Chapitre 5 : Une idée

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Le lendemain matin, R'yline s'éveilla avec une idée : devenir la priorité absolue du prince. Il était de notoriété publique dans les couloirs du palais, que le prince n'avait jamais partagé la couche d'une femme, Eflamme ou non. La nymphe était convaincue qu'en l'observant de près et sous l'effet de son art, il succomberait à ses charmes. Ainsi, père et fils lui offriraient ses faveurs. Elle assurait du même coup sa sécurité immédiate et à venir.

Après de longues réflexions, la danseuse avait conclu qu'échaffauder un plan dans le dos du souverain s'avérait plus que périlleux. Elle avait trop à perdre et si peu à gagner. Le plus ardu se présentait désormais à elle : trouver le moyen de convaincre le père et le moment où lui soumettre l'idée. Comme chaque fois, R'yline posa la main sur son flanc. Ce geste réflexe vint lui rappeler son statut. Elle secoua la tête, se donna quelques tapes sur les joues. La nymphe avait appris depuis, cela ne se reproduirait plus. Par ailleurs, elle devait assurer ses arrières au cas où le roi finirait par se lasser d'elle. Évènement peu probable au demeurant, mais l'on n'était jamais trop prudent. La vie lui avait appris à conserver un atout dans sa manche, et cela avait fait la différence plus d'une fois entre la misère et la réussite. Sa basse extraction n'aurait pas dû lui permettre d'évoluer dans les hautes sphères de la noblesse. Elle s'était forgée son destin, aidée de sa beauté naturelle. Elle en était parfaitement consciente, raison pour laquelle elle prenait grand soin de son corps.

Ce matin, comme il arrivait rarement, les services d'R'yline étaient requis à la demande des O'rocs. S'il ne pouvait l'acheter, du moins profiterait-il de sa grâce avant de repartir. Un sentiment de puissance l'envahit. Il électrisa tout son être. Elle s'admira dans le miroir, menton légèrement relevé. Elle était resplendissante !  La danseuse préférait, et de loin, mettre à profit ce don de la nature plutôt que ce qu'elle avait appris afin de satisfaire hommes et femmes fortunés.

La danseuse commença par peigner ses cheveux qui ondulaient jusqu'au creux de ses reins. Patiemment, elle tressa de petites nattes qu'elle noua à l'arrière de sa tête à l'aide d'une broche en laiton où scintillaient des pierres opalescentes, après les avoir ornées avec soin de fils colorés où tintaient ses breloques. Ce bruit l'apaisait et faisait parti intégrante de son charme, elle ne coupait donc jamais à ce rituel. Elle attrapa ensuite un pinceau pour venir maquiller ses yeux afin d'en faire ressortir l'éclat, et vint déposer un léger fard sur ses joues. Sa bouche se para d'une teinte dorée, cette couleur mettait davantage en valeur la forme de ses lèvres. Ce masque déposé avec soin sur sa peau marquait la transition. Elle devenait la danseuse, la femme de tous les fantasmes.

Partie trop loin dans sa rêverie, la nymphe sursauta au coup frappé à la porte.

— Entrez.

La porte s'ouvrit doucement, D'aélyss, sa collègue et l'une de ses rares amies entra :

— R'yline, nous sommes attendues sous peu, il nous faut répéter maintenant.

— Je viens juste de terminer.

La jeune femme s'approcha de son amie, posa une main sur son épaule :

— As-tu évité la couche de ces O'rocs ? Ils n'e sont pas réputés pour leur douceur.

Elle fit la moue à l'évocation des rumeurs qui lui étaient parvenues aux oreilles.

— J'ai pu passer la nuit seule grâce à ton conseil, l'infusion d'solitus m'a empêché d'dormir une partie d'la nuit mais au moins j'ai évité la couche d'ces hommes. Sacré mal de tête ! Je n' sais pas comment t'as découvert l'effet de c'te plante mais ça n'a pas du être des plus agréables. L'O'roc a bien tenté d'me faire venir malgré ma condition, il devait penser que je simulais. Mais quand il a constaté que j'alternais entre grimace et gémissements d'douleur, il a vite abandonné.

D'aélyss se mit à pouffer. Un large sourire se peignit sur le visage d'R'yline, autant par soulagement qu'en entendant le phrasé de son amie. Cette dernière avait appris à parler avec plus d'élégance, mais en privé le naturel revenait au galop, et elle ne pouvait s'empêcher d'utiliser cette prononciation aux accents campagnards. Cela avait toujours amusé autant que charmé R'yline.

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