Chapitre 44 : SMS

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– Loënia, je te présente Feilli. Elle fait partie de mon clan.

La vampiresse sourit d’un air carnassier à Loënia qui sentit aussitôt ses doigts crépiter. Elle portait une longue robe bordeaux ainsi que de lourds bijoux en or.

– Aujourd’hui, elle cherche à prendre ma place et à faire pression sur moi pour que je ne signe pas le traité de paix d’Horod.

Loënia tourna ses yeux vers ceux d’Adrien.

– Rashnoé a disparu, je dois le retrouver.

Feilli ricana. Loënia, les nerfs en feu, la foudroya du regard.

– Nous sommes tous au courant que Rashnoé a disparu, formula calmement Adrien pour récupérer l’attention de Loënia. C’est Feilli et son groupe qui l’ont capturé. Elle sait que tu peux avoir une influence sur moi et pour te toucher, elle a choisi ton petit-ami.

Loënia sentit son monde s'effondrer. Elle dévisagea Adrien pendant plusieurs secondes, comme pour s’assurer qu’elle n’avait pas rêvé ce qu’il avait dit.

Ensuite, elle repéra Andréas et Julien, le vampire qui avait un jour agressé Thaïs. Le salon n’était pas uniformément empli de vampires. En réalité, deux groupes le remplissaient : l’un plus grand, les alliés d’Adrien, et l’autre plus petit, les rebelles.

La vampiresse fit quelques pas en direction de Loënia. Cette dernière avança également vers elle. Elle regardait la foule amassée près d’eux.

– Tout ce que nous souhaitons est un nouveau chef. Auparavant, Adrien nous laissait tuer et assouvir nos besoins dès que nous le désirions. Maintenant, nous n’avons que la pleine lune pour nous défouler. D’ailleurs… Oh ! La pleine lune est aujourd’hui.

Quelques vampires postés à côté d’Adrien grognèrent. Malo et Thaïs étaient là, près de la cheminée, à quelques pas du meneur.

– Nous refusons catégoriquement qu’Adrien signe le traité de paix demandé par Horod. Nous voulons sa parole qu’il ne le fera jamais.

– Et s’il le signe ?

Loënia accorda un regard angoissé à Adrien. Elle savait déjà par cœur ce que Feilli allait lui répondre.

– Rashnoé mourra.

C’était irréaliste. Hier, Loënia et Rashnoé étaient côte à côte à servir des parts de gâteaux, à rencontrer de nouvelles personnes, à prendre des coups de soleil et à s’embrasser entre deux boissons. Pourtant, la réalité avait un goût terriblement amer.

Le regard glacé de la vampiresse n’impressionait pas la jeune femme. Elle ne craignait pas pour sa vie. Au contraire, elle se serait proposée de prendre la place de Rashnoé si elle avait pensé cela judicieux. La chaleur de la pièce l’étouffait. Les inspirations et expirations de tous les vampires qui les encadraient semblaient cadencer la scène, en quelque sorte.

– Nous voulons des preuves, affirma la fée.

Feilli lui sourit. Elle se dirigea vers le canapé et sortit un téléphone portable dernière génération de son réticule de marque. Elle tapota dessus. Quelques secondes parurent une infinité.

Enfin, la vampiresse accepta de retourner son écran. Une cave apparue. Ambatine aimait l'histoire. Elle avait amené ses filles dès leur plus jeune âge visité des châteaux et des demeures historiques qui possedaient toutes des caves à vin comme celle que Loënia observait maintenant. Tout au fond, elle pouvait discerner des chaînes qui maintenaient un jeune homme à un mur rongé par l’humidité. Ses cheveux blonds étaient plus foncés, son visage sale semblait rompu de coups, ses vêtements couverts d’une substance immonde paraissaient trop larges. La tête basse, il refusait de regarder l’écran et les vampires qui le narguaient. Il était amorphe et épuisé.

– Feilli, de quand date cette vidéo ? L’interrogea Adrien.

– De cette nuit. Je ne suis pas restée très longtemps. Je ne suis pas d’un naturel patient, siffla-t-elle.

Loënia eut la nausée. Elle se retourna vers la sortie et se laissa tomber au sol. Aussitôt, Thaïs s’accroupit à côté d’elle et posa son bras sur ses épaules. Elle posa sa tête contre sa poitrine. Ainsi cachée, elle rédigea aussitôt un message au groupe. Elle se ravisa. Si les ravisseurs de Rashnoé avaient son téléphone portable, ils pouvaient peut-être voir ses messages. A la place, elle envoya un SMS à son cousin.

14:17

Loënia : Rashnoé s’est fait enlever dans une cave par des vampires ennemis d’Adrien (une certaine Feilli, Julien et Andréas) Aide-le, je t’en prie. Peut pas se défendre, blessé. Cave. Sombre. Impossible de le repérer par magie.

Thaïs aida Loënia à se relever. Tout le groupe de vampires alliés à Adrien l’avaient vu écrire un message. Elle espérait qu’ils étaient de son côté. Si l’un d’eux décidait de ne pas tenir sa langue, Rashnoé était un homme mort.

– Tu sais, Loënia, cette situation est en partie de ta faute. Si tu n’avais pas cherché à ce point à convertir les vampires et toutes les autres espèces à ta pseudo paix, Rashnoé ne serait sûrement pas dans cette cave humide. Il n’aurait jamais reçu de coups. Ses pauvres petits maigres poignets ne seraient pas entravés par des chaînes magiques. Je n’aurais jamais goûté à son sang…

Adrien se plaça aussitôt devant Loënia.

– Non.

Loënia le foudroya du regard. La main encore en l’air, elle voulait écouter sa magie. Elle désirait ardemment laisser couler son flot de pouvoirs sorciers. Que cela pourrait-il donner ? Le lustre tomberait-il sur Feilli ? Brûlerait-elle en enfer ? Les fenêtres seraient-elles brisées ? Loënia se moquait de tout cela. Elle voulait revoir Rashnoé et le serrer dans ses bras. Elle souhaitait retrouver sa moitié.

Loënia, le regard toujours planté dans les yeux d’Adrien, finit par baisser son poignet. Ce n’était que partie remise, songea-elle.

– Et toi, Adrien, reprit Feilli comme si elle n’avait pas été interrompue, si tu n’étais pas allé hier à ce conglomérat d’idiots, que tu n’avais pas parlé à Horod, nous n’aurions pas agi.

– Le lucre te dévore, Feilli. Tu n’es plus ce que tu étais.

Les deux vampires s’examinaient des yeux.

– Tu tiens de bien belles allégations à mon encontre. Je ne suis pas celle que tu espérais être, c’est véridique. J’aspire à mieux pour ce clan, c’est tout.

Acclamations de ses sbires.

– Laisse partir ce pauvre sorcier. C’est un enfant. Je me moque bien de ce qui peut arriver d’autres tant qu’il ne lui arrive rien.

Loënia se sentit touchée par la déclaration d’Adrien. Il n’avait jamais fait preuve d’affection envers Rashnoé les quelques fois où il l’avait vu.

– Décide-toi, Adrien, fit Andréas. Refuse de signer ce traité ! Tu l’as toujours dit, accepter ces règles, c’est faire preuve de faiblesse !

Adrien ignora le vampire albinos et reporta son attention sur Feilli.

– Laisse-nous du temps.

– Je viens de dire que je n’étais pas patiente.

– Une heure.

– Non.

– Trente minutes.

– C’est trop peu ! Souffla Loënia.

– C’est assez, articula Feilli entre ses crocs.

Adrien se tourna vers Malo et Thaïs. Ils leur fit signe d’approcher.

– Malo, nous allons dans mon bureau. Loënia et Thaïs, vous allez manger un bout dans la cuisine immédiatement.

Adrien se tourna vers son bras-droit sans les laisser débattre des ordres. Thaïs et elle échangèrent un regard avant de quitter le salon. En quittant le salon, Loënia regarda son téléphone portable. Son cousin lui avait répondu.

14:19

Braken : Je ne vais pas laisser mon cousin dépérir des griffes de bouffeurs de sang. On gère.

Loënia se mit à ronger ses ongles, chose qu’elle n’avait pas fait depuis longtemps. Elle entra dans la cuisine avec Thaïs qui ferma la porte derrière lui.

– Ça va aller. Loënia, ça va aller.

Elle hocha la tête. Elle fixait le réfrigérateur noir, s’interdisant de pleurer. Si elle commençait à ouvrir les vannes, plus rien ne la retiendrait de s'effondrer. Magie, pleurs, cris, les sorciers et les fées pouvaient vite devenir dangereux pour leur entourage. Rashnoé avait besoin qu’elle fût forte pour qu’elle puisse prendre des décisions sensées.

Elle ouvrit le réfrigérateur et prit la bouteille d’eau. Elle se servit un verre -qu’elle faillit faire tomber par terre- et en but une gorgée. Elle laissa l’eau froide s’engouffrer et la faire frissonner.

– Il est blessé. Rash est blessé.

– Je l’ai vu mais ses blessures sont superficielles. Même s’il est choqué, cela passera. Nous l’aiderons tous. Ce n’est pas encore trop grave.

Loënia hocha la tête, elle aurait aimé croire Thaïs sur parole. Elle but une gorgée de plus. L’eau glacée creusait son chemin de sa bouche à son oesophage.

Il était quinze heures. Le message de Braken avait été envoyé il y a quarante minutes. Avait-il réussi à localiser Rashnoé ? Il possédait plus de ressources que Loënia : des fées travaillaient au palais, il y avait également sous ses ordres une myriade de soldats. Horod serait forcément d’accord pour aider un sorcier né à Cryset.

– Il ne nous reste plus que vingt-cinq minutes, émit Loënia. Bon. Nous pourrions… Non.

Thaïs plissa les yeux.

– J’allais proposer de tuer Feilli mais c’est une très mauvaise idée.

– Ce serait prouver que nous sommes comme eux, des tueurs.

Loënia acquiesça avant de sursauter.

– Attends, Thaïs. Tu viens de dire qu’ils étaient des tueurs. Donc le groupe dirigé par Feilli est constitué des vampires qui assassinent des gens dans tout le Finistère depuis des mois ?

Thaïs acquiesça lentement.

– Mais pourquoi Adrien ne m’en a pas parlé avant ?

– Tu devras en discuter avec lui plus tard. Il faudrait…

Thaïs s’arrêta subitement. Il tourna la tête vers la porte, l’oreille tendue.

Loënia se rua vers la sortie. Elle fut arrêtée par des rangs de soldats fées du palais. Leurs tatouages étaient fièrement visibles. Tous pourvus d’une épée, d’un écu et d’une armure, ils pénétraient dans la demeure à pas rapide. Loënia crut se retrouver en pleine rue un soir d’hiver. Le hall d’entrée et le salon étaient progressivement envahis. Loënia se faufila entre les gardes, suivie de près par Thaïs. Jouant des épaules et des mains, elle finit par entrer dans le salon. La clairière réservée pour Feilli et Adrien comportait un nouveau membre : Braken. A deux mètres de lui, la main de Thaïs l’attrapa et la tira en arrière.

– Où est Rashnoé ? L’interrogea-t-elle. Je ne le vois pas.

– Attends ici, je t’en prie. Les vampires affiliés à Feilli se sont dispersés à l’arrivée des gardes-fées.

Feilli, toujours dans sa longue robe bordeau, tenait son réticule contre son ventre. Des gardes l’encerclaient. Pendant ce temps, Braken se penchait vers Adrien pour lui murmurer quelque chose. La poigne de Thaïs se renforça. Il avait entendu.

Adrien avança de quelques pas vers la vampiresse. Son costume noir transgressait le bordeau de la vampiresse.

– Feilli, je te condamne pour l’assassinat de Rashnoé Corasone.

Loënia resta de marbre. Non, elle n’avait pas pu bien entendre. Pourtant, ses genoux tremblaient. Sa gorge lui était douloureuse et sa vision s’était brouillée.

Braken remua la main et ses gardes saisirent Feilli. Certains la pointaient de leur épée. Les tableaux semblaient regarder le désordre ambiant, juges immortels d’un brouhaha éphémère.

– Lâche-moi, murmura Loënia.

Thaïs s’y résolu. Il n’avait rien d’autre à faire, après tout. La jeune femme avança envers les gardes, les vampires, Adrien ou les meubles. Elle se retrouva devant son cousin, les yeux dans les yeux, la tête haute, le menton tremblant.

– Où est-il ?

Braken ne savait que dire.

– Où est-il ? Où est-il ? Où est-il ? Où est-il ? Où est-il ? Où est-il ? Où est-il ?

– Loënia.

– Où est-il ?

– Loënia, il est mort.

– Non. Non. Où est-il ?

Thaïs, qui était derrière Loënia, posa sa main sur son épaule. Celle-ci s’éloigna.

– Braken, gémit-elle. Dis-moi qu’il est vivant. Dis-moi qu’il va bien !

Le prince prit sa cousine dans ses bras. Elle ne réagit pas.

– Il ne peut pas… Pas lui… Pas lui.

– Il est mort, Loënia, souffla Braken à l’oreille de sa cousine. Nous sommes entrés dans cette cave. Ils l’avaient vidé de son sang.

Loënia recula la tête. Ils se regardèrent dans les yeux. Braken hocha la tête.

– Nous avons prévenu ses parents. Je suis sincèrement désolé.

Heyyyyyyyyyyyyyyyyyyy,

Je me sens horriblement mal, je vous assure.

Vous aimiez bien Rashnoé ?

Moi oui.

(C'est le premier personnage principal que j'assassine, je vous jure.)

Que pensez-vous de ce chapitre ?

Hehe.

Je me sens vraiment mal, quand même. Rash ne méritait pas ça...

Bref.

Que pensez-vous de Feilli et de son clan ?

Je m'en vais pleurer dans mon coin,

Buvez de l'eau (il en faut, après les larmes),

Jane Anne

PS : Je ne suis pas certaine qu'il y ait un chapitre demain, pas parce que je n'oserai pas ouvrir l'application, mais parce que je n'ai pas encore fini d'écrire le prochain chapitre :/ Je vous aime

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