Préparer un exposé

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 L’après-midi, M. Mate annonça à ses élèves que l'heure suivante serait consacrée à la préparation de leur exposé personnel. Comme annoncé deux jours auparavant, ils avaient jusqu’au vendredi suivant pour concocter une présentation originale de quelques minutes sur un sujet de leur choix.

 La plupart des élèves étaient aux anges. Ils avaient toutes les libertés dans le choix de leur thème. C’était tout juste si leur instituteur ne passait pas parmi eux pour s’en informer et les aiguiller. Ce pouvait être un lieu, un évènement, un personnage, une invention, un sport… Les possibilités ne manquaient pas. Ils avaient reçu comme devoir de se procurer un maximum de documentations pour préparer le tout en classe. Ils avaient aussi accès à quelques tablettes informatiques, en nombre limité, afin de parfaire leurs recherches sur la Toile. S’ils devaient imprimer quelque chose, ils pouvaient le demander à M. Mate ou apporter une clé USB de la maison. C’est d’ailleurs ce à quoi se consacra la chimère la première moitié de l’heure.

 Ils étaient tous très emballés par l’occasion de partager avec leurs camarades un sujet qui les passionnait. Même Harry était enthousiaste et était arrivé avec une pile de feuilles sur l’Amazonie. Certains s’entraidaient en se prêtant des livres qu’ils avaient ramenés de la maison. C’était aussi une bonne excuse pour papoter avec des camarades. Trop occupé par les différentes doléances, M. Mate n’avait pas le temps de les rappeler à l’ordre. De toute façon, le travail qui n’était pas fait en classe le serait à la maison, du moins s’ils ne voulaient pas écoper d’une mauvaise note.

 Agatha aidait Lisa à faire le tri. Le portrait vivant n’avait pas eu l’occasion de se rendre à la bibliothèque avec son père. Qu’à cela ne tienne, la petite sorcière avait apporté à sa meilleure amie toute une série de bouquins sur les travaux de Léonard De Vinci. À deux, elles consultaient des biographies du peintre. Lisa était stupéfaite de découvrir tout ce que l’artiste avait fait dans sa vie. Elle qui l’avait choisi pour son affinité avec la peinture, elle découvrait en lui un véritable touche-à-tout qui avait même imaginé des machines volantes.

 — Vous pensez que vous aurez bientôt fini avec la tablette, les filles ? les interrompit Romulus.

 — Tu peux prendre la mienne ! lui répondit Agatha. Qu’est-ce que tu cherches ?

 — Des infos sur Maradona. Un joueur de foot, ajouta-t-il devant l’air perplexe de son amie.

 Agatha acquiesça et tapa le nom demandé sur la barre de recherche. Elle regarda avec curiosité les premiers résultats puis tendit l’engin au jeune loup-garou qui la remercia. Elle examina la ligne du temps qu’il avait débutée avant de se concentrer de nouveau sur les investigations de Lisa. Ils avaient beau ne pas avoir les mêmes centres d’intérêts, ces trois-là étaient inséparables. Tous les jours après l’école, ils se rendaient chez l’un, le plus souvent Agatha ou Romulus, pour y faire leurs devoirs ensemble. Comme Lisa était toujours coincée dans son tableau, elle comptait sur ses deux amis pour la balader un peu partout, à l’aide d’une brouette qu’ils tiraient en lui faisant la conversation. Romulus partait de temps en temps pour jouer au ballon avec les autres garçons, mais les filles, elles, ne se quittaient pour ainsi dire jamais.

 — Et toi, Agatha, tu ne travailles pas sur ton exposé ? s’étonna Romulus.

 — J’ai trouvé pas mal d’articles hier, mais je suis un peu bloquée pour le moment, alors autant aider Lisa.

 — Et c’est quoi, ton sujet ?

 — La disparition d’Agatha Christie !

 Lisa et Romulus croisèrent le regard et éclatèrent de rire. Décidément, leur amie vouait un véritable culte à son auteure préférée. Agatha avait déjà lu de nombreux romans de la Reine du crime. Elle avait même donné des noms d’enquêteurs à son chat et à sa peluche. Elle avait poussé le bouchon jusqu’à donner à sa baguette l’apparence d’une loupe. Mais le pompon, c’est quand elle avait mené une véritable enquête pour retrouver le cadeau volé à Béatrice, la gobeline, le jour de son anniversaire. Les faits s’étaient déroulés quelques semaines plus tôt. La petite sorcière avait découvert le pot aux roses là où personne ne s’y était attendu. Elle s’était vu pousser des ailes et rêvait de se plonger dans une nouvelle enquête un jour.

 — C’est très sérieux ! se vexa-t-elle. Agatha Christie a disparu pendant onze jours en 1926 ! Personne ne sait ce qui lui est arrivé pendant ce temps. Elle-même semblait atteinte d’amnésie ! Vous ne trouvez pas ça fascinant ?

 — Peut-être, mais qu’est-ce qui te bloque, au juste ? demanda Lisa. Tu ne comptes quand même pas résoudre l’affaire ?

 — Tiens, tu as vu cette histoire avec le roi de France et De Vinci, tu devrais aussi en parler…

 Lisa soupira, entre exaspération et amusement. La sorcière savait être bornée quand elle le voulait et elle savait qu’elle ne la ferait pas changer d’avis. Aussi abandonna-t-elle l’idée de la raisonner, aujourd’hui du moins. Elle reviendrait à la charge plus tard. Ce n’était qu’un exposé d’école, après tout, il ne fallait pas qu’elle se casse la tête à résoudre l’insoluble.

 Le temps fila rapidement, bien plus vite que lorsqu’ils avaient devant eux des exercices. L’heure était presque arrivée à son terme et la sonnerie annonçant la dernière récréation de la semaine n’allait pas tarder à retentir. M Mate s’était assis à son bureau pour prendre des notes quand il aperçut le bras de Cléo se lever.

 — M’sieur, m’sieur, vous avez pas dit qui prendrait Oscar cette semaine !

 Chaque week-end, un élève avait l’occasion de ramener Oscar chez lui afin d’en prendre soin. En début d’année, les élèves se battaient presque pour avoir ce privilège. Mais très vite, l’appétit d’Oscar avait valu l’interdiction de séjour à de nombreux enfants. Agatha s’en privait pour une autre raison. Ça c’était très mal passé la dernière fois entre lui et Miss Marple, son chat noir. Lisa n’était pas une grande amatrice des rongeurs et Romulus s’était toujours refusé de le prendre chez lui. Il appréhendait ses propres réactions à rester avec un petit squelette pendant deux jours, lui qui aimait tant ronger des os.

 Les bras de Juliette et de Romain se levèrent aussitôt la question posée. De la classe, c’était chez eux que l’animal allait le plus souvent, car ils s’en occupaient tellement qu’il n’avait pas le temps de faire la moindre bêtise. La momie gardait elle aussi le bras levé et insistait pour être choisie. Cependant, M Mate ne se souvenait que trop bien de la dernière fois que Cléo était parti avec. Oscar était revenu avec deux côtes et, surtout, un fémur en moins. Il avait dû houspiller le fautif trois jours pour que celui-ci finisse par les retrouver dieu sait où. Cléo était un terrible tête en l’air, aussi M Mate désigna la gorgone à la place.

 Une fois n’est pas coutume, Cléo poussa un soupir digne de ceux de Moly. Il croisa les bras d’un air boudeur et son instituteur lui proposa de nourrir l’animal avant de sortir en récréation. La proposition parut contenter l’enfant qui acquiesça avec enthousiasme alors que la cloche sonnait enfin leur pause.

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