L'Ombre de l'Amour
Le marché de Bokohoué pulse comme un cœur : cris des vendeuses, odeurs de poisson grillé et de piment, éclats de rire. Amélévi aide sa mère, Akuavi, à empiler des ignames, chantonnant une mélodie. Elle croise Boby, qui marchande des boulons avec Mama GaGa, une vendeuse rondouillarde aux foulards bariolés, inspirée des maraîchères d’Athiémé. Mama lit l’avenir dans des coquillages et lance, riant : « Boby, l’amour te piquera comme mon piment rouge ! » Amélévi pouffe, mais quand Boby lui offre une mangue juteuse – « Pour ta voix, chanteuse » –, son souffle se coupe. Leurs doigts se frôlent, et elle détourne les yeux, troublée.
Fifamè, 25 ans, coiffeuse aux lèvres peintes et au déhanché provocant, surgit : « Boby, viens tresser mes cheveux, toi ! » Jalouse, elle toise Amélévi, semant une graine de rivalité. De retour chez elle, Amélévi apprend une nouvelle amère : Koffi a promis sa main à Gérard, 40 ans, un commerçant au ventre rond qui sent le savon bon marché. « Il a des terres, une boutique, c’est un roc ! » clame Koffi. Amélévi explose : « Un roc qui m’étouffera ! Je veux vivre, pas m’enchaîner ! » La dispute dégénère en comédie : Koffi, furieux, renverse un seau de manioc, glisse, et s’écrase dans la cour. Les poules caquettent, Akuavi rit en cachette, et Amélévi s’enfuit, riant aux larmes. Seule sous la lune, elle prie près du fromager, murmurant : « Esprits, guidez-moi. » Ses larmes brillent comme des étoiles. Koffi, couvert de manioc, menace les poules : « Vous moquez-vous de moi, sales plumes ? » Boby découvre une lettre glissée sous sa porte : « Pars, ou Bokohoué saura qui tu es. » Une plume noire identique y est collée. Akuavi murmure à Amélévi : « Le cœur court plus vite que les jambes, mais il trébuche aussi. » Les mariages arrangés, encore courants dans certains villages du Mono, créent des tensions entre générations.
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