3.3    À la recherche d’une échappatoire.

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Plongé dans mes réflexions, je ne ressens pas tout de suite l’appel du lieutenant klibs. Dès que j’en prends conscience, je m’excuse auprès de notre hôtesse et sors pour mieux capter le flux.

  • Harold, me recevez-vous ? Hello Harold, ici le lieutenant klibs captez-vous mon appel ?
  • Oh, oui, réponds-je. Excusez-moi, j’étais dans mes pensées à la suite de révélations extrêmement choquantes que l’on vient de nous faire et j’en suis encore bouleversé.
  • Que se passe-t-il ? Avez-vous un problème ? pouvez-vous nous indiquer où vous êtes ?
  • Non, nous n’avons pas à proprement parler de problème, et non, nous ne savons pas où nous sommes. Après être sortis de la forêt, nous avons avancé sur une terre totalement aride et nous sommes rapprochés de ce qui semblait être un village. Or nous avons découvert que ce lieu abrite des pauvres femmes contraintes d’accomplir des besognes horribles. Pour l’instant nous n’avons rien à craindre, mais nous ne savons pas comment partir d’ici car il faut cinq jours de marche pour rejoindre une zone civilisée et nous n’aurons jamais assez de vivre.
  • Ne vous affolez pas, ensemble nous trouverons une solution pour vous ramener. Mais pouvez-vous m’en dire plus sur ce village ?
  • Rien probablement qui vous permette de nous localiser. Mais pourriez-vous faire des recherches sur un bagne pour femme, ou quelque chose d’équivalent, qui se situerait proche de la forêt rouge ? Puisque c’est là que nous sommes.
  • Très bien, je m’y attèle tout de suite et vous recontacte dès que j’ai du nouveau.

Rassuré que nous n’ayons pas perdu le contact avec Eilifuis, je rejoins Télémaque et Seercapah afin de reprendre notre entretien. Une stratégie pour quitter ce hameau sinistre m’apparaît, mais encore faut-il qu’elle soit réaliste. Je vais donc la tester :

  • Dites-moi, Madame, comment se déroule l’escale de la caravane venant de Taüsegna ?
  • Les manœuvres sont totalement codifiées et n’excèdent pas quelques heures. Le jour de son arrivée, en début d’après-midi un émissaire apparaît pour m’informer de l’arrivée du convoi. Il faut vous dire que nous n’avons aucun moyen de communication avec l’extérieur. Celui-ci me transmet le message et s’en retourne aussitôt. En début de soirée, l’ensemble des filles est consigné, avec les enfants, dans un barraque sans fenêtre derrière l’incinérateur et les issues sont fermées à clef. Seules mes deux adjointes restent à mes côtés pour accueillir cette ignoble procession. Vers minuit celle-ci entre sur le site et se positionne le long du premier bâtiment que vous avez vu et y dépose les containers de cadavres pour aussitôt recharger ceux de la livraison précédente que nous avons lavés. Une fois ces manœuvres réalisées, ils font de même avec le compartiment des femmes. Celui-ci subit aussi une rotation car les conditions y sont tellement pénibles durant le voyage, qu’il est souillé de toute part. L’ensemble des opérations dure environ trois heures et la caravane peut repartir aussitôt.
  • Les containers sont-ils vérifiés avent d’être repositionnés sur les plateformes ?
  • Non, tout se passe très vite et les convoyeurs n’ont qu’une hâte, celle de repartir aussi, ils ne vérifient rien.
  • Pensez-vous que nous puissions profiter d’une rotation pour quitter le village ?
  • Pour l’instant, je ne vois pas comment, mais nous pouvons y réfléchir.
  • Pouvez-vous me montrer ces caissons ? demandé-je.
  • Sans problème, suivez-moi, mais ne faites pas trop paraître votre intérêt, il ne faudrait pas éveiller les soupçons.

Nous quittons donc la demeure de la dame en noir pour rejoindre les deux horribles constructions où se concentre l’activité des femmes. Il semble que ce moment corresponde à une pause car nous ne croisons personnes ni à l’approche, ni à l’intérieur.

  • Nous avons de la chance, indique notre guide. C’est le moment de l’affectation des rôles pour demain. Chaque fille est informée de la tâche qu’elle devra assurer, mais elles peuvent s’arranger entre elles si elles veulent changer de mission en fonction de leur sensibilité du moment. Cela prend en général un bon quart d’heure et nous avons donc le temps d’inspecter les équipements.

Bien que l’odeur dans le bâtiment soit absolument épouvantable, nous y pénétrons avec empressement. Une lumière parcimonieuse filtrée par les fenêtres encrassées du toit éclaire un grand espace où tout paraît gris. Nous ne nous attardons pas et rejoignons l’autre extrémité du local. Là, six containers de quatre mètres sur deux pour deux mètres de hauteur attendent. Leur capot supérieur est ouvert ainsi qu’une trappe sur l’un des petits côtés. Intérieurement, ils sont tapissés d’un métal lisse qui ne donne aucune prise. Les bords des ouvertures sont marqués par des boudins souples qui ont probablement pour objet de les isoler totalement.

- Je ne pense pas que nous puissions utiliser ces caissons, si nous abimons l’isolant, cela va se voir et autrement, nous y mourrions asphyxiés, dis-je. Allons voir la cabine des femmes.

Celle-ci est distante d’à peine quelques mètres, aussi nous l’atteignons rapidement. De même largeur que les containers, elle est cependant deux fois plus longue. Deux portes totalement aveugles y donnent accès de part et d’autre.

J’entre et demande à Télémaque de fermer derrière moi.

L’intérieur est tapissé du même métal mais des bancs courent le long de chaque longueur. Aucune fenêtre ne l’éclaire directement, la lumière descend du plafond à travers plusieurs écoutilles qui doivent aussi assurer l’aération. À l’une des extrémités, un plan incliné descend, à partir d’une ouverture étroite, vers le sol extérieur. Je suppose que c’est le système destiné à satisfaire aux besoins fondamentaux des occupantes. Je constate dans les parois la présence de volets qui doivent permettre de compléter l’arrivée d’air. Bien évidemment, depuis l’intérieur il n’y a aucun moyen d’ouvrir le compartiment.

Mon inspection terminée, je tape sur la porte et Télémaque me rend ma liberté.

  • Il est impossible de s’échapper sans aide extérieure, conclus-je désappointé. Il va falloir trouver autre chose !

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