Chapitre 64

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– Ça ne ressemble pas du tout au village des… autres, commenta Luc en cherchant ses mots.

– Les campus sont là pour accueillir les étudiants à former ainsi que les membres de l’armée qui font une halte. Sinon, les autres ont une maison comme des parfaits citoyens. Mais ne t’inquiète pas, les voisins sont très gentils, et même si tu n’as pas envie de leur parler, tant que tu restes poli, tout ira bien, assura son père.

– C’est juste que j’ai toujours eu l’habitude de vivre dans un endroit lié aux dragons, avec eux, où on peut les voir. Ils faisaient une partie intégrante du paysage. Donc cela me perturbe un peu.

– Ne t’inquiète pas je suis là, et je pense que les jumeaux sont déjà arrivés…

– Vous avez fait quoi à ma chambre ?! hurla Laurène en ouvrant la porte. Vous avez touché à mes affaires ! Et pourquoi mon journal intime a disparu ?

– Un journal intime ? se moqua Luc.

Laurène ne répondit pas à ce commentaire et les aida à décharger les valises. La Liée aurait bien voulu savoir comme c’était passé cette entrevue, cependant elle décida que ce n’était pas le moment pour.

Lucas dévala les escaliers, deux boules rouges de noël avec un sapin blanc dans les mains, déjà prêt à décorer le sapin qui trônait dans le salon. Christine lui demanda d’attendre, histoire que toute la famille décore ensemble. Il posa donc les décorations, non démotivé. Lucas avait toujours été sensible à l’ambiance de noël, beaucoup plus que sa jumelle, néanmoins cette dernière tentait de se laisser un peu influencer par cette bonne humeur, afin de profiter un peu. Mais la prophétie lui trottait malheureusement toujours dans la tête et son inquiétude pour Aaron, Valentine et Anna aussi.

Luc resta immobile dans l’entrée et son père le poussa gentiment dans le salon avec les autres. Cela le changeait quand même un peu de sa maison des ennemis, ce n’était pas pareil, il n’avait pas ce sentiment familier mais rien de désagréable. Il se sentait bien mais en même tant, c’était comme s’il y avait un malaise, trop de nouveauté d’un coup.

– Luc, ça va ? demanda Lucas.

– Ouais… ouais c’est juste que ça fait bizarre c’est tout. Je ne connais pas cette maison, mais sans que je le sache toute ma famille a vécu ici.

– T’inquiète pas, quand tu vas voir ta chambre, tu seras content !

– Tu es allé dans sa chambre ? demanda Laurène.

– Personne n’a interdit l’accès. Bon, Luc pourra le faire dès qu’il y sera rentré, mais je suis son petit-frère et tu es sa petite-sœur donc il est de notre rôle de ne pas obéir à ses indications.

Luc avança jusqu’à la cuisine et son père le guida jusqu’à sa chambre, la seule qui se situait au rez-de-chaussé, les autres se trouvant toutes à l’étage. Oon lui indiqua qu’ils avaient aménagé une nouvelle chambre, et que cette dernière paraissait neuve, jamais il n’aurait imaginé qu’elle avait été un bureau auparavant. Le lit simple paraissait confortable, les rideaux cachaient bien les rayons de soleils, tout était propre. Oui, Luc aimait beaucoup cette chambre.

– C’est chez toi maintenant, tu pourras venir quand tu veux, tu peux même rester si tu veux, proposa son père avec un petit sourire.

Luc ne savait que répondre. Il avait longtemps pensé à ses parents, à la colère qu’il ressentait qu’ils l’aient abandonné, à la colère qu’il pouvait leur transmettre. Jamais il n’aurait pensé que son histoire soit si tragique, et jamais il n’aurait imaginé que son père l’aurait autant accueillis les bras ouverts, prêt à le connaître, prêt à l’avoir dans sa vie. Il remarqua un poignard sur la table de chevet. Il n’en avait jamais vu de si jolie, c’était une arme de combat très élégante. Elle avait été astiquée récemment et la manche dorée brillait. La lame avait été affinée aussi pour être plus coupante. Luc découvrit des joyaux rouges de l’autre côté d’une manche.

– Je voulais te l’offrir pour noël mais je me suis dit que ce serait préférable de te l’offrir à l’écart des autres, commença doucement son père en fermant la porte. Je t’aurais bien offert mon poignard mais je l’ai donné à Laurène lorsque j’ai appris qu’elle était élue, et je ne le regrette pas. Cette lame, c’était celle de Clothilde, ta mère. Je me suis dit que c’était à toi de l’avoir.

– C’est gentil de penser à moi, lâcha Luc ému.

– Je ne suis pas le père de l’année et je n’en suis pas fier crois-moi. J’ai fait devenir mes enfants Liés, deux d’entre eux sont dans la grande prophétie. Je ne suis même pas allé te chercher…

– Tu sais bien qu’ils auraient très bien pu me tuer, le défendit le jeune Dresseur. Et même, tu aurais été vite fait prisonnier. Tu ne peux pas t’en vouloir pour ça, tu ne pouvais plus rien faire moi.

– C’est surtout que je ne voulais plus avoir affaire avec ce monde qui m’avait pris tout ce que j’aimais profondément. Cependant, je veux que tu saches que j’ai toujours pensé à toi. Tous les jours.

Luc posa précautionneusement le poignard de sa mère les larmes aux yeux. Il fit deux grandes enjambées et s’effondra dans les bras de son père en pleure. Toutes ses années avaient été tellement dures, et ils auraient pu avoir une vie tellement plus simple, avec un père, une mère vivante. Et des frères et sœurs peut-être, qui ne seraient sûrement pas Lucas et Laurène. Mais la vie en avait décidé autrement, et même si c’était triste, que Luc regrettait que ce soit ainsi, il ne pouvait nier sa joie pour cette famille recomposée.

– Ça va mon grand, chuchota son père en frottant énergiquement son dos. Tu es là maintenant, et ta mère aurait été très heureuse de voir qu’ils t’ont quand même fait grandir et donner une formation pour te défendre.

– J’aurais tellement voulu être avec vous, rumina Luc. Mes parents adoptifs, ils étaient sympas parfois. Cependant je voyais bien que j’étais différent et… si j’avais été ici…

– Hey, tu es ici maintenant, OK ? Tu es chez toi.

– Parle-moi de maman ? Quel genre de femme c’était ? questionna Luc en se détachant.

Nicolas leva les yeux, il n’avait pas l’habitude de se rappeler de Clothilde, notamment pour se protéger. Néanmoins il pouvait faire cet effort pour son fils, il se rappelait des bons moments avec elle, même si cela faisait ressortir un peu plus sa tristesse. Il ne s’était jamais vraiment remis de la mort de son grand amour. Il se posa sur le lit de son fils qui s’assit à côté. Luc scrutait le visage de son père, entre impatience mais inquiétude d’avoir commis une erreur. Nicolas se mordilla la lèvre.

– Oui vraiment quand j’y pense, je me rends compte que Clothilde avait énormément de point commun avec ce qu’est devenu Laurène, même si malheureusement ce qui fait bien la différence, c’est les traumatismes de Laurène.

– Laurène, c’est la personne la plus sympa que je connais.

– Clothilde était aimée de tout le monde, très populaire. Très talentueuse aussi pour une Liée. Elle a eu beaucoup de problème familiale et voulait toujours protéger Christine qui était plus jeune qu’elle. Elle aimait le défit, les combats, elle me battait de temps en temps d’ailleurs ! C’était une jeune fille intrépide et pleine de vie.

– Pas souvent ?

– Je crains que j’étais bien le meilleur de ma promotion. Je n’avais guère le choix de toute façon.

– Oui, Laurène m’a dit que tu ne t’entends pas très bien avec tes parents.

– Il n’appréciait pas Clothilde et Christine, confirma Nicolas. C’est peut-être aussi pour les défier que j’ai eu le courage de demander à ta mère qu’on sorte ensemble. Sinon elle l’aurait fait, Clothilde tentait toujours sa chance quand elle le pouvait.

– C’était quoi sa couleur préférée ?

– Le rouge, comme Laurène, même teinte, elles ont toutes les deux une petite préférence pour le rouge bordeaux. Ses ressemblances dans les goûts m’ont beaucoup troublé je dois bien te l’avouer. Mais c’est comme ça. Mais ta mère, c’était une femme bien et courageuse jusqu’au bout.

– Ça fait du bien de l’entendre, confia Luc.

– A moi aussi. Luc, je pense qu’il faudrait parler à ta sœur de cette réunion. Elle va y penser et tu vas y penser aussi, donc autant crever l’abcès, ne penses-tu pas ?

– J’ai l’impression d’avoir tout raté… je sais bien qu’il n’y a pas grand-chose à faire contre lui, mais je n’aurais pas imaginé qu’il puisse demander ça. Je… j’ai été pris au dépourvu.

– Personne ne te prendra pour coupable de cette situation, et si jamais certains font des reproches, je serai là pour les recadrer ! Bon, commença le père de famille d’une voix portante. Vous savez que vous n’avez plus l’âge de vous cachez derrière les portes et que vous êtres trop grands maintenant pour que vous espérez que je ne vous remarque pas ?!

– Comment t’as su ?

– Tu ne les as peut-être connu qu’à dix-sept ans mais ne t’inquiète pas que j’ai eu le temps de sentir leurs bêtises lorsqu’ils étaient plus jeunes.

– Quoi ? Mais on était très sage ! s’indigna Lucas en ouvrant la porte.

– Et c’est pour ça que tu coursais Laurène en la faisant pleurer, ou que tu t’es pris la baie vitrée parce que tu lui avais volé son doudou.

– Ah mais ça vient de là ton manque des neurones, tout s’explique ! rigola Laurène avec un sourire moqueur.

– Parle toujours mais tu étais bien contente lorsque j’ai pris avec moi Grixou sinon tu n’aurais pas dormir les premières nuits, contre-attaqua Lucas.

– J’en ai plus besoin !

– Parce qu’il y a Aaron.

– Oh, alors je pourrais dire de même de Clara, je suppose d’ailleurs qu’elle dort à la maison ce soir, n’est-ce pas ?

– Pas du tout ! mentit Lucas les joues rosies.

– Bon ça suffit les petits nains, faites-moi plutôt visiter l’étage puisque ça a l’air d’être votre territoire, intervint Luc en balançant Laurène tel un sac à patate dans son dos.

– Oh fait la tomber dans les escaliers ! s’exclama Lucas en les suivant.

– Lucas ! s’indigna Christine en arrivant.

– Je ne compte pas la tuer, désolé pour toi, lui répondit Luc en posant Laurène sur le palier.

– Je croyais qu’on était d’accord pour l’embêter ensemble !

Lucas et Laurène montrèrent leurs chambres à Luc ainsi que celle de leurs parents puis la salle de bain. Avant qu’il ne trouve plus le courage, Luc expliqua donc commet c’était déroulé sa rencontre avec son dragon. Il eut peur d’observer de la peur et du doute dans le regard de sa sœur, néanmoins cette dernière resta parfaitement impassible.

– Je vais y réfléchir, déclara-t-elle sur un ton posé. Il y a forcément une solution ! N’y pensons pas pour le moment, c’est bientôt Noël ! J’aurais juste aimé qu’Aaron soit là pour m’aider…

La jeune fille laissa sa phrase en suspens, puis les jumeaux entraînèrent leur grand-frère dans les décorations de Noël. Ça faisait plaisir aux deux parents de les voir si épanouis ensemble et si libérés, les trois savaient qu’ils devaient tenter de prendre les fêtes du bons côtés car elles pouvaient très bien être leurs dernières. Luc, qui était plus grand qu’eux s’occupait du haut du sapin alors que Lucas remplissait le reste, Laurène s’attardait à dérouler les guirlandes lumineuses toutes emmêlées. On sonna à la porte et Clara débarqua avec Sébastien. Si ce dernier les rejoint, Clara se posa au côté de sa meilleure amie pour lui prêter main forte.

– Hé ben, je n’ai jamais vu cette maison aussi joyeuse et animée depuis que les enfants ne sont plus en primaire, commenta M. Gomez en posant ses mains sur les épaules de ses deux amis.

– Tu m’étonnes, ces deux dernières années ont été compliquées, mais heureusement, ça va mieux. Je craignais de ne plus voir la famille réunie avec leurs dépars. Je n’imaginais pas qu’en renouant avec ce monde juste pour essayer de sauver Laurène, je récupérerais mon fils disparu depuis vingt-deux ans.

– C’est tout nouveau pour lui, mais il s’habitue vite. Puis, Laurène veille sur lui, le rassura Christine.

– Laurène veille sur beaucoup de gens, acquiesça Sébastien.

– Et on ne te remerciera jamais assez d’avoir veillé sur elle lorsqu’on a été trop borné pour reprendre contact. Sans toi, on en serait pas là tu sais. Tu les as beaucoup aidés, tu comptes beaucoup pour Laurène.

– J’ai toujours voulu prendre soin des enfants. Peut-être parce que je voyais que Cindy rendait malheureusement Clara et j’essayais de combler ce manque d’amour que ma fille ressentait. Ces actions m’ont sensibilisé aux autres enfants, il y a des histoires beaucoup plus choquantes que d’autres, mais quelques parts je me suis attaché à eux.

– Oh d’ailleurs ! s’exclama Laurène en voyant le père de Clara. Puisque Aaron n’est pas là, il voulait vous donner ce papier alors il me l’a confié. J’ai failli oublié.

Sébastien fronça les sourcils en prenant l’enveloppe. Aaron ne faisait pas spécialement de cadeaux à des gens avant d’avoir rencontré Laurène. Le Dresseur déchira soigneusement afin de ne pas abîmer le contenu. Ce n’était pas spécialement lourd, juste une feuille qu’il déplia, au début dans le mauvais sens puisque c’était la face vierge. Il retourna pour lire attentivement. Laurène avait rarement vu M. Gomez aussi touché, dans le bon sens puisqu’il souriait. La jeune fille savait très bien ce qu’il y avait dans cette lettre, elle avait voulu attendre pour que son copain le donne lui même, cependant elle s’était dit que cela pouvait être un bon cadeau en période de fête. Les autres s’étaient arrêtés.

– Clara, la famille va s’agrandir, déclara calmement M. Gomez mais ému en repliant le papier.

– Quoi ?! lâcha la jeune fille étonnée, passant ses yeux vers Christine avant de réaliser qu’elle était maintenant trop âgé pour être enceinte.

– Aaron a fait des démarches d’adoptions depuis longtemps déjà, mais il avait toujours eu peur de le donner à ton père. Sûrement parce que ta mère était impressionnante. Enfin bon, maintenant, il a osé, expliqua Laurène un petit sourire.

– Tu as osé, rectifia M. Gomez. Et je t’en remercie.

– Pas de quoi ! Du toute façon j’aurais fini par le pousser un peu à vous le donner. Vous êtes son père de cœur, même vous, il est comme un fils pour vous.

– Il est mon fils. Peut-être pas encor légalement, mais ça a toujours été dès la première fois où il s’est vraiment ouvert et m’a fait confiance.

– J’espère qu’ils reviendront et qu’on sera au complet pour Noël, souhaita Clara.

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