Chapitre 19 : La seringue

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-Tu restes là, lui ordonna Braken comme s’il avait compris ce qu’elle avait en tête.

-Et tu veux que je fasse quoi ? Rétorqua Loënia. Je te rappelle qu’on est des fées et que nous sommes censés être honnêtes ! On ne peut pas laisser cette meurtrière dans la nature et encore moins dans la maison où mes sœurs vivent !

-Oui, et on ne doit tuer personne aussi, pourtant j’apprends à me battre et à assassiner des vampires, des loups et même des sorciers, alors tu vas me faire le plaisir de te calmer sur le champ où je t’en donne une, Loënia !

-Tu n’oserais pas.

Rashnoé prit la main de Loënia et l'éloigna de force du jeune prince. Elle n’eut pas d’autres choix que de le suivre dans la boutique, sous les bouquets d’herbes séchées.

-Tu agis sur le coup de l’émotion, Loëne. Ce qui est normal. Seulement, tu ne peux pas aller voir Ambatine comme ça. Elle se doute sûrement déjà que tu es proche de retrouver tes souvenirs et sachant ce qu’elle t’a déjà fait, il serait mieux que tu évites de la défier.

-Je peux me défendre face à elle, répliqua la fée.

Ils se regardèrent tous les deux. Le sorcier avait un doux regard vert tandis que les yeux de la fée semblaient, pour une fois, prêts à foudroyer quiconque se dresserait devant elle. Rashnoé savait que Loënia était douée en magie. Elle savait même se battre avec ses pouvoirs. Ils s’étaient déjà entraînés tous les deux pour plaisanter, lorsqu’ils étaient de jeunes adolescents. Rashnoé s’était alors rendu compte que Loënia avait toujours pris le combat comme un jeu et à l’inverse, Loënia avait été stupéfiée en s'apercevant que son meilleur ami savait se battre.

-Merci de m’avoir aidé à récupérer mes souvenirs.

-J’avoue, Rashnoé baissa un instant les yeux, que mon acte n’était pas entièrement altruiste. Je voulais aussi te retrouver.

Loënia reprit d'un ton plus calme :

-J’aurais fait la même chose, alors… merci de m’avoir retrouvé.

La porte s’ouvrit et, sans surprise, Adrien parut. Il avait l’air grave et soucieux. Sa peau semblait encore plus blanche que d’habitude, ce qui avait pour effet d’assombrir ses yeux d'un brun déjà foncé. Il avança vers Rashnoé et Loënia qui se tenaient proches dans un coin de la boutique.

Il se tourna vers son arrière-arrière-petite-fille et bloqua ses yeux dans les siens. Il avait glissé l’une de ses mains dans la poche de son costume tandis que l’autre main battait l’air de la boutique en accompagnant chacune de ses paroles.

-Comment te sens-tu ?

Loënia avait la ferme impression qu’il ignorait Rashnoé.

-Je vais bien.

-Elle est épuisée, corrigea le sorcier.

Loënia leva les yeux au ciel et voulut démentir les propos de son ami. Elle en fut empêchée par Rubis, Matze et Braken qui sortirent silencieusement de la réserve. Braken était en tête, avec sa cape sur les épaules et son épée qui pendait de son jean. Il avait bel et bien l’air d’être un roi ou, au moins, un prince. Loënia se dit alors qu’avoir réuni le prince des fées et le meneur d’un clan de vampires qui assassinaient des individus dans la région n’était pas très judicieux.

-Qui êtes-vous ? demanda Braken.

Une fois de plus, Loënia aurait aimé tirer son cousin par la cape et le jeter hors du magasin.

-Adrien de Val, le meneur du clan des vampires du Finistère et l’arrière-arrière-grand-père de Loënia ici présente. Je viens la chercher.

Braken accorda un regard courroucé à sa cousine. Ils se comprirent du regard. Il refoula son côté belliqueux dans un coin et laissa Loënia rejoindre le vampire. Elle lui en était reconnaissante. Ils auraient à discuter plus tard.

Loënia savait qu’elle n’aurait pas pu partir pour rejoindre Ambatine à cause de ses amis. Elle comptait sur la colère d’Adrien à l’encontre de sa mère adoptive pour la rejoindre. Que ferait-elle alors ? Loënia ne connaissait qu’un sort, dont elle ne s’était jamais servie, pour faire du mal à quelqu’un. Après tout, elle était une fée et les enchantements qui pouvaient faire souffrir quelqu’un se comptaient sur les doigts de la main.

Loënia, après un sourire de façade à ses amis, sortit du magasin avec Adrien. Le ciel était bleu et la jeune femme eut l’impression qu’il se moquait d’eux, avec sa joie et ses nuages frêles. Adrien et elle marchaient côte à côte sur le trottoir.

-Je les ai vus se faire tuer.

-Je le sais, répondit froidement Adrien sans lui accorder un regard.

-On ne peut pas laisser ma.. Ambatine errer comme ça. Elle pourrait…

-On le peut, la coupa-t-il. Je t’amène chez moi et tu y passeras la nuit.

-Je…

-Je ne prends pas en compte les débats.

Loënia, plus qu’énervée, essaya de dire quelque chose. Mais, devant Adrien qui l’arrêta une nouvelle fois, elle fit volte-face, prête à partir dans l’autre sens. Elle n’avait pas reposé son pied sur le bitume qu’Adrien tenait fermement son bras dans sa main.

-Ne me force pas à te porter jusqu’à la voiture comme une enfant.

-Lâche-moi immédiatement.

Leur bataille de regards ne dura pas bien longtemps, heureusement pour Loënia qui commençait à avoir très sérieusement mal au bras. Adrien se résolut à lâcher la fée qui accéléra le pas.

-La voiture est juste là, fit-il, las.

Loënia avait dépassé l’automobile de plusieurs mètres. Elle revint sur ses pas et rentra dans la voiture, l’air furibond. Adrien pénétra à son tour dans l’habitacle avec des gestes plus posés.

-Je veux protéger mes sœurs, articula Loënia au bout de trois minutes silencieuses en voiture. Elles ne savent pas ce que notre mère nous a fait.

Adrien prit un virage serré. Il allait vite, comme d’habitude, ce qui n’échappa pas à Loënia. Elle tenait ses mains sous ses cuisses pour s’empêcher de s’accrocher à la poignée et montrer sa crainte par la même occasion.

-Tu étais une fée, avant d’être un vampire ? l’interrogea Loënia.

-C’est exact, fit Adrien en tirant sur la manche de son costume pour la remettre droite. Un vampire m’a transformé pour s’amuser. J’étais jeune, 28 ans, mais j’avais déjà un fils qui a lui-même eu des enfants. Au début, ça a été très dur pour ma famille. C’était moi qui était considéré comme fautif. Ma propre femme pensait que j’avais demandé à être transformé en vampire.

-Pourquoi pensait-elle cela ? le questionna Loënia.

Ils arrivèrent à la demeure. Le crissement des pneus sur les graviers apaisait toujours Loënia. La fée vêtue d’une robe sortit rapidement de la voiture. Elle fut contente de sentir le sol et ses cailloux, peut-être pour se dire que tout ce qui se passait était réel. Loënia avait le pas traînant.

-J’aimais bien passer mes après-midi avec les sorciers ou les loups. C’était encore plus mal perçu que maintenant, lui dit Adrien avec un clin d'œil. Je suppose que ton tatouage a changé de couleur ?

De nouveau, lorsqu’ils pénétrèrent dans le salon, de nombreux visages se tournèrent vers eux. La fée fut ravie de constater qu’il y en avait moins et surtout, Thaïs, le vampire qui avait cuisiné pour elle et avec qui elle avait pu discuter, lui souriait.

Elle suivait une nouvelle fois Adrien mais cette fois-ci, elle savait un peu mieux où elle allait.

-Où allons-nous ?

A peine eut-elle dit cela qu’ils entrèrent dans la chambre où elle avait déjà dormi. Loënia admira une nouvelle fois le tableau de la dame à la robe bleue, qu’elle appréciait de plus en plus, à l’opposé des vieux meubles bretons en bois.

-Veux-tu bien fermer la porte ?

-Bien sûr, s’enquit la jeune femme.

Elle venait de relâcher la poignée quand elle sentit comme une piqûre dans son cou. Quand elle se retourna, la main sur sa gorge, elle vit Adrien tenant une seringue dans la main.

-Qu’est-ce qu’il y avait dedans ? s’écria-t-elle.

-Je ne peux pas te laisser affronter Ambatine Oppralin seule. Tu te ferais tuer par elle alors je couvre tes arrières, exposa calmement le vampire.

-Tu choisis à ma place ! C’est complètement injuste ! Qu’y avait-il dans la seringue, Adrien ?

Loënia avait levé sa main pour empêcher le vampire de venir vers elle.

-Tu devrais t’allonger, dit-il en s’approchant de Loënia alors qu’elle cherchait à reculer contre la porte. Je n’ai pas eu le choix, tu étais trop décidée. Tu y serais allée derrière mon dos.

-Evidemment, grogna-t-elle. C’est la femme qui m’a élevé...

Sa vision commençait à faiblir. Elle ne voyait plus qu’Adrien en face d’elle et une tache bleue claire au fond de la pièce. Ses mouvements devenaient difficiles mais, surtout, les battements de son cœur ralentissaient perceptiblement. Elle se sentait faiblir et n’arrivait pas à lutter contre la drogue.

Adrien s’approcha tout de même d’elle et la prit dans ses bras. Loënia sentit sa tête chanceler, elle vit le plafond. Tout son corps se détendait de plus en plus jusqu’à ce qu’elle ne se sente plus du tout. Adrien l’allongea sur le lit, retira ses chaussures et la couvrit de la couverture. Il veilla sur elle pendant quelques minutes avant de sortir. Elle avait le même nez que son arrière-petit-fils.

Il demanda alors à deux de ses hommes de confiance de monter la garde à la porte de la chambre. Il ne serait pas longtemps absent.

Hey ! (Je publie tard ._. )

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