec les limites de son autorité, il ne mérite pas d’être traité comme ce vieux matelot.

Je ne devrais pas prendre ces hallucinations pour la réalité. Elles qui sont tout aussi tranchantes que les rumeurs, les tenir par le manche c’est faire acte de sottise. De pratique malsaine. De folie. Guidé par leur lame, on est capable du pire. De juger sans présomption d’innocence. Le goût amer de certains souvenirs se rappelle à moi.

- Enfin, bref, revenons à nos moutons.

Je sursaute.

- O-oui ?

La voix de Martha me ramène violemment dans l’instant présent. D’un pas lourd, elle s’approche tout près de moi. Jetant sur moi son ombre immense. Je me sens rapetisser à vue d’œil devant sa stature impressionnante. Ma salive a du mal à passer dans ma gorge. Soudain, toutes mes actions défilent devant mes yeux. Mes moindres petits faits et gestes. Je tremble à l’idée d’avoir pu l’offenser d’une quelconque manière.

- Veuillez me pardonner si…

- Merci.

Un simple mot. Qui me stoppe net.

- Merci d’avoir pris soin de tout hier soir.

Hein ?

La gêne enflamme immédiatement mes joues. Mes mots sortent bredouillants de ma bouche.

- Je n’ai rien fait qui mérite des remerciements ! C’était tout à fait normal de…

J’agite maladroitement mes mains en l’air comme pour dissiper ce malentendu. Mais mon hôtesse a l’oreille dure.

- Si je vous l’assure : pas tout le monde ne l’aurait fait. Jeter ce gratin maudit et ces tonnes de bouteilles, nettoyer le plat, me garantir une bonne nuit de sommeil.

Elle éclate d’un rire bruyant.

- C’est un vrai plaisir d’avoir une cliente comme vous sous mon toit ! J’espère que vous resterez longtemps parmi nous.

Ah. Longtemps…

- À ce propos …

Vite retombé, ce sentiment de gêne volatile. Il ne me reste plus que le goût amer de ma situation. Que je ne devrais jamais oublier. Je serre les dents. Mes doigts tremblants fouillent dans les tréfonds de ma veste. Et en ressort une enveloppe. Lisse, blanche, sans aucune écriture. Je la tends immédiatement à la Pourfendeuse des Mers.

- Voici une partie du loyer pour cette semaine.

Quelques billets et pièces éparses, résultats de rognages intensifs des fonds de tiroir. Économisés à la sueur du front et au prix de la faim. Et tout ça pour ne même pas couvrir les frais d’une semaine de logis dans cette auberge bon marché.

- Oh, mais il ne fallait…

- Aujourd’hui, je vais activement rechercher un emploi pour vous payer en temps et en heure ce que je vous dois.

- Je vous assure ce n’est pas si…

Martha tente plusieurs fois de m’interrompre, de me rassurer. Mais je débite sans une pause le discours que j’avais préparé.

- Je sais que ce n’est pas idéal comme compromis. Vous vous dites sans doute que vous ne me connaissez pas, qu’il n’y a aucune garantie…

Après tout, il suffirait d’un claquement de doigt à cette femme pour me mettre à la porte. Mes poings se serrent. Et ça, il ne faut surtout pas que cela arrive.

- Mais je peux vous assurer que je ferais tout mon possible pour y arriver !

Je finis presque en un cri ma supplique.

Mais seul le silence la suit.

Pesant. Intenable.

Mon corps se tend à l’extrême. J’attends. Sa réponse. Sa réaction. Si je n’ai encore commis aucun mal qui justifierait de me jeter à la rue, ces conditions plus que précaires que je lui propose n’en sont pas moins de mauvais arguments. Après tout, je doute que passer quelque temps sans louer cette chambre ne fasse une véritable différence pour elle. Pourquoi donc garder sous son toit une personne sans le sou, qui n’a aucun revenu assuré pour payer son dû ? Si même moi je me le demande : il n’y a aucun doute que Martha y a déjà pensé. Je me mords la lèvre, baisse la tête. Me recroqueville autant que possible.

Pitoyable.

L’attente est longue. Le silence s’étire. Mon corps souffre et commence à trembler. Cédant sous la tension. Soudain, du mouvement. La main de Martha se lève dans ma direction. Droite. Sûre. Puissante. Il n’y a aucun doute dans ce geste. Je me tends, prête à encaisser le coup.

Mais il ne vient jamais.

Seule une douce chaleur se répand sur mon épaule. Diffuse. Fragile. Elle s’étend depuis les doigts bourrus de l’Aventurière.

- Vous n’aviez pas à vous en faire pour ça.

Quelques mots, pourtant si simples. Je relève la tête et me fige sous ce regard bienveillant. Sous ce toucher qui ne me veut aucun mal.

- Mais je… !

- Vous savez, je n’ai pas ouvert cette auberge pour faire du profit, mais bien pour aider ceux qui n’ont pas de chez eux.

Un grand sourire fend le visage de Martha. La dent de Charybde à son oreille dodelinant.

- Après tout, j’ai connu ça moi aussi, la vie sur les routes. À travailler, dormir, travailler, sans relâche.

Le manque de confort. Le froid mordant de l’hiver, l’étouffante chaleur de l’été. Un travail. Sans horaire, sans répit. À courir et à risquer sa vie. Les images fusent dans mon esprit. De repas partagés, de rires communiqués. Confus flashbacks de sensations, de sons. D’une voix.


- Je te revaudrais ça, petite sœur !


Je caresse l’espace entre mes deux clavicules. Mais rien. Comme un vide en moi. Un manque. Mes sourcils se froncent. Un court instant. Le temps d’un bref doute. Qui disparaît sans laisser de trace.

J’avale difficilement ma salive. Mon hôtesse continue de me déblatérer son discours de bienfaisance. Ses mots imbibés d’honnêteté sincère entrent par l’une de mes oreilles et ressortent de l’autre côté. Je n’y peux rien. Le malaise me tenaille les entrailles. Cette impression de devoir rembourser quelque chose que l’on avait pas demandé. Une gêne, peut-être une honte : d’être devenue une mendiante.

Mes dents grincent. Je ne suis peut-être pas plein aux as, mais je ne demande pas pour autant l’aumône. Juste que l’on accepte ma situation. Sans négociation. Sans charité. Est-ce donc trop demandé ? La colère gronde en moi.

- Je comprends très bien votre situation… aucun souci. Je comprends… il n’y a pas de honte à… Je comprends…

Mais que comprends-tu exactement, Martha ?! Que je suis misérable ? Que j’ai besoin d’aide ? Mais je ne t’ai rien demandé ! Je t’expose simplement ma situation et tu n’as qu’à l’accepter si tu as une si bonne âme que ça ! Tu peux te les garder, ces mots de bienveillance. Je me suis débrouillée toute seule jusqu’à maintenant, sans l’aide de personne. Ne crois pas que tes paroles vont changer quoi que ce soit pour moi ! Au diable les Gardes et les habitants Tarn ! Je préfère encore être chassée à coup de pieds, plutôt que de lécher des pieds pour survivre !

Pourtant, tu as toujours vécu comme ça. Pourquoi ne pas recommencer ? Tarn ou Mer’u, c’est du pareil au même, non ?

Je me retourne. Mais rien. Personne. La voix au creux de mon oreille comme évaporée.

À mon mouvement brusque, Martha s’est arrêtée de parler.

- Tout va bien, petite alouette ?

Je jette encore un dernier regard dans la pièce.

- Oui… Oui, oui, tout va bien.

Le vertige me prend. Je me retrouve vacillante.

- E-excusez-moi, il faut que j’y aille.

Je sors précipitamment. Abandonnant Martha, la discussion et toutes ces histoires d’argent. Dans mes oreilles bourdonnant mes battements de cœur et mon souffle fébrile. Je marche.

Tu cherches à fuir, n’est-ce pas ?

- Je ne fuis rien.

Ah oui ? Tu es sûre de ça ? Moi, ce n’est pas ce que je constate.

- Tu es qui pour me dire ça au juste ?

Je lance un regard aux alentours. Toujours personne.

Moi ? Mon identité n’est pas importante. Ce qui l’est en revanche c’est que tu es faible.

- Je ne suis pas faible !

Quelques passants me jettent des regards curieux. J’accélère le pas, tourne à la prochaine intersection. Fébrile.

Ah oui ? Explique-moi pourquoi alors tu n’as pas accepté sa bienveillance ?

- Ça ne te regarde pas.

Un rire au creux de mon oreille.

Mais ça, c’est ce que tu crois ! Toute cette histoire me regarde : je serai bien triste de te voir mourir.

- Tu racontes n’importe quoi. Je ne compte pas mourir.

Je cours. Survole les rues. Mon souffle, mes battements de cœur erratiques pulsent dans ma tête.

Mais cette voix ne me lâche pas.

Mais si, tu vas mourir Solfiana. Parce que tu es faible.

Mes sensations se font plus floues. C’est à peine si je distingue la droite de la gauche. Les passants me regardent débouler curieux. Les murmures s’élèvent. J’accélère la cadence, m’enfonce vers des recoins inconnus.

- Je ne… suis… pas faible !

Mon souffle se raccourcit. Je suis en nage.

Mais si tu l’es. C’est parce que tu es faible que ta coéquipière est morte.

Ma tête pulse douloureusement. Des images me reviennent. Des flammes. Une fille.

- Ah… ah…

Aller, retourne voir Martha. Accepte sa charité. C’est tout ce que tu es capable de faire après tout.

- C’est pas toi qui… ha, qui ne voulais pas que je… l’approche d’abord !

Oh oh, mais je vois que tu te souviens de tout. Ou presque : ta sœur serait si triste d’apprendre que tu l’as oubliée.

- Je n’ai pas… de sœur !

Je me perds dans les méandres de Tarn. Ses hauteurs, ses escaliers. La cité m’avale tout entière.

Mais si, tu en avais une. Même que c’est grâce à elle que tu es encore là aujourd’hui.

Je n’ai plus assez de souffle pour répondre. Ma vision se trouble.

Parce que tu n’es rien si personne ne t’aide.

- Ah !

Quelqu’un me barre la route. Je freine des deux pieds pour éviter la collision, mais il est déjà trop tard. Nous tombons, roulons au sol. Ma chute est amortie par le corps de l’inconnu.

Ou presque.

- Arg ! Tu es… ha, plus lourde que je ne…ha, l’imaginais.

Car c’est bien la voix de Clochette me parvient entrecoupée.

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