Chapitre 17 :

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M. Gomez avait raconté la crise de la voyante à son frère. Laurène le sut dès son retour lorsqu’il bombarda Aaron et elle de questions. Lucas décida donc de ne plus lâcher sa jumelle d’une semelle. Cette dernière n’avait pas eu le courage de lui avouer qu’elle était vraiment l’élue, ni à lui, ni à ses amies. La première semaine fut calme. Laurène reprit les cours sauf les entraînements aux combats pour ne pas ralentir sa guérison. Mais elle pourrait reprendre dans peu de temps au plus grand plaisir des adultes.

D’un côté, la relation de Clara avec les autres filles se dégradait de plus en plus : elle les ignorait. Elle ne leur avait pas adressé la parole durant toute la semaine de la rentrée. Cela commençait fortement à agacer Anna, Valentine et Laurène. En plus d’être triste et agacée par son amie, la Liée se sentait seule. Clara était sa meilleure amie, comme une sœur pour elle, donc son attitude la blessait beaucoup. Avant, Laurène se confiait toujours à Clara et maintenant elle n’avait personne. Durant toute la semaine, la jeune Dresseuse ne leur parla pas malgré leur tentative.

Henry et Joyce revinrent le premier dimanche de mars : le premier mars. Joyce qui voyait bien qu’il y avait anguille sous roche conseilla à ses amies d’engager la conversation pour obtenir des réponses. Clara ne semblait vraisemblablement peu encline à le faire. Voire pas du tout. L’anniversaire de la jeune fille arrivait en fin de semaine et ses amies n’avaient rien préparé pour elle. Laurène avait pour habitude de lui faire ne serait-ce qu’un petit cadeau mais cette année même si elle l’avait, elle hésitait à le lui offrir. Avant, elles devaient régler leur différent dont la Liée ignorait tout. Et c’était car elles repoussaient l’échéance que les trois amies fixaient Clara discutant avec ses amis Dresseurs.

– Vous ne voulez pas aller lui parler ? intervint Lucas. Avec vos regards de tueuse, on dirait que vous planifiez son meurtre.

– Peut-être bien, lança Valentine à la cantonade.

– Elle n’était pas très drôle cette blague Val…

– Qui te dit que c’était une blague ?

– Personne ne va tuer personne, assura Laurène. On va juste aller lui parler calmement sans se crêper le chignon.

– Tu es la seule personne aux cheveux attachés et c’est des nattes comme d’habitude, lâcha Joyce perplexe.

– C’est une expression pour dire que des filles se battent, expliqua Lucas qui ne pouvait cacher son sourire. Je t’en expliquerai si tu veux, il y en a plein en France donc tu vas être paumée si tu ne les connais pas.

Joyce remercia son ami. Valentine tapa du poing sur la table et avant que quelqu’un ait pu la retenir, elle fonça vers Clara qui riait aux éclats. Laurène et Anna se lancèrent un regard horrifié avant de se précipiter à la suite de leur amie. Lucas souffla, sachant que Valentine n’irait pas en douceur, encore moins avec une amie. Il serra la main de Joyce et détourna le regard tout en gardant l’oreille ouverte. Tant que quelqu’un ne s’en prenait pas à sa sœur, il n’avait aucune raison de s’énerver. Lorsque Valentine s’arrêta devant Clara et elle ne fit rien. Laurène et Anna eurent le temps de se poster à ses côtés. La brune attendait que la Dresseuse demande ce qu’elle voulait mais elle leur lança un seul regard sans leur prêter plus d’attention. Son attitude excéda la Persévérante.

– Clara, annonça Valentine d’une voix lourde. Il faut qu’on parle.

Ce ne fut que lorsque la grande jeune fille lui empoigna la main qu’elle daigna leur répondre.

Elle ne réussit pas à se défaire de l’emprise de son amie qui l’entraîna avec force et la jeta sur le canapé du salon des Liés. Aaron et Henry qui se détendaient tranquillement optèrent pour la meilleure option : quitter la pièce. Henry dans sa chambre et Aaron dans le quartier commun. Cela devenait évident pour Laurène : ils ne pouvaient pas se saquer. Clara s’assit doucement sur le canapé sans les regarder dans les yeux. La Liée voyait bien que sa meilleure amie était tentée de partir mais elle espérait que ça n’arrive pas.

– Oh non, murmura Valentine avant de reprendre d’une voix plus forte. Si tu oses rester muette alors que ça fait des semaines qu’on te lance des perches, c’est mon poing qui va rencontrer ta face de Dresseuse perfectionniste !

– Calme-toi, susurra Anna doucement en laissant sa main sur l’épaule de sa copine. Clara… on s’inquiète pour toi. Vraiment ! Tu ne nous parles plus… explique-nous ! Nous ne pouvons pas deviner.

Clara resta silencieuse. Laurène ne savait que dire pour l’encourager. Elle avait envie de rejoindre son amie, de lui montrer qu’elle était là pour elle, que si elle avait un problème, elle serait là pour l’aider tout comme Valentine et Anna. Mais elle n’y arrivait pas sentant la colère monter en elle. La Liée se contenta de chercher le regard de son amie, en vain.

– C’est à cause de Laurène.

– Comment ça ? Arrête ! Elle ne t’a rien fait ! s’indigna la brune. Comment ça pourrait être de sa faute ? Ça fait des semaines qu’elle ne t’a pas parlé car tu ne lui parles pas.

– C’est à cause de Laurène, répéta la Dresseuse sûre d’elle.

– Ma faute ? De quoi tu parles ? dit doucement l’élue choquée avec une voix tremblante.

Le cerveau de Laurène grillait alors qu’elle se remémorait tous les événements depuis leur venue au campus. Elle n’avait jamais eu l’impression d’avoir réalisé une action à l’encontre de son amie. Et de toute façon, ça ne lui serait jamais venu à l’esprit de blesser son amie. Pas volontairement en tout cas, et savoir que sa meilleure amie la tenait pour responsable lui fit mal au cœur.

– De quoi je parle ? s’énerva Clara en se levant. Putain Laurène ! Tu me connais en plus ! Mieux que quiconque. Tu sais très bien que la seule personne en qui je peux compter c’est mon père ! Parce que ma mère se fiche de comment je vais tant que je réussis. Et mon père était là pour m’aider à me sentir mieux ! Mais depuis qu’on est ici, il se préoccupe toujours que de toi ! Toujours ! Toujours toi. Tu m’as volé la seule personne qui me soutenait.

– Quoi ? lâcha la Liée. Mais si tu le disais on aurait été là pour te soutenir… enfin, ton père t’aime, Clara. Il aurait compris si tu lui en avais parlé.

Clara avait les joues trempées. Valentine et Anna médusées ne savaient plus où se positionner dans ce conflit qui ne les impliquait pas. Laurène sidérée resta paralysée par la réaction de Clara et l’état dans lequel elle s’était mise. Habituellement, son ami ne perdait pas le contrôle comme ça, elle restait calme. Avant, Laurène aurait sûrement plus tenté de la rassurer cependant ce que Clara venait de dire lui avait fait mal, et aucun mot bienveillant ne montait à ses lèves. Cette colère n’était pas elle. Laurène concédait être colérique mais elle ne voulait pas faire de mal à sa meilleure amie, celle qu’elle considérait comme sa sœur.

– Ah bah oui bah quoi !? Quand on ne se rend pas compte, on ne sait plus quoi dire face au fait accompli ! Hein ? La vérité c’est que mon père passe plus de temps avec toi qu’avec moi comme si tu étais sa fille ! Mais c’est moi sa fille ! C’est moi qui ait besoin de lui mais il ne fait attention qu’à toi ! Va plutôt te réconcilier avec tes parents.

– T’as de la chance que je n’ai pas le partage pour te brûler sur place.

Laurène était trop énervée pour regretter ce qu’elle venait de balancer à la figure à Clara. Elle avait l’impression que sa situation s’aggravait de jour en jour, qu’elle ne serait jamais prête pour ce qu’ils voulaient. Elle n’avait pas besoin de ses parents, elle avait besoin de puissance, de maîtrise, de confiance.

« Et tu devrais te calmer avant que tu l’actives par inadvertance. »

« Ne me dis pas que tu peux le sentir venir… »

« Non, mais je connais les Liés et… »

– Oh ! On te parle ! hurla Clara qui se trouvait levée face à Laurène. Ose me dire que tu t’en étais rendu compte et je t’en fous une.

– Tais-toi Clara, tu ne sais rien. Oui, je n’avais pas remarqué qu’il te délaissait mais tu aurais dû lui en parler, c’est ton père ! Il aurait compris ! Et oui je n’avais pas remarqué que c’était ça le fond du problème car ton père justement m’aidait avec les miens.

– Je t’en prie, ricana Clara en stoppant d’un geste l’intervention d’Anna. Tu as toujours été sans histoire et tu as toujours su te débrouiller seule. Le nombre de fois que tu as réglé nos problèmes à nous en si peu de temps !

– Je ne sais pas ce que tu imagines, la coupa Laurène agacée. Mais c’est faux. Si ton père me soutient, c’est que j’en ai besoin. Tu ne devrais pas émettre des doutes là dessus.

– Mon père a toujours aidé les Liés ! Toujours. Car les Liés ont des vies compliquées. Mais déjà ça devrait être plus simple pour toi puisqu’il y a ton frère. Puis tu l’as appelé pendant les vacances aussi ! T’es sérieuse ? Il n’a pas que cela à faire mon père. Tu n’as pas besoin de mon…

– Mais c’est parce que je suis l’élue !

Le silence qui s’ensuit n’aida absolument pas Laurène à gérer sa colère. Elle ne parvenait même plus regarder ses amies dans les yeux.

– Si ton père est présent pour moi, c’est parce qu’il sait que rien ne sera simple maintenant.

A retardement, Laurène paniqua : la voyante avait dit qu’elle devait éviter d’en parler à qui que ce soit. Et elle comme une idiote l’avait dit à la moindre dispute. Clara la regardait bouche grande ouverte pendant que Valentine et Anna qui s’étaient posées sur le canapé, reportèrent leur attention sur elle. Laurène réagit de la même manière que Clara pendant ces dernières semaines : elle prit la fuite.

L’adolescente se réfugia dans sa chambre. Marchant partout, le cœur s’accélérant elle commença à suffoquer. Elle tentait de respirer mais plus elle prenait une inspiration profonde, plus elle suffoquait et pleurait en même temps. Laurène se dit qu’elle allait mourir. Oui elle allait mourir. Elle ne parvenait pas à respirer.

« Laurène calme-toi avant de brûler toute ta chambre ! Cela ne sert à rien de faire une crise de panique. »

La voix d’Ignisaqua résonnait si fort dans sa tête que la crise se stoppa laissant place à la douleur que Laurène préféra à cette sensation de mort imminente. Quand la douleur se dissipa, elle passa de l’eau froide sur ses mains presque brûlantes. Elle aurait peut-être bien pu tout brûler si son dragon n’était pas intervenu.

« Tu étais tellement bouleversée que tu as failli activer le partage. Je l’ai senti au final. »

« De toute façon tu m’as dis que cela arrivera bientôt. Quelques jours ou semaine en avance… Qu’est-ce que ça change ? Ça sera là. »

« Ça changera qu’il y aura au moins un incendie ou une inondation voire les deux quasiment tout les jours. »

« Merveilleux… », commenta Laurène sarcastiquement.

« Je sais que le partage, encore plus avec ces deux éléments est contraignant, mais il te sauvera souvent la vie lorsque tu le dompteras. Mais ni pense pas. Il n’est pas encore là. Tu peux encore profiter de ne pas être un danger public. »

« Je le suis déjà. Un danger. »

On toqua à la porte. La jeune fille alla ouvrit pensant retrouver Valentine et Anna mais ce fut Clara. Malgré tout, elle la laissa entrer, en restant à bonne distance d’elle. Laurène était heureuse que Clara fasse un pas vers elle après son coup d’éclat. Elle ne le montra juste pas, puis elle ne voulait pas qu’une nouvelle dispute éclate.

– C’est vraiment toi ? chuchota la blonde.

– J’ai été voir la voyante et elle me l’a clairement fait comprendre, confirma Laurène en fuyant son regard.

– Oh non Laurène, soupira Claire en s’effondrant sur le lit. C’est de ma faute si c’est comme ça… si j’avais fait plus attention tu ne serais même pas dans ce monde là. Et ça aurait été mieux pour toi !

– C’est la vie c’est tout, corrigea Laurène en rejoignant son amie. Et c’est pourquoi ton père s’occupait autant de moi. Les adultes avaient des doutes et il voulait me protéger d’eux, et de ce qu’ils voulaient faire avec moi précisément. Il ne voulait pas que je sois utilisée. Il souhaitait que je puisse vivre normalement.

– C’était donc pour ça que tu es aussi précoce et qu’il ne semblait pas ravi! s’exclama Clara. Je suis bête, j’aurai dû m’en douter.

– Ce n’était pas évident non plus. Personne n’aurait misé sur moi pour… être une personne aussi importante. Lucas ou Joyce qui sont plus forts peut-être, mais pas moi.

– Cela te fait peur, releva Clara. Déjà tu n’es pas faible, puis tu sais, tu ne seras pas seule. Il y a toujours des personnes qui accompagnent les élus comme toi. Puis, on est là pour te soutenir avec les filles.

– Imagine je ne suis pas à la hauteur ? J’ai l’impression que tous les espoirs reposent sur moi et je voudrais être à la hauteur mais je sais que je ne le serai pas. Imagine je dois mourir pour que tout rentre en ordre ? Je ne veux pas mourir et…

– Tu ne vas pas mourir et tu seras à la hauteur car tu es entraînée en conséquence, assura fermement Clara en lui saisissant le visage pour qu’elle la regarde. Tu n’as même pas encore reçu ta prophétie donc ne fais pas des déductions hâtives. Moi je te le dis, tu vas vivre longtemps et tu pourras bâtir tout ce que tu veux, être avec qui tu veux et tu réussiras.

Laurène rigola en pleurant en même temps puis serra sans amie dans ses bras. Cette fois, c’était elle qui avait les larmes aux yeux, et Clara essuya les joues de son amie. Retrouver Clara lui faisait indéniablement du bien, elle lui avait manqué après tout.

– Je suis désolée, j’aurai du voir que ça t’impactait l’absence de ton père, fit Laurène.

– Et j’aurai dû comprendre que quelque chose n’allait pas et que tu cachais autre chose. J’aurai dû être présente pour toi, je m’excuse pour tout.

– L’essentiel, c’est que la prochaine fois, il faudra communiquer. C’est avec des non-dits que tout dérape.

– Exact… et ta cheville ? Comment t’es-tu fait ça d’ailleurs ?

– Madame Amaro… mais pas d’inquiétude, ça va. Aaron a déjà planifié toutes mes séances d’entraînements la semaine prochaine !

– Tu échappes aux duels de cette semaine mais tu seras obligée de faire ceux d’après !

– Je ne rentrerai pas dans l’arène si elle n’est pas vérifiée. Plus jamais je veux voir un caillou là-bas. Plus jamais.

– Je descendrais moi-même pour vérifier ! déclara Clara en riant. Comme ça tu n’auras plus à flipper.

– Plus sérieusement, Aaron pense que c’était prémédité. Que l’information sur moi aurait fuité.

– Mais… peu de personne le savent. Qui aurait pu faire ça ?

– Il tente de le découvrir, mais ton père a dit qu’il n’y avait pas à douter donc Aaron s’est embrouillé avec lui.

– Déjà vous vous entendez mieux vous deux, c’est positif.

– C’est une obligation, lui-même est le premier à le dire. Je passe la moitié de mes journées avec lui. Si je ne faisais pas d’efforts, ça serait impossible. Pour lui comme pour moi. Mais je ne sais pas… il me cache quelque chose.

– Ne le prends pas personnellement, conseilla Clara en se levant. Il s’agit d’Aaron. Il est un peu comme toi au final, assez solitaire, et même s’il connaît ton rôle, il n’a confiance qu’en très peu de gens, comme toi. C’est un peu votre talon d’Achille d’ailleurs. Mais je suis certaine qu’à un moment il s’ouvrira un peu.

– Ne me compare pas à lui j’entends déjà ça toute la journée dans la bouche des adultes ! Sois aussi forte qu’Aaron nanana, prends exemple sur la posture d’Aaron. D’accord il est doué mais ce n’est pas en me comparant en lui que je vais réussir.

– C’est vrai, admit Clara en la tirant par la main pour la levée. Et tu sais quoi ? Tu vaux bien mieux que lui !

– N’importe quoi…

– Hey oh ! Si je te le dis, c’est que c’est vrai. Allez viens ! Les duels vont commencer. Tu es peut-être spectatrice mais moi je dois me battre.

– Attends je vais prendre mes pompons pour t’encourager ! blagua Laurène.

– Tu me revaudras cela !

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