Chapitre 34 (2) - Ah, les femmes !

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- Paul, toi ici ? Je comprends pourquoi tu ne réponds pas au téléphone et que tu n’es jamais chez toi, déclama Marianne d’un ton agressif.

Paul resta coit.

- T’as perdu ta langue ? Tu ne nous présentes pas à ton copain ? rajouta-t-elle dans la foulée.

Paul n’eut pas le temps de répondre que Tom se leva et tendit la main en direction de Marianne qui se sentit obligée de la lui serrer. Tristan l’imita avec un grand sourire ainsi que Zofia.

- Bonjour, moi c’est Tom, enchanté de faire votre connaissance à tous les trois.

Paul se leva brutalement, tel un automate à qui l’on vient de redonner vie. Il fit les présentations.

- Marianne, Tristan je vous présente Tom, un copain de fac. Tom, mes amis de lycée avec qui je suis venu étudier cette année. Et voici Zofia que j’ai rencontré à la Saint Sylvestre.

- Oui à notre fête que tu as honteusement quittée sans préavis et sans nous dire au revoir je te rappelle” dit Marianne cinglante.

- Je t’en prie Marianne, tu ne vas pas recommencer, Paul s’est déjà excusé je te le rappelle” se permit Tristan de peur que la situation dégénère.

- Venez prendre un verre avec nous ! improvisa Tom qui rapprochait déjà une table voisine de la leur.

- Non, non, on ne veut surtout pas vous déranger, c’est très gentil à vous, on ne faisait que passer d’ailleurs. C’est Zofia qui a insisté pour qu’on revienne ici.

Zofia, les joues rougies, maintenait du bout des doigts sa longue tresse, ramassée sur le côté. Elle dit d’une voix fine hésitante.

- Barbara m’a dit que je pourrais vous trouver ici Paul. Elle aussi m’a beaucoup parlé de vous. Je suis si contente de vous revoir !

- C’est très gentil à elle, répondit Paul qui ne savait pas quoi rajouter de plus. Il se sentit mis à nu, tous les yeux rivés sur lui.

- Excuse ma curiosité Zofia, mais je viens de faire le rapprochement. Tu ne serais pas la soeur de Barbara par hasard ? interrompit Tom.

- Oui, c’est ça. Mais comment le savez-vous ?

- Tu peux nous tutoyer tu sais! Un de mes amis, Rickie, sa meilleure amie s’appelle Barbara, je la connais seulement de vue. A te regarder, c’était évident que vous étiez soeurs ! dit il avec sympathie.

- Rickie, mais on le connaît ! Il est venu accompagné de Barbara au restaurant avec nous juste avant les fêtes ! Le monde est si petit… répondit Zofia enchantée.

- Pas si petit que ça ! On ne sait même pas qui fréquente notre soit disant fidèle ami” ne put s’empêcher de rajouter Marianne, au bord de l’explosion.

- Viens Tristan, on s’en va. Je ne resterai pas une minute de plus dans cet endroit” dit-elle d’un ton catégorique.

- Marianne, on vient juste d’arriver…

Mais elle avait déjà tourné les talons en direction de la sortie. Tristan remonta la monture de ses lunettes, gêné.

- Je suis désolé Paul, je ne sais pas ce qui lui prend… toussa-t-il, embarrassé. Enfin si, je sais très bien.

Paul voulut se justifier mais Tristan le devança.

- Ne t’inquiète pas, je m’occupe d’elle. Si le monde ne tourne pas autour d’elle, tu sais comment elle est. Je vais essayer de la calmer… Mais cette fois-ci, ça va prendre du temps je pense.

- Merci Tristan, je ne sais pas quoi dire, je me sens si bête, j’ai honte, dit-il reconnaissant.

Tristan lui donna une tape amicale sur l’épaule et sourit à Tom.

- Mais non idiot, ne dis pas ça. T’es juste tombé amoureux c’est tout. Il ne faut surtout pas avoir honte. C’est plutôt cool, non ?

Paul rêvait-il ? Comment son ami avait-il compris ? Ça se voyait tant que ça qu’ils étaient ensemble ? Touché par ces paroles, Tom lui sourit aussitôt. Zofia, quant à elle, regardait Paul, le visage tout aussi blême. Elle les salua timidement et tourna les talons pour aller rejoindre Marianne qui l’attendait sûrement dehors.

- Ah les femmes ! Elles vont me faire tourner en bourrique.

- Je suis ravi d’avoir fait ta connaissance Tristan. J’espère te revoir ainsi que Marianne… Quand la tempête sera calmée, dit Tom chaleureusement.

- Moi aussi vraiment. Paul nous avait dit qu’il avait rencontré quelqu’un mais je ne pensais pas qu’il suivrait mon conseil à la lettre “Pour vivre heureux, vivons cachés” Je plaisante Paul…

Paul avait les yeux mouillés. Il n'en revenait pas. Tristan prit une chaise et vint s’asseoir à ses côtés.

- Tout va bien, ok ? Ça te fait beaucoup d’émotions à ce que je vois. Tu sais, à moi aussi. Sache que ça ne me pose aucun problème. T’as bien compris ? On en reparlera tous les deux plus tard si tu veux, dit-il sur un ton apaisant.

Paul se moucha et se ressaisit.

- Merci Tristan… Merci… Je ne sais pas comment te remercier. Tu viens de me rappeler que j’avais un véritable ami” réussit-il à dire confiant mais la tête un peu étourdie.

- Et je tiens à préciser que je compte bien le rester encore de longues années! T’as bien intégré ça aussi ? dit-il satisfait de voir son ami en partie rassuré.

Paul finit par esquisser un sourire. Tristan se leva.

- Je dois filer, à très bientôt.

Paul se leva à son tour et Tristan le prit aussitôt dans ses bras.

- Je me sauve sinon elles vont me tuer. Prends soin de toi et profite, lui chuchota-t-il dans l’oreille, avant de sortir du café.

Paul souffla un bon coup, les mains encore tremblantes, posées sur ses genoux. Il regarda Tom dans les yeux.

- Je suis ridicule hein ? Je me sens au-dessous de tout.

- Je sais ce que tu ressens, crois-moi. C’est pas facile, mais c’est inévitable. Tristan a l’air d’être quelqu’un de formidable. Tu as de la chance de l’avoir comme ami. Et réciproquement. Tout va bien se passer j’en suis sûr. Il faut juste que le temps fasse son œuvre.

- Pourquoi tout semble si facile avec toi ?

Au lieu de lui répondre, Tom l’embrassa. Paul répondit à son baiser mais il ne put s’empêcher de vérifier que personne ne les regardait pas. Il croisa le regard d’une cliente qui ne semblait pas du tout choquée de les voir ensemble.

- Houuu les amoureux, dit une voix en provenance du bar.

De dos, Tom brandit sa main, le majeur levé.

- Moi aussi je t’aime, lui cria Lucas.

Tom espérait que Paul avait définitivement retrouvé le sourire.

- Ça va mieux ? Un samedi soir au Petit Marcel, il faut que tu vois ça. Tu vas adorer. Dans pas longtemps, la musique va commencer. On va bien s’amuser, tu vas voir !

- C’est gentil Tom, mais je ne sais pas. Je crois que je vais rentrer.

A peine avait-il achevé sa phrase qu’une musique disco se fit entendre. Quelqu’un cria Hiiiipaaaaa !!! Et aussitôt, une dizaine de clients se dirigèrent sur un petit parquet en bois, situé au fond du café. Paul aperçut pour la première fois une piste de danse, encore cachée quelques minutes auparavant par un grand rideau de velours noir.

- L’autre particularité si appréciée du Petit Marcel, sourit Tom qui regardait des filles et des garçons bouger leurs corps au rythme de la musique.

Paul, immobile, les yeux dans le vide. Tom lui prit la main pour l’inviter à danser. Paul fit mine de résister avant de se laisser entraîner sur la piste. Face à face, ils se souriaient en suivant une chorégraphie qui consistait à faire des lettres avec leurs mains au-dessus de leur tête. Paul regarda la joie si spontanée de Tom qui dansait. Son visage s'éclairait à chacun de ses mouvements et quand il souriait, c'était un vrai sourire, comme s'il s'amusait du fond du cœur. Il ne put s’empêcher de repenser aux paroles que lui avait dites Rickie le 31 décembre. Qu’est-ce qui l’empêchait de profiter ? N’avait-il pas dit à Tom que son programme pour les prochaines années était d’être heureux ? Il se sentait tellement bien ici, malgré la peur qu’il ressentait au fond de lui. Les yeux fermés, il se laissa aller à tourner sur lui-même, sur un deuxième morceau encore plus entrainant que le premier.

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