Chapitre 2 Le projet secret de Michel Dumoulin

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Joël en lisant le rapport, écrit sur son tableau près des photos.

— Commençons par le promoteur Daniel Belleville, puis le mari de Nadia Bolcho qui est brocanteur, n’est au courant de rien. Il a essayé d’avoir sa femme au téléphone vers minuit. L’ex- femme de Michel n’a pas de contact avec lui.

— Capitaine Bruni, cela ne veut pas dire qu’elle est hors de cause, ni pour Nicolas Bernadin

— Commandant, oui, voyons les pistes une par une.

— Oui, ce plan est peut-être par hasard.

Le capitaine Joël Bruni était recruté depuis peu dans le service. Enfant de la DASS, il avait été abandonné à sa naissance né sous X. Aucune trace d’information sur sa mère. Il était marié avec deux enfants. Le commandant Olivier Charreau originaire d’Auxerre se distinguait par ses favoris et sa moustache raffinée, qui lui donnait un air Belle-époque charmant et étonnant ainsi sa façon déroutante de saluer ses supérieurs : malgré une application stricte du protocole, il ne pouvait s'empêcher d'ajouter un clin d'œil à sa révérence. Si dans ses premières années, cette manie eut le don de créer beaucoup de confusion dans son relationnel, au fil du temps, cela devint la signature d'un respect profond et d'une loyauté sans faille

— Et du côté du voisinage ?

— Vers 22 heures 30, le van est parti avec Michel Dumoulin et une femme.

— Sans doute la même qui était présente sur les lieux. Il faut voir au niveau des relations de Michel Dumoulin et Nadia Bolcho.

— Il faudrait penser à interroger Anita Hérésie et l’amie de Marlène Hérésie.

Le lieutenant Franck Bidier célibataire revenait de quelques jours de vacances.

— Joël, je te laisse enquêter sur le promoteur et moi...

— Oui, on a compris.

***

Joël se rendit sur le lieu de travail de Daniel Belleville, le nom indiqué sur le plan. Un peu surpris par la démarche, il accepta de le renseigner au mieux par ses souvenirs.

Daniel Belleville natif de Luzarches était un ancien menuisier avant d’être promoteur. Divorcé, une de ses amies joua à la marieuse, lors d’un mardi-gras. Il se maria avec Cécile Levraut, une femme qui aimait le grand monde avec aisance. Il participait à des soirées mondaines, c’était à cette occasion qu’il croisât Michel.

Un mois avant la mort de Michel, Daniel sarclait la végétation envahissante avant de planter le pied d’un magnolia acheté chez le pépiniériste, sa femme était en consultation pour un problème d’orteil. Il restait la sciure d’un conifère dégarni tronçonné. Michel passa chez lui pour une demande d’étude et d’un devis. Il évitait d’une rencontre sur son lieu de travail pour une discrétion assurée. Daniel le fit entrer, Michel ôta son manteau. Daniel l’incita à s’asseoir. Daniel lui servit une cervoise.

— Tiens, Michel, en quel honneur viens-tu ici et non à mon bureau !

— Pour une question de confidentialité.

— Pourrais-tu développer ?

— J’ai une demande particulière, sans rentrer dans les grandes lignes, c’est une ambition personnelle qui me rapportera une reconnaissance éternelle pour une personne. Ses désagréments sont une sinécure. Actuellement, elle fait la sourdine, mais j’ai espoir de la voir se plier à mon exigence.

Michel reposa son verre sur le napperon après sa gorgée de bière.

— Tu as tissé des liens importants avec cette personne.

— Disons que c’est un service pour elle. Elle sera contrainte de ne pas décliner cette proposition.

— Pourquoi parles-tu sur un ton péremptoire ? Qui est cette personne ? De quoi s’agit-il ?

— N’as-tu pas regardé à la télévision dans le journal régionale, une certaine Marlène Hérésie qui a de gros problèmes d’argent à cause d’une association d’animaux. Elle risque de finir dans la misère. Elle ne veut pas se débarrasser de ses animaux ni vendre sa propriété qui appartient en partie à son ex-mari. Elle a réussi à tenir grâce à des cagnottes, mais il lui manque encore 35 000 euros.

Daniel fut dubitatif. Il se gratta le menton.

— C’est à l’encontre…

— De quoi ? J’achète son terrain et sa maison, il y a du potentiel.

— Tu fais pour elle ou pour toi ?

Michel prit mal la réflexion, porter sur les nerfs et provoqua un esclandre.

— Tu n’as rien compris ou tu en fais exprès !

Daniel se dispensa d’interpréter davantage mais perplexe.

— Il me faudrait un plan cadastral pour les mesures.

— J’ai les papiers.

— Je travaillerai dessus et te transmettrai en main propre.

L’horloge retentit, il était cinq heures. Le jour s’abaissait lentement.

— Le suffrage pour les maires serait mon programme, mon chemin de bataille.

— Plusieurs sont sur les rangs.

Michel a le sourire ironique.

— Ne t‘inquiète pas pour ça. J’ai du lourd dans la balance pour la ville.

Michel resta énigmatique sans aucune précision. Daniel ne pensait pas pour autant à une personne louche en face de lui à moins qu’il y ait anguille sous roche. Ce n’est pas à un vieux singe comme lui qu’on apprend à faire des grimaces.

— Pourquoi te donner tant de mal pour elle ?

— Ne dis pas n’importe quoi ! Elle est ma pièce maîtresse pour ma notoriété. Si je suis son sauveur, je conquérais Luzarches.

— Tu te prends pour César !

Daniel pouffait de rire. Il le convia au repas du soir lorsque sa femme rentra pour manger un plat de paëlla.

***

—Quand avez-vous fourni ce plan ?

— J’étais passé à la mairie, j’avais reçu un SMS de Michel, on devait se voir à l’arrière-cour. J’étais pressé, j’ai demandé à la secrétaire où était Michel. Nadia Bolcho m’a entendu et elle m’a déclaré d’être une amie. Elle devait passer chez lui, elle lui transmettrait l’enveloppe. J’étais embêté, je lui ai refilé. C’était le vendredi 2 novembre, il était 17 heures.

— Quelle précision ! Et ensuite ?

— Je suis parti !

— Et Michel a-t-il été au courant ?

Daniel haussa les épaules.

— Bien sûr. La secrétaire s’en chargeait.

— Je n’ai pas d’autres questions pour le moment. Je ne vous retiens pas.

Joël continua sur sa lancée pour vois la secrétaire. Malgré son effacement, Maryline aurait pu ouïr ou capter des tensions à la mairie. Fidèle à son poste, adjointe administrative dans la section état civil, Maryline était coquette et se mettait à son avantage. Joël reproduisait la même entrée en matière pour aborder les gens. Sur le coup, Maryline était impressionnée et curieuse de cette visite sans intérêt pour elle. Nadia était passée comme Nicolas narra quelques heures plus tôt. Elle perçut en effet une friction entre Nadia et le maire à cause d’une histoire d’une lettre.

***

Il était presque 17 heures. Maryline avait vu sur le parking, un homme trépignait à faire les cent pas.

— Tu es bien guillerette Nadia. Le père Noël n’est pas encore là.

C’était surréaliste, Nadia préservait sa virginité jusqu’à sa rencontre avec Nicolas. Puis d’un seul abracadabra, elle se donnait à Richard. Ce n’était pas une histoire de fesse pour autant, elle sous-estimait Richard de l’amener jusqu’à l’autel. Lascif, il papillonnait de filles en filles. Même s’ils avaient une histoire, elle ne durera pas. C’était peut-être qu’une passade. Il avait peut-être pris en maturité. Elle le vénérait dans ses souvenirs.

— Disons, tout va pour le mieux dans ma vie !

Elle ne prétendait pas à des futures complications. Elle rougit comme une pivoine. Se voyait-il tant que ça ? Elle n’avait pas besoin de sérénade avec une guitare de la part de Richard. Il l’avait conquise depuis trente-cinq ans. Même si elle était avec Nicolas, ses sentiments restaient les mêmes.

— L’homme dehors, il attend quelqu’un.

Il fit les cent pas avant de se décider. Nadia vit qu’il se déplaça jusqu’à la mairie.

— Bonjour mesdames, j’ai ceci à transmettre à Michel Dumoulin.

— Je vais justement chez lui, ce sera l’occasion.

— Ce serait bien aimable de votre part, je vais lui dire.

— Non, ce n’est pas la peine, on s’en chargera.

— Je suis tout de même ennuyé, mais j’ai un impératif.

— Michel et moi, il n’y a pas d’inimité entre nous.

Il portait un costard, elle se demandait si ce n’était pas un notaire. Il confia le pli à Nadia non cacheté. Dès son départ, elle l’amena à son bureau. Pas de cachet notarial, mais le nom d’un promoteur. La tentation fut grande mais imparable. Des dessins en trois dimensions à l’adresse de Marlène. Elle se sentit électrique et agacée. Une photo aérienne, tout fut réaliste.

— Michel est un conspirateur de mèche avec le maire !

Dans le passé, le maire commit une irrégularité dans la comptabilité. Un jour, Nadia consola une femme harcelée sexuellement par le maire, il la payait en liquide, elle devait se taire, car il menaçait sa famille. Nadia arriva en furie à son bureau.

— Vous manigancez avec Michel Dumoulin contre Marlène Hérésie. Vous n’étiez pas susceptible d’apporter une pierre à son édifice avec une subvention au lieu d’une pierre pour la couler ?

Nadia lui lança les feuilles. Victor Rousselet n’était pas au courant, le ton utilisé par Nadia, ne lui plaisait guère. Il fronça les sourcils.

— C’est quoi ces accusations gratuites ? Michel m’a dit que vous, compris dedans ne vouliez pas justement qu’elle soit bénéficiaire dans l’immédiat.

— C’est faux ! Je ne suis pas dans le lot.

Victor consulta par lui-même toute la documentation. Ce n’était pas à son goût une telle découverte et même contrariante.

— Surtout que vous n’êtes pas la pureté de la neige monsieur le maire. Vous avez contourné la loi. Tout le monde est au courant, mais préfère baisser les yeux devant vous.

— Madame Bolcho, je vous déconseille de vous engager sur ce terrain, vous risquez beaucoup pour vous et votre famille. En un rien de temps, votre vie basculera dans le vide.

Nadia ne trouva pas à répliquer. Elle réclama son bien, Victor lui jeta les feuilles. Elle se baissa pour les reprendre. Elle claqua la porte en partant. Elle glana auprès de ses collègues pour une cigarette. Elle s’était désaccoutumée depuis plusieurs années. Elle frissonnait. Marilyne n’avait pas perdu une miette de la conversation. Ce n’était pas difficile non plus avec les éclats de voix. Elle était dans un état de nervosité contre Michel et le maire.

— Ben dis donc, ça a chauffé entre vous !

— Avec Michel, il va m’entendre. Je me défoulerai bien à la patinoire.

— Tu devrais !

— Je n’ai pas trop le temps. Marlène m’a demandé de passer chez lui, elle sera là.

Nadia écrasa sa cigarette dans le cendrier extérieur.

— C’est bien indiqué non-fumeur à l’intérieur. Dommage, sinon, il aurait reçu la fumée en plein nez.

Marilyne rit.

— Du coup, je n’ai plus envie de préparer le conseil municipal.

***

—Quelle heure était-il lorsqu’elle est partie ?

—17 heures 30. Je partais une demi-heure après.

Marilyne s’effondra en pleurs.

. —Rien qu’à…

— C’est compréhensible, c’est déjà courageux de votre part. Le maire est -il là ?

— Non, il sera là demain. Nadia devait avoir un autre homme dans sa vie depuis peu. C’était une fille sérieuse.

— Et où était-elle partie ensuite ?

— Ben ça… mystère.

— Je vous remercie.

Joël reçut un appel du commandant Charreau. Ils devaient établir un premier bilan.

***

Un tableau avec les photos des victimes, scène de crime et les éventuels suspects avec des points d’interrogations. Nadia, Richard, Michel et Marlène.

Franck débuta en premier.

— Michel Dumoulin a un frère avec un antécédent carcéral. Richard, il avait monté une production de cannabis et il revendait. Depuis sa sortie de prison, il s’est rangé et il a été employé par Bruno Hérésie.

Joël réagit au nom.

— Bruno Hérésie ? Il ne serait pas un membre de la famille de Marlène Hérésie, par hasard ?

— Si c’est son ex-mari qui est garagiste. Richard est mécanicien.

— Ah tiens, Nadia Bolcho avait une relation extra-conjugale avec un certain R, peut-être ce Richard ?

— Qui sait… Donc, Bruno Hérésie était le trésorier de l’association jusqu’au divorce. Elle ne touche qu’une pension d’invalidité. Elle a eu des articles de journaux. Elle a l’huissier de justice sur le dos. Elle a encore 35 000 euros à cause de soins vétérinaires. Cela doit être un argument parmi d’autres pour leurs séparations.

— Une addition lourde. Michel Dumoulin et Nadia Bolcho devaient appuyer pour la subvention auprès du maire. Or, Michel Dumoulin avait une autre idée en tête avec la maison de Marlène Hérésie avec la construction d’un immeuble. Peut-être avec le maire. Apparemment, le maire est loin d’être pur comme la neige. Il exerçait un chantage, harcèlement sexuelle et un blanchissement d’argent avec les emplois saisonniers.

Olivier Charreau prit enfin la parole.

— Quel est le nom de ce maire ?

— Victor Rousselet.

— Méfiez-vous, c’est un requin aux dents longues avec des relations au ministériel. Il faudra des preuves irréfutables au cas où il serait impliqué. Mais je me chargeai si besoin. Il faut d’abord creuser la piste de Richard Dumoulin, Marlène Hérésie. Elle devait être chez Michel Dumoulin ainsi que Nadia Bolcho.

Un coup de fil interrompit la séance. Les résultats des empreintes d’ADN.

L’ADN matcherait avec l’un d’eux avec un ADN féminin. Il ne s’agissait pas de celui de Nadia Bolcho mais peut-être celui de Marlène Hérésie. Olivier Charreau planta ses yeux dans ceux de Joël.

Inattendu.

— Capitaine Bruni, vous avez un membre de votre famille qui coïnciderait avec votre ADN, sur la scène de crime, une femme.

— Il faudrait voir si Marlène Hérésie était sur les deux scènes de crimes, avec le téléphone portable.

— Oui, c’est déjà fait. Son téléphone a borné au niveau de la forêt et chez Michel Dumoulin.

Joël a un regard interrogateur et des yeux ronds. Quel était ce lien parenté ? Issu de la DASS, il devait obtenir le nom de sa mère. Depuis des années, il aurait pu les démarcher, mais un peu couard, à chaque fois, il détalait. Si cet ADN se rapprochait de lui, ce serait facile de relier au nom sur sa mère.

Franck s’allia à Joël et affermit la preuve Marlène Hérésie était sur les lieux du drame.

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