Chapitre VII : Secret

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- Il faut qu’on se trouve un endroit où on pourrait rester longtemps. fit remarquer Shino.

- On pourrait retourner chez moi ! proposa Tïashu.

- C’est trop dangereux. Ils connaissent déjà ce lieu. répondit Karü.

Après une grande discussion mitigée, Nuo proposa de s’arrêter à la prochaine maison écartée de toutes autres habitations et d’y loger ne fus que quelques jours.

Shino avait décidé de ne plus mettre son bandeau sur son œil, et ce pour deux raisons : tout d’abord, ce n’était pas confortable, et ensuite, cela inquiétait Karü de ne pas voir l’entièreté du visage de son amant.

Un jour, alors que Nuo, Hângä et Tïashu étaient allées chercher de quoi se nourrir, Karü et Shino attendaient dans une clairière enneigée.

- Shino ?

- Oui ?

- Rien…

- Tu es sûr que ça va, Karü ? Tu n’as pas l’air bien…

- Ça t’embête si je te dis que j’ai peur ?

- C’est normal d’avoir peur. Moi aussi, j’ai peur…

- Je n’ai pas peur de ce qui m’attends, ça, je m’en fiche…j’ai peur pour toi. J’ai peur que quelqu’un te fasse du mal…que quelqu’un te blesse.

- Moi aussi, j’ai constamment peur que quelqu’un te fasse mal. J’ai peur que tu sois blessé ou pire, que tu meurs. J’ai peur de mourir, aussi. Mais j’ai aussi peur de continuer, peur de vivre, peur d’échouer…

- Je ne veux plus que tu sois loin de moi, Shino. Je ne veux plus avoir à m’imaginer ce qui t’arrive. Je ne veux plus avoir à te revoir détruit. Lorsqu’on vous a libéré…lorsque j’ai vu ta blessure, lorsque tu m’as parlé de cet endroit…j’ai imaginé le pire. Lorsque j’étais loin de toi, je n’arrivais à rien. Je m’énervais tout seul, tu me manquais trop…je pensais tout le temps à toi…pas une journée n’est passée sans que je pense à toi. J’ai même rêvé de toi…j’ai rêvé que…que tu te faisais tuer, que je te…que je te tuais…que…je…

Karü éclata en sanglot. Shino l’enlaça, la tête de son compagnon contre son torse. Karü sentait les battements rapides de son cœur, il pleurait, revoyant les images de ses crimes non commis. Le Saîovôuntï d’Ohfsha se redressa, essuya ses larmes, puis marmonna :

- Je suis lâche…

- Pas du tout. Tu es l’homme le plus courageux que je connaisse ! Tu es extraordinaire, tu es tout pour moi…tu es toute ma vie…tu n’es pas lâche. Sans toi, je ne serais pas moi, et je ne serais pas là.

- Je ne suis qu’un imbécile !

- Oui, mais tu es l’imbécile le plus gentil, le plus courageux, le plus brave que cette terre ait porté. Tu es l’imbécile qui compte le plus à mes yeux. J’aurais pu choisir parmi les autres idiots de ce monde, mais c’est toi que j’ai choisi. C’est toi, imbécile ou non, que j’aime. répliqua Shino en caressant avec douceur les cheveux de Karü.

Shino embrassa son amant, se leva en l’attirant vers lui, puis le plaqua contre un arbre et murmura :

- Je me fiche de ce que tu penses de toi tant que c’est en ta faveur. Là, tu dépasses les bornes, tu te dénigres alors que tu es extraordinaire et que tu ne t’en rends pas compte.

- Mais…

Shino l’embrassa à nouveau puis déposa ses lèvres sur le cou de Karü. Il l’enlaça ensuite puis lui murmura à l’oreille :

- Je t’aime.

Karü le regarda, posa sa main sur l’œil valide de Shino puis embrassa son front. Il s’assit ensuite sur le sol et Shino s’allongea, sa tête sur les genoux de son compagnon.

Peu après, Nuo, Hângä et Tïashu revinrent et la petite fille sauta dans les bras de Shino :

- On a trouvé une maison ! C’est un château !

- Un manoir, Tïashu, un manoir. répliqua Nuo.

- Un étage a été arraché, mais ça fera l’affaire… repris Hângä.

- Venez ! Suivez-moi ! s’exclama Tïashu.

Karü et Shino se levèrent et les suivirent, transits de froid ; ils arrivèrent devant un immense manoir sombre dans lequel ils pénétrèrent et se posèrent dans ce qui ressemblait à un salon dénudé de meuble.

- On va chercher de quoi se nourrir. fit Hângä en attrapant Nuo par le bras tandis que Tïashu, épuisée, s’endormait.

Karü se blottit contre son soupirant et ce dernier lui susurra un « je t’aime » ce à quoi le Saîovôuntï d’Ohfsha l’embrassa. Hângä et Nuo ne tardèrent pas à revenir, le sourire aux lèvres.

- Devine ce qu’on a trouvé ! s’exclama Hângä.

- De l’alcool ? soupira Karü.

- Mieux ! De l’alcool ! ricana Nuo.

- Pitié…pourquoi a-t-il fallut qu’il y ait encore une bouteille ?

- Pas une : vingt !

- A l’aide…

Shino se tenait près de Tïashu lorsque cette dernière, pas le moins du monde endormit, se leva :

- J’ai faim !

Karü suivit Hângä dans une autre pièce tandis que Nuo tendait à Tïashu un bout de pain rassit, sortit tout droit de sa poche. L’enfant la remercia et englouti d’un geste le quignon. La jeune femme reporta son attention sur Shino.

- Fais attention avec Karü…Hângä redoute quelque chose à son propos. Parfois, elle semble…avoir peur de lui.

- Tu ne connais pas Karü. répliqua froidement Shino. Tu ne sais pas qui il est ! Tu ne sais rien de lui, d’Hângä ou de moi ! Karü n’est nullement un danger pour nous !

- Karü, je suis d’accord, n’est pas un danger pour vous. Mais pour lui-même…et sa sœur a peur qu’il se détruise…

- Pourquoi Karü se détruirait-il ? Qu’est-ce que tu racontes ?! C’est absurde !

- S’il se détruisait, ce serait de ta faute…

- Pardon ?!

- Dans le passé, Karü était en couple avec la fille de son maître d’armes…

- Quoi ?

- Il…il ne te l’a pas dit ? Vous n’en avez jamais parlé ? Toi aussi, avant lui, tu as eu quelqu’un, non ? s’étonna Nuo.

- Non. Personne.

- Ah…ah bon…peut-être vaut-il mieux qu’il t’en parle lui-même, alors…Hângä pensait qu’il t’aurait déjà parlé de Blue…

- Elle se nommait Blue, mais bien sûr ! La bonne blague ! ricana Shino tandis que Tïashu sortait de la pièce.

- Je ne rigole pas, Shino. Je suis sérieuse. Blue a été la première moitié de Karü.

- Alors quoi ? Karü ne m’aime pas, c’est ça ?! Il me ment, c’est ça ?! Tu perds la tête, ma parole !

- Je n’ai jamais dit ça ! Mais il faut que tu me croies, il t’en parlera en temps voulut…d’ici là, fais comme si je ne t’en avais pas parlé. Ça l’a brisé, tu sais…ça l’a changé…

Nuo lâcha l’épaule de Shino qu’elle avait agrippée, puis Karü et sa sœur revinrent dans la pièce, suivit de Tïashu, une bouteille dans chaque main.

- Shino, tu veux boire ? demanda son soupirant avec espoir.

- Me parles pas, toi ! pesta Shino en le fusillant du regard.

- Qu’est-ce qui te prends ?! s’étonna Karü en l’agrippant.

- Lâche-moi ! répliqua Shino en se dégageant.

Suivit de Tïashu, Shino quitta la pièce. Hângä jeta un regard interrogateur à Karü qui haussa les épaules avant de poursuivre son amant. Sa sœur fusilla Nuo du regard et lui dit :

- Que lui as-tu raconté ?

- Blue.

- Merde…il ne savait pas ?

- Non…je ne lui ai rien dit sur ce qu’il s’est passé…

- Je pensais qu’ils en avaient parlé…

Shino s’arrêta dans une pièce sombre et sans fenêtres. Il se laissa tomber sur le sol, imité par Tïashu qui se blottit contre lui.

- Il a fait quoi papa Karü ?

- Je ne sais pas.

- Grand frère, c’est quoi l’amour ?

- Je ne sais pas, je ne sais plus…

- Ah bon.

Shino soupira. Karü entra dans la pièce en en enfonçant la porte avec violence :

- Shino ! s’exclama-t-il en l’agrippant par le bras.

Le Saîovôuntï de Caski le fusilla du regard et, d’un coup d’œil, il intima à Tïashu de sortir, ce qu’elle fit immédiatement.

- Shino, qu’est-ce que j’ai fait ? s’écria Karü, paniqué.

- Blue.

- Blue ? Qui t’a parlé de…

- Alors c’est vrai ?! pesta Shino. Pourquoi tu ne m’en as pas parlé ?!

- Qu’est-ce que ça change ?

- Si on est ensemble, on doit tout se dire !

- Moi, je ne t’ai jamais demandé de me raconter ta vie ! Blue…c’était…un épisode de ma vie que je veux oublier. Une erreur de parcours. Je ne pensais pas que cela t’embêterait…

- Que cela ne m’embêterait pas ?! Mais Hângä à peur que tu te détruises à nouveau, c’est Nuo qui me l’a dit ! Comment, après ça, tu voudrais que je m’en fiche ?! Comment ?!

- Que t’a-t-elle dit sur Blue ? demanda Karü, crispé.

- Que c’était la fille de ton maître d’armes. répliqua Shino avec amertume.

- Et ?

- C’est tout.

- J’aurais préféré aborder moi-même le sujet…ou ne jamais avoir à le faire…

Karü soupira, s’allongea sur le sol et murmura :

- Tu veux savoir ce qu’il s’est passé ?

- Oui.

- …c’est compliqué à raconter, ça fait remonter les mauvais souvenirs…

- Mais je veux partager tes peines, moi ! Je veux souffrir autant que toi…

- T’en con…

Shino s’allongea à ses côtés. Karü se blottit à lui et son soupirant murmura :

- Oui, je suis con…

Son amant lui caressa doucement le front, déposa ses lèvres dessus puis conta son histoire…

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