Chapitre 23 :

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Laurène, Lucas et Aaron s’étaient vivement disputés avant le retour de leurs deux camarades. Lucas ne supportait pas qu’ils puissent soupçonner Joyce de les trahir. Elle comptait trop pour lui pour entendre cela. Sa sœur dut lui expliquer doucement et calmement pour qu’il comprenne. Puis la jumelle n’estimait pas son amie comme espionne et le fit savoir à son frère. Ce dernier céda mais il restait agacé du manque de confiance d’Aaron. Jamais Joyce ne les trahirait, jamais elle ne le trahirait. Cela le rassurait que Laurène soit de son avis.

Lorsqu’ils rentrèrent des vacances, Lucas s’accommoda de sa tâche même s’il n’appréciait plus faire des cachotteries aux personnes auxquelles il tenait. Joyce en faisait partie. Mais au fil du temps cela lui parut plus simple et il s’occupa d’Henry puisque les deux autres passaient peu de temps avec eux. L’enquête de M. Gomez n’avançait pas plus mais tout le personnel commençait à être interrogé. Laurène croisait les doigts pour que le sbire soit rapidement trouvé.

En deux semaines, la maîtrise du partage de Laurène se renforçait davantage grâce à ses excursions secrètes. Elle combattait avec, lors des entraînements mais ne parvenait toujours pas à le battre. À défaut, elle réitérait l’exploit de ne pas perdre face à lui. Cela ne l’énervait pas spécialement de ne pas le vaincre, sachant qu’il était fort. Aaron aussi perfectionnait son partage, dans très peu de temps, il partirait. Cette idée ne plaisait pas à Laurène. Elle passait une grande partie de ses journées avec lui, sans lui elle se retrouvait seule.

L’anniversaire des jumeaux étaient passés durant ses deux semaines et ce fut étrange pour eux car cela faisait longtemps qu’ils n’avaient pas eu d’anniversaire en bonne entente. L’absence de leurs parents et les tensions avec eux les empêchèrent de profiter pleinement. La prophétie planait en permanence sur Laurène,ne lui permettant pas de se détendre et se réjouir. Quoiqu’elle pensa qu’elle pouvait se féliciter de vivre encore !

L’avant dernier samedi, Laurène se leva et réveilla Clara qui dormait comme un bébé. La Liée avait confié à sa meilleure amie ce qu’elle trafiquait les matins du week-end. Cette dernière avec insisté pour venir avec elle pour observer ses progrès. En voyant son visage étinceler d’effervescence, Laurène n’avait pu se résoudre à refuser. Ce fut donc pourquoi la Liée se retrouva à réveiller Clara qui s’accaparait une grande partie de son lit !

– Hum… comment peux-tu te réveiller aussi tôt ? Le week-end en plus, bougonna la Dresseuse.

– C’est toi qui a voulu me suivre. Je te rappelle que je suis dans l’extrême dans mes actions.

– C’est un fait.

Les deux jeune filles se préparèrent : Laurène termina de nouer sa natte qu’elle portait quasiment chaque jour en observant Clara pensive. Elle l’était souvent ces derniers temps. Cela l’inquiétait.

– Tout va bien ? dit-elle. Tu sais, on a dit qu’on communiquerait… si tu as besoin de parler…

– Je sais, soupira Clara. Mais ce n’est pas par rapport à toi.

– OK.

– Je crois, débuta Clara hésitante après un instant de blanc. Je crois que je suis un peu jalouse de Joyce.

– De Joyce ? Comment ça ? Pourquoi ? lâcha Laurène spontanément avant de comprendre. Oh, mon frère… tu lui en as parlé ?

– Bien sûr que non ! s’écria Clara outrée. Il est bien avec Joyce, il est heureux. Ça fait des années que je ne l’avais pas vu aussi épanoui. Alors même s’il ne ressent rien pour moi, ça le perturbera fatalement depuis le temps qu’on se connaît et cela impactera son couple. Je ne veux pas compliquer sa vie. On a tous besoin de stabilité actuellement.

– C’est pour ça qu’il te trouvait distante depuis le retour de Joyce et Henry. Il me demandait si je savais ce qui se passait.

– Ne lui dit pas ! S’il-te-plaît…

– Bien évidemment que je ne lui dirais rien. Ce n’est pas à moi de le dire à ta place. C’est ta décision. C’est juste que… je reste étonnée, je vous voyais toujours aussi amical entre vous.

Clara la remercia et elles sortirent du bâtiment. Elles retrouvèrent Ignisaqua et le dragon de la Dresseuse. Elles partirent pour une nouvelle destination. Le trajet ne dura pas longtemps, et l’hybride avait encore réussi à dénicher une île splendide. Les deux dragons se posèrent sur le rivage et les deux amies contemplèrent le lieu avant de se focaliser sur leur objectif. Les deux adolescentes commencèrent un duel que Laurène remporta sans problème même si Clara se débouillait bien. La jeune Gomez s’entêta en demandant à Laurène d’utiliser le partage, mais avec l’écart de niveau, elle ne put rien faire face à son amie qui dominait largement. Mais au moins s’entraîner avec Laurène lui permettrait de s’améliorer. Clara ne risquait pas de se battre avec un Lié, sauf si elle venait à se battre contre Joyce ce qui serait insensé. Subir le partage améliorait certainement ses compétences aux combats.

– Bon. Maintenant montre-moi ce que tu sais faire ! Papa me dit à chaque fois que M. Gneiss s’extasie devant ton évolution. Je veux voir ça de mes propres yeux !

– Je ne fais pas encore des trucs très impressionnant, prévint la Liée. Mais j’y travaille. Puis, au final c’est assez gratifiant de réussir à faire des choses que la majorité des gens ne savent ou peuvent pas faire. Pas pour se vanter spécialement, mais ça donne le sentiment de ne pas ressembler aux autres. Et c’est plutôt cool même s’il y a des côtés qu’on aimerait pas avoir.

– Du genre que tout le monde te regarde comme si tu étais la réponse ?

– Parce que je suis la réponse. Mais pas complète, c’est tout. Il y a d’autres personnes dans cette prophétie qui ont peut-être un rôle plus important que moi. Sauf que je déclenche tout, donc je suis mise en lumière.

– Si les adultes parlent autant de toi, c’est que tu vas accomplir de grande chose, affirma Clara.

– On me le répète. Ton père me l’a dit. Mais je me demande, pourquoi ? Pourquoi moi spécialement ? Et pas quelqu’un d’autre ?

– C’est la vie. C’est tout. Ne te tracasse pas. Tu n’arriveras pas à trouver des explications. Ça aurait pu être n’importe qui d’autre. Tu as juste pas eu de chance, mais on sera là pour t’épauler avec les autres.

Laurène remercia son amie avant de se concentrer pour lui montrer ce qu’elle savait faire. Les mises en situations qui déclenchaient directement son partage portaient d’ailleurs ses fruits : il n’y avait plus que de rares accidents au campus. Cette concentration qu’elle avait acquise lui permettait d’utiliser sans effort les rudiments du partage. Laurène reforma sa sphère mi-eau mi-feu liant les deux éléments : elle appréciait pas mal cette attaque. Clara qui pouvait l’admirer pleinement laissa échapper une exclamation. Ensuite, Laurène fit apparaître une boule de feu et une d’eau qu’elle fit grossir encore plus gros qu’une balle de basket, de foot et de rugby réunies. Par la suite, elle associa deux boules d’eau ensemble pour former une sphère d’eau énorme qu’elle dirigeait avec les deux mains. Elle fit le même exercice avec le feu. La Liée forma aussi un bouclier avec les deux éléments même si elle estima que le feu semblait plus protecteur. Pour une débutante : c’était vraiment pas mal ! Néanmoins Laurène était toujours frustrée de ne pas parvenir à solidifier l’eau. Mais elle termina son spectacle en entrelaçant ses doigts ensembles. Laurène ferma les yeux pour se concentrer et visualiser. Lorsqu’elle les ouvrit, une minuscule tornade d’eau se trouvait aux creux de ses mains. L’adolescente s’efforça de l’agrandir non sans difficulté et la tornade prit de la taille de plus en plus. Laurène se tourna vers la mer pour faire évanouir la tornade d’eau. Cependant, lorsqu’elle se posa à la surface, Laurène eut envie de la grossir encore plus. Elle poussa encore plus la tornade qui devint énorme mais étant dans l’eau, elle s’échappa au contrôle de Laurène et s’éloigna à l’horizon.

– Oh non, glapit Laurène. Catastrophe ! Je n’aurais pas dû me tester comme ça.

– Ben au moins, si on entend parler d’une tempête à la télé, on saura que son vrai nom est Laurène ! blagua Clara en rejoignant son amie. Mais woaw ! Vraiment, ce que tu viens de faire, c’est vraiment impressionnant ! Je ne comprends pas pourquoi Mme. Amaro ne se réjouit pas de tes progrès. Ils sont colossales !

– Mme. Amaro recherche la perfection car elle rage de ne pas l’être. Manque de bol personne l’est donc je ne le suis pas même si pour M. Gneiss je m’y approche.

– Il a raison, concéda Clara. Ce que tu réalises… imagine tu formes de la glace ou un arc de feu ou du feu solide aussi ! Même certains doyens ne réussissent pas.

– C’est exactement cet objectif que je vise, affirma Laurène. Plus je maîtriserai les attaques et les défenses, plus le panel sera varié et je pourrais surprendre plus facilement mes adversaires !

– Je suis désolée, répéta Clara en perdant soudainement son sourire. Je ne voulais pas que tu ailles te former au combat comme cela, aussi… tout le temps quoi…

– Se battre fait aussi partie du cursus des Dresseurs. Juste, je peux mieux frimer mais ça change peu de chose, Clara. Certes au début c’était compliqué mais je suis épanouie maintenant. Ma place sera toujours compliquée à assumer, sauf que j’ai du soutien. Donc je peux supporter un peu près la pression sur mes épaules si elle ne dure pas éternellement.

Avant que Clara n’ait pu répondre, elles entendirent des voix. Elles se retournèrent. Deux hommes sur leurs dragons respectifs les fixaient, dont un qui collait un talkie-walkie près de son oreille. Laurène se posa devant Clara.

– Reste derrière moi.

– Pour te faire tuer ? lança son amie. Hors de questions !

– Je ne te laisse pas le choix ! J’ai déjà combattu contre des hommes et un dragon. C’est moi qu’ils veulent. Donc laisse-moi te mettre hors de danger !

« S’il-te-plait, préviens Aquaventus ! »

Ignisaqua passa le message au dragon de Clara pour rester avec sa partenaire. Laurène crut apercevoir d’autres dragons ennemis au loin. Serrant les dents, elle forma un bouclier de feu qui emprisonna Clara. Elle monta sur Ignisaqua alors que les deux ennemis se rapprochaient. La jeune fille lança une boule de flamme sur un des deux hommes et sauta d’Ignisaqua pour atterrir sur le deuxième dragon. Elle planta un couteau dans le dos du Dresseur et le fit basculer tête la première dans le vide. Il mourut dès que sa tête toucha le sol, tuant automatiquement son partenaire avec lui. Dans la chute libre, Laurène s’écarta au maximum et Ignisaqua la récupéra.

– Ce n’est pas fini, loin de là ! rugit-il.

– À toi et moi, on peut les repousser et protéger Clara, déclara Laurène sans trop de confiance pour autant.

Si Aaron arrivait, elle aurait peut-être une chance de s’en sortir vivante. Ignisaqua réduisit les premiers arrivants en cendre. Laurène s’occupa d’éliminer les lances jetées en leur direction à coup de flammes. Elle entendait Clara lui hurler de la libérer mais la Liée ne voulait pas prendre de risques. Personne ne pourrait l’atteindre avec son bouclier. Une nouvelle salve d’ennemis arriva et d’autres apparaissaient au loin. Ignisaqua se chargea de les tuer et Laurène, qui tenait debout sur lui tenta d’entraîner une tornade d’eau pour ralentir ceux qui étaient en route. Cela sembla réussir. Alors qu’elle s’occupait d’une quatrième salve qui paraissait être la dernière, elle vit de l’eau s’élever et former une boule autour de la tête des ennemis pour les noyer. Ignisaqua se posa au sol et Laurène retira son bouclier autour de Clara pour la libérer. L’adolescente regarda tout autour d’elle pour comprendre ce qui c’était passé pendant qu’Aaron se posait au sol.

– Ça va toi ? demanda le jeune homme en s’approchant de Laurène, visiblement inquiet.

– Oui je vais bien. Ils n’ont pas réussi à me blesser, ils ne m’ont même pas toucher un cheveu, affirma Laurène. J’ai créé un bouclier pour protéger Clara et je me suis battue.

– Toute seule ? Mais c’était dangereux !

– Je suis vivante. Tout va bien.

– Pourquoi êtes-vous en dehors du campus ! hurla Mme. Amaro. Vous êtes sous notre responsabilité. S’il vous était arrivé quelque chose, nous serions en tort !

– Désolé, elle m’a choppé, s’excusa Aaron en grimaçant.

– Elle n’a pas tort, je suis censée restée au campus. Pas m’échapper… On était hors du campus pour s’entraîner ! Je m’exerçais au partage et au combat avec Clara. C’est entièrement de ma faute.

– Mais pourquoi ne t’entraînes-tu pas au campus ?

– Pour ne pas engendrer plus de catastrophes que d’habitude.

Mme. Amaro restait rouge de colère mais ne rajouta rien. Elle les guida lors du retour. La plupart des gens étaient déjà éveillés. Lorsqu’ils les virent débarquer, les premières rumeurs se répandirent telle une traînée de poudre. Mme. Amaro les entraîna dans le creux de la falaise réservé aux adultes. Ils ressemblaient fortement au bâtiment en modèle réduit. Aaron se chargea d’expliquer les événements. Les deux amies se firent passer un savon, néanmoins M. Gomez ne put s’empêcher de féliciter la Liée et de la remercier d’avoir protégé sa fille. Ce qui dépassa totalement Mme. Amaro qui jugeait qu’elles avaient été irresponsables. Pour une fois, l’avis de Laurène s’accordait avec l’adulte. Sa colère était totalement justifiée. Au moins, elles ne récoltèrent aucune punition.

Quand elles sortirent, on saisit le bras de Laurène pour la plaquer doucement contre la paroi. Elle leva les yeux vers Aaron et s’empourpra à cause de leur proximité.

– Désolée, marmonna-t-il en reculant pour lui laisser de l’espace. Je ne voulais pas te gêner.

– C’est pas grave, bégaya la jeune fille. Ça va ?

– Je pars en fin de semaine prochaine.

– Quoi ? Mais, non, non, non non ! Non…

– Ça va aller Laurène. Je reviendrais d’ici deux ou trois mois. Je ne pars pas pour toujours.

– Non… tu ne peux pas partir comme ça !

– Je te l’ai déjà promis, fit-il d’un ton doux. Je reviendrais et… pendant la semaine qui reste, je me disais qu’on pourrait s’entraîner au partage. Je pourrais te donner quelques astuces afin de mieux contrôler l’eau.

– Formidable…

Il sourit et s’en alla. Laurène laissa ressurgir sa panique. Sans lui, son entraînement ne faisait pas le poids !

Elle profita de cette dernière semaine pour améliorer son partage avec l’eau. Avec Aaron ils combinèrent aussi ensemble le feu et le vent ce qui rendait un résultat impressionnant, qui excitait tous les adultes.

Le samedi, la cérémonie en l’honneur d’Aaron eut lieu. Tout le monde dut revêtir ses uniformes. Le jeune homme portait désormais le troisième bracelets montrant qu’il était Lié accompli désormais, soit deux fois plus élevés que les autres qui étaient encore que des initiés. Aaron portait donc quatre bracelets au total et vêtait des habits bleus foncés. Tout le monde lui offrait des congratulations et faisait mine d’être triste de son départ. Laurène voyait en eux des hypocrites qui cherchaient juste à bien se faire voir par quelqu’un qui deviendrait très important dans la société. Aaron ne put leur faire des adieux et leur lança un regard. Un regard qui signifiait que tout irait bien. Pas très satisfaisant pour Laurène.

Lorsqu’il sortit et que les autres commencèrent à emboîter le pas quand il n’apparut plus, la jeune fille se leva et se posta en plein milieu du sanctuaire.

– Ne partez pas ! hurla-t-elle pour se faire écouter.

Les rumeurs subsistaient toujours depuis une semaine. Depuis son arrivée au final… Elles ne s’arrêtaient jamais. Laurène les connaissait toutes. Et qu’on parle dans son dos la fatiguait et l’agaçait. Cela épuisait son énergie inutilement. Elle lança un regard à son frère et ses amies pour s’encourager et elle déclara :

– Oui, je suis spéciale. Oui je ne suis pas comme les autres Liés. Oui, je suis précoce. Oui, il m’arrive des trucs de dingue. Non, je ne suis pas une aliène. Je ne suis pas mi-dragonne non plus. Mais c’est vrai, je suis l’élue. L’élue de la grande prophétie.

Et sur ses mots, elle s’enfuit. Heureusement, l’équipe qui partait, posait encore les scelles sur leurs dragons. Laurène ne perdit pas de temps à repérer Aaron.

– Tu pourrais dire au revoir tout de même ! C’est la moindre des politesses ! l’interpella-t-elle.

Il se retourna et rit en se rapprochant.

– Je pensais que tout était prêt, mais on part dans dix minutes finalement.

– Eh bien… je dois te souhaiter bon voyage alors. Mais j’attends ton retour de pieds fermes. Impossible que tu me rates à ton retour.

– Toi aussi tu vas me manquer, répliqua Aaron. Tu es bien la seule personne à me confronter. Ça fait du bien, plus que je ne le pensais.

– Tant mieux, car je ne lâche pas l’affaire quand j’ai raison.

– J’avais vu ça ! Mais fait attention, tient à l’œil Joyce et Henry.

– Je te le promets.

Aaron déposa un baiser sur la joue de Laurène avant de monter son dragon et de s’envoler pour le ministère. Laurène, elle, resta bloquée durant plusieurs minutes, surprise par son geste. Puis elle rejoignit les autres.

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