Chapitre 47 :

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Le type masqué adorait voir la réaction qu’il suscitait quand il arrivait face à quelqu’un qui ne s’apprêtait pas à voir un tel personnage. C’est-à-dire la majorité des personnes qui le voyait. Généralement, ils ne s’attendaient pas à le voir, une personne toute dissimulée, qui n’inspirait pas confiance. Il avait fait ses recherches. Évidemment, il connaissait le chef des ennemis, sauf qu’il avait dû se renseigner sur ses habitudes afin d’établir le meilleur moment pour frapper. Il était enfin prêt !

La nuit paraissait calme dans ce village. La lune recouverte par les nuages ne laissait aucun rayon passer. L’individu avançait donc à la lueur des rares lampadaires qui laissaient des espaces obscures sans fin. Il replaça bien son masque. D’une démarche féline il grimpa l’escalier jusqu’au dernier étage de l’immense maison. Lorsqu’il ouvrit la porte, le dirigeant des ennemis ne le remarqua même pas, plongé dans son travail. L’individu suspect aurait pu le tuer facilement, mais d’abord, il devait obtenir les informations dont ils avaient besoin. Quand l’homme releva la tête, il se mit à hurler et attrapa son téléphone. L’individu le fit voler et lui broya le poignet :

– Ne prévenez personne, affirma l’individu avec sa vraie voix. Ou je serai obligé de vous supprimer.

– Non, souffla-t-il. Ce n’est pas possible… j’avais pourtant ordonné de te tuer !

– Il a mal fait son boulot. Que voulez-vous que je vous dise d’autre ? Je ne suis pas si simple à duper.

– Nous t’avons offert une chance, commença le chef. De vivre bien, avec nous. Et au lieu de la saisir, tu l’as retourné contre nous… tu as toujours été difficile à cerner… mais à ce point là !

– Vous avez tué mes parents, et vouliez juste faire de moi un soldat. La seule chance que j’ai eu, c’est de m’en rendre compte. Tout ce que je dois, c’est à moi-même et personne d’autre ! Tout que vous avez pu faire dans ma vie, c’est me permettre de m’endurcir.

L’individu vint s’asseoir sur le bureau du dirigeant, le regardant de haut. Il laissa un rire perçant, emplir toute la salle.

– Ne soyez pas surpris ! Une telle réaction n’en vaut pas la peine. Je ne suis pas si facile à tuer, vous auriez dû le savoir. Il n’empêche qu’aujourd’hui, je ne viendrais pas vous faire un méa-culpa. Ce n’est pas ce que je veux.

– Et que voulez-vous ? Pourquoi pensez-vous que je peux vous aider ?

– Parce que c’est vous qui avez enfermé les enfants des trois grands.

– De quoi parlez-vous ? Je ne connais que la légende des trois grands.

Il mentait, et l’individu le voyait bien car il mentait très mal. Il sortit son couteau et le planta sur le bureau, entre les doigts de l’homme qui déglutit péniblement.

– Le voyant est très gentil et il savait pertinemment que vous saviez, parce qu’il doit tout vous dire. Donc, je vous le demande gentiment, très gentiment : où se trouve la fille du Père ?

Malheureusement, l’individu n’obtient aucune réponse. Ce qui l’agaça évidemment. Le dirigeant des ennemis tentait de trouver un échappatoire. Sauf que l’inconnu ne le laissa pas s’échapper et était bien plus fort bien plus entraîné qu’un homme qui passait sa journée assis sur une chaise. Il se retrouva vite attaché à son fauteuil, un couteau sous la gorge. Tout tremblant, il regarda l’individu avec pitié.

– Je ne vais pas répéter deux fois, mais où se trouve le puits qui enferme la fille du Père ? Je veux un emplacement !

– Même si vous connaissez l’emplacement, vous n’arriverez pas à l’ouvrir. C’est fichue je vous dis.

– Je vous ai demander un emplacement. Pas un avis auquel je pourrais aisément me passer. Vous n’allez pas m’intimider comme cela. J’ai plus de moyens que vous pouvez le penser.

Comme il ne répondait toujours pas, et que l’individu ne voulait pas perdre de temps, il commença juste à perdre patience. Il encocha un coup de poing qui fit saigner le nez du dirigeant des ennemis. Ce dernier dissimula sa douleur.

– Le puits se trouve en Allemagne. Mais je vous l’ai dit, vous n’arriverez pas à le libérer. Ce n’est pas possible.

– On verra ça. Et si vous vous mettez en travers de mon chemin, vous en subirez mes représailles. Et je n’aurai aucun scrupule. Compris ?

– Com…

– Monsieur ! Puis-je rentrer ?

Avant qu’il n’ait pu crier, l’individu lui cacha la bouche en lui lançant un regard noir pour lui signifier qu’il ne devait absolument pas parler. Il sécha le sang sur le nez de l’homme avant de se cacher, le couteau à la main, pour bien lui montrer que s’il tentait le moindre signalement, il serait bien vite puni. Ce fut donc après cette préparation que le dirigeant laissa entrer l’homme qui l’appelait. Il était petit, trapu, inoffensif. Il s’avança, tout sourire.

– Monsieur, nous avons réussi à capturer la fille et le voyant. Voulez-vous les voir tout de suite ?

– Parfait Fabrice. Je te remercie. Mais je pense que je vais bientôt aller me coucher. Je passerai les voir demain à la première heure. Ce traître de voyant ne doit pas rester en vie. Et la fille… on peut faire pression sur l’élue avec elle. Tu peux disposer.

– Merci Monsieur. Passez une bonne nuit, vous le méritez, vraiment.

Le dirigeant lança un regard mesquin, presque victorieux à l’individu masqué. Ce dernier ne réagit pas à la provocation et s’extirpa de sa cachette dès que l’homme partit. Toujours en jouant avec le couteau dans ses mains, il ne laissa pas le temps à l’homme de parler et le lui plaqua contre la gorge. Si près de l’homme, l’individu sentait le cœur de son interlocuteur battre à tout rompre. Un coup de pression calculé avec l’effet escompté : le dirigeant des ennemis prenait peur, vraiment peur.

– Même si vous trouvez le puits cela ne servira à rien ! Vous ne pourrez pas l’ouvrir.

– Cela, ce n’est pas à vous d’en décider. Je suis capable de faire des choses que bien des personnes ne soupçonnent pas. Et sur ce coup là, je saurai vous surprendre aussi, je vous le promets.

– Tu ne travailles plus pour moi pour le coup. Je te croyais solide mais ils t’ont retourné le cerveau finalement. C’est d’une déception affligeante. Réellement, je ne pensais pas que cela se finirait ainsi. Je suis triste de te réaliser plus si influençable.

– Je travaille pour moi. Le gouvernement m’a enterré, ce qui m’aide à agir seulement dans mon propre intérêt, en tout cas, celui que j’estime être le bon. J’ai souvent été tiraillé par les deux camps. Pas à cause des croyances, pas à cause de vous ou du Doyen qui je l’admets m’a tout appris. A cause de Luc, car il ne mérite pas tout ce que vous lui avez fait.

– Que veux-tu dire ?

– Je connais toute la vérité sur les origines de Luc, et je vous ai aidé à le garder sous votre emprise. Je n’en suis absolument pas fier. C’est sa présence qui me faisait hésiter à partir, d’où mon stratagème pour être dans les deux, sans me faire suspecter.

Le chef des ennemis en resta sans voix, choqué par tout cela. Choqué par l’intelligence et la manipulation de l’individu qui le ramena vite à la réalité en appuyant un peu plus son couteau contre la gorge de l’homme. L’individu mystérieux ne lui laissait plus le choix. Sous le coup de la panique totale, le dirigeant bégaya, n’arrivant pas à réfléchir, il ne pensa même pas une seconde à mentir. Non, il lâcha tout d’une traite :

– En ALLEMAGNE !

– Soit plus précis, idiot.

– Je… je…

– Tu le sais. Tu le sais où s’est exactement. Donc dit le moi avant que je me fâche énormément, sinon, tu risques aussi de le regretter.

– En Bavière ! Je ne sais pas où exactement mais s’est en Bavière, OK ? J’ai… j’ai deux petites filles. S’il-vous-plaît… laissez-moi, je vous en prie.

– Je vous l’ai dit. Je marquerais votre fin seulement si vous vous barrez en travers de mon chemin. Et je pense, que vous aurez l’intelligence de ne pas le faire. Sur ceux, passer une excellente nuit.

L’individu s’éloigna et partit. Il n’avait pas de temps à perdre. Si la fille et le voyant s’étaient fait kidnapper, il devait d’abord les trouver, puis les libérer. Ils devaient faire le reste du travail, ce n’était pas à lui de faire cela. Sauf que pour cela, les deux devaient être libres, et pour le moment, ils ne l’étaient pas. Cachant son inquiétude, il repartit comme il était revenu : en toute discrétion. Il repéra vite l’homme qui avait parlé au vieux dirigeant, il le suivit à la trace sans se faire remarquer. Ce dernier entra dans un endroit hautement sécurisé. Le mystérieux espion assomma le garde devant sans être aperçu et subtilisa le passe magnétique qui lui permit d’entrer sans difficulté. Après cela, il retrouva bien vite l’homme qui s’enfonçait dans le couloir descendant à la seule lumière des flambeaux ajustés à distance régulière sur un mur, mais opposé sur le mur d’en face. Le couloir était donc extrêmement bien éclairé. A un carrefour, l’homme tourna et ils arrivèrent devant une cellule bien éclairée avec deux matelas. Le ‘‘soldat’’ venait de le mener droit à ses compatriotes. L’espion n’avait plus qu’à faire le job.


Quelques minutes auparavant :

Joyce se souvenait d’avoir encore maudit les Dieux pour ne pas posséder le partage. Elle se sentait extrêmement faible même si elle savait qu’elle ne pouvait pas se comparer à Laurène ou Aaron, car c’était incomparable mais elle aurait voulu être aussi forte qu’eux. Certes, la jeune fille n’excellait pas au combat comme eux, mais elle n’avait rien d’une débutante. Sauf que face à autant de personne, ce n’était absolument pas suffisant et elle le savait. Et c’est ce qui s’était passé. Joyce ne se souvenait pas de grand-chose. Juste, de la douleur à sa tête, qui reprenait quand elle se réveilla. La Liée se leva avec difficulté, la main sur le côté droit, elle tenta de faire quelques pas mais fut obligée de compter sur le soutien de Daniel. Ce dernier n’avait pas été blessé, mais en voyant son état, Joyce constata bien qu’il avait passé un sale quart d’heure éveillé avec les ennemis.

– Rassis-toi, tu te sentiras mieux. Tu as pris un gros choc à la tête, déclara doucement le voyant.

– Ils vous ont fait mal ?

– Pas tant que cela. Ils ont besoin de moi vivant tu sais. Alors ils font leur possible pour me faire apprendre la leçon sans faire trop d’impact.

– Ah… pas sûr que ce soit mieux. J’espère au moins que ce fichu type chelou aura les réponses qu’il faut. Il peut continuer sans nous, il n’a pas l’air besoin de quelqu’un.

– Il n’est pas seul, affirma le voyant. Je l’ai vu. Et puis… l’avenir est déjà tracé, et dans n’importe quel des chemins, ce n’est pas lui qui effectue cette partie de la prophétie. Nous avons pris le chemin où c’est nous, tu dois t’y faire.

– Je n’ai pas été habituée comme Laurène et Aaron à ça… je comprends mieux pourquoi Laurène se sentait absolument dépassée par tout et ne comprenait pas. Nous encore, c’est clair, elle a l’époque, c’était flou…

Elle se tut en entendant des pas. C’est un homme, loin de l’aspect des soldats qui apparut. Et, avant même que l’ennemi prenne la parole, il fut violemment assommé par quelqu’un. L’individu drapé de noir apparut derrière lui, la clé de la cellule subtilisée au gardien. En trois tours, ils furent libres.

– Comment avez vous su ? s’étonna Joyce.

– Vous vous trouvez dans la ville la plus importante des ennemis. Il y a le dirigeant ici. C’est pour cela que je me trouvais ici, pour obtenir des informations. Sortons d’ici, et prenons cap en Allemagne. On a tout le secteurs de Bavière à inspecter. Nous ne pouvons pas perdre plus de temps.

– Désolé de vous contredire, s’excusa le voyant. Mais nous ne sommes pas en état pour le moment. Joyce a peut-être une commotion cérébrale, elle doit être examinée avant que cela s’empire hypothétiquement. Puis, nous devons trouver un bon plan de recherche avant de se laisser tête baissée comme cela. Avec tout mon respect pour le travail que vous avez accompli jusqu’à aujourd’hui, je vous assure que nous devons faire cela…

– Mais les autres attendent. Aaron doit avoir le temps de se former. Ses débuts ont toujours été compliqués, il lui faut le temps d’être à l’aise.

– Je ne sais pas comment vous pouvez juger cela, mais Aaron n’est plus à ses débuts, grommela Joyce. Il a dix-huit ans maintenant, il est fort désormais. Même si c’est compliqué, Laurène n’a pas eu des débuts difficiles, elle connaît l’inconnu. Elle saura l’aider.

L’espion ne sut que répondre, car Joyce avait raison. Il le savait très bien, on lui avait tout rapporté, il avait ses informateurs. Néanmoins, il aurait voulu que les trois élus puissent être très bien préparés. Il espérait donc pouvoir leur offrir la fille du Père le plus rapidement possible. La victoire en dépendait, mais Joyce avait réellement raison. Sans un mot, l’espion les fit sortir sans aucun problème. Les deux dragons les attendaient à la sortie de la ville. Le voyant aida Joyce encore faible à s’installer sur Aquadicum pendant que l’adulte guettait. Voyant des personnes arrivées, sûrement prévenues par le dirigeant, il leva les bras afin de former une barrière d’eau, replaçant son masque, un regard mesquin à l’homme.

– Je vous préviens une dernière fois, si vous vous mettez en travers de nos chemins, je finirais votre vie, comme il le faut.

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