Agatha Petipois jardine

5 minutes de lecture

 Lorsqu’ils arrivèrent le lendemain à l’école, tous les élèves de la classe s’étaient rassemblés près du vieux bouleau afin de faire le compte des friandises pour la rançon. Comme la veille, Molly avait pris une balance. Ils y disposèrent une caisse aux motifs de bananes apportée par Romain. Dedans, ils mirent les sachets de berlingots apportés par Agatha, Jacky, Jonah et Harry. Lisa était parvenue à prendre un bocal de fraises tagada, Béatrice des sucreries en forme de chat et Loïc des paquets de sucre qui crépite sur la langue. Quant à la momie, elle avait déniché des dragées enrobées de chocolat. Outre la boite, Romain avait aussi tout un tas de sachets entamés, comme s’il avait vidé tous les tiroirs chez lui. À cela s’ajoutaient les quelques bonbons de Juliette et une grosse sucette rouge prétendument à la fraise de Jérémy. Romulus n’avait pas eu l’air convaincu quand il avait vu passer cette dernière. Mais comme il n’avait rien pu prendre de chez lui suite à ses punitions, il se passa de tout commentaire.

 C’était un sacré butin, digne des plus rentables soirées d’Halloween. Ils en auraient salivé. Malheureusement, toutes ces friandises ne leur étaient pas destinées. Au fond d’elle, Agatha s’en voulait. Elle avait espéré résoudre l’affaire avant de devoir verser la rançon. Mais la situation lui avait échappé. Elle en avait oublié d’enquêter après son passage chez la directrice. Chez elle, elle n’avait pas eu plus de temps pour réfléchir à la question.

 Moly, elle, jouait la fière. Sa mère avait décrété que Poly ne ferait aucune des punitions imposées par la directrice. Au terme d’une longue dispute, madame Tatin avait manifestement cédé. Cela ne ressemblait pas à la harpie, mais la famille cyclope pouvait se montrer particulièrement têtue et désagréable, menaçant même de porter plainte. Moly s’en pavanait plus que de raison.

 Leur punition dans le potager, sans Poly donc, était prévue pour la récréation suivante. Ils ne pourraient donc pas disposer la boite de la rançon avec les autres. Le message demandait simplement de tout laisser avant de quitter la cour de récréation. Ils ne pourraient voir qui récupérerait ensuite leurs friandises. Le ravisseur avait-il prévu de rendre Oscar à ce moment-là ?

 Le début de matinée se passa sans grandes péripéties. Après une heure de calculs écrits, Mr Mate les laissa travailler sur leur exposé du vendredi. Agatha tenta de mettre ce temps et son avance glanée la veille à profit pour observer l’écriture de ses camarades. Elle aida ainsi Loïc, Jacky puis Romain, sans qu’aucun d’eux ne présente de t au trait mal placé. Elle lisait un article sur l’histoire de la Grèce pour le diablotin quand Mr Choucroute frappa à la porte. Il était là pour elle et Romulus.

 Mr Mate leur donna l’autorisation de sortir plus tôt pour accompagner le concierge, conformément à leur punition. Romain, qui était au courant pour la boite, lui adressa un pouce en l’air. Il espérait vraiment qu’elle retrouverait Oscar. La petite sorcière avait bon espoir. Mr Choucroute avait un mobile, il aurait eu l’occasion d’entrer en classe et, surtout, cela expliquerait comment le ravisseur comptait récupérer les sucreries pendant les heures de cours. Elle voyait simplement mal le zombie se goinfrer de sucre, c’était là le seul point faible de cette hypothèse.

 Pas très bavard, Mr Choucroute leur fit enfiler une salopette de jardinage et des gants avant de leur confier une truelle. Il comptait sur eux pour se débarrasser des mauvaises herbes. Il leur montra ce qu’il fallait retirer. Les plantes, par leurs têtes violettes et leurs dents pointues, étaient aisément reconnaissables. Il fallait juste éviter qu’elles les mordent lorsqu’ils les déracinaient.

 Romulus et Agatha avaient convenu que l’un d’eux devrait faire diversion pendant que l’autre essayait de creuser à l’endroit indiqué par Harry. Ils n’en eurent pas besoin, car le zombie les laissa sans surveillance aussitôt que la cloche eut sonné.

 Saisissant cette chance, les deux enfants se précipitèrent entre les salades épineuses et les tomates à retardement, si vite qu’ils faillir en déclencher l’explosion. Sans plus attendre, alors qu’Agatha guettait le retour du concierge, Romulus usa de sa truelle pour creuser. Ce ne fut pas long avant d’atteindre l’obstacle recherché.

 Avec précipitation, il retira un maximum de terre autour afin de sortir la fameuse boite. Il avait presque l’impression de découvrir un trésor ancien enterré par des pirates. Quand enfin il l’eut en main, Agatha abandonna toute prudence et s’agenouilla à côté de lui, des étoiles dans les yeux.

 — C’est rempli, y a plein de truc à l’intérieur, dit le loup-garou en soupesant la caisse. Ce n’est pas normal, si… ?

 — Ouvre-là !

 Romulus acquiesça et, sans plus attendre, souleva le couvercle. Ils s’étaient attendus à beaucoup de choses, mais pas à ça.

 À l’intérieur, il y avait tout un tas d’objets du quotidien : des gommes, des crayons et des stylos de toutes les couleurs, un cahier d’élève, un yo-yo, des billes, une cocotte en origami, une poupée de chiffon, un bonbon au chocolat… Tout un tas de petites choses banales, loin de tous les films que les enfants s’étaient imaginés.

 — Qu’est-ce que c’est que tout ça ? s’étonna Agatha, sourcils froncés.

 — C’est une capsule temporelle, expliqua Romulus après avoir ouvert le carnet. C’est la classe des grands qui a glissé plein d’objets de tous les jours pour que quelqu’un, dans plusieurs années, l’ouvre et voit s’il y a des différences.

 — C’est écrit là-dedans ?

 Agatha s’empara du carnet pendant que Romulus farfouillait dans le reste avec curiosité. Effectivement, un élève avait tout expliqué en première page, avec une belle écriture soignée. La signature désignait un élève qu’elle avait déjà croisé, un farfadet. Elle tourna la page et découvrit un autre texte qui comptait une scène de tous les jours, écrite par un autre élève.

 — Tout ça pour ça, maugréa Romulus. Franchement, ça n’en valait pas la chandelle… Qu’est-ce qu’on fait, maintenant, on la remet ?

 Comme la sorcière ne lui répondait pas, il se tourna vers elle. Elle avait les yeux écarquillés et la bouche mi-ouverte alors qu’elle lisait une page du carnet. Romulus dut claquer des doigts devant son nez pour la sortir de sa lecture.

 — Ça va ? Pas trop déçue ?

 — Du tout, souffla-t-elle en se relevant. Il faut qu’on parle avec madame Tatin.

 — Quoi ? Pourquoi ?

 — Parce que je sais qui va aller chercher la rançon et qu’on n’a plus besoin d’avoir peur pour Oscar si on le dénonce !

Annotations

Versions

Ce chapitre compte 2 versions.

Vous aimez lire C.Lewis Rave ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0