Chapitre 5

7 minutes de lecture

— Tu l’as mal vécu, hein ?

La voix de Laura était douce, mais je sentais dans son regard qu’elle essayait de cacher sa gêne. Peut-être parce qu’elle avait du mal à me prendre au sérieux. Qui paniquerait pour un simple placard ? Sauf que ce n’était pas juste un placard.

— Je t’assure, Laura. C’était pas un petit moment de panique. Je respirais plus. J’avais l’impression que les murs allaient se refermer sur moi.

Je passai une main dans mes cheveux, encore tremblante. Mon cœur battait toujours trop vite. Et ce sourire insolent de Noah… il me hantait. Comme s’il s’était amusé de me voir suffoquer.

— Ce mec est bizarre, ajoutai-je. Il a rigolé alors que je suffoquais. Et puis, y’a un truc…

Je m’interrompis.

— Quoi ? fit Laura.

— Juste avant qu’on nous ouvre, il a dit un prénom. Comme s’il avait oublié que j’étais là. "Julian", il a murmuré. Et… son regard a changé. Comme s’il revivait quelque chose.

Laura fronça les sourcils.

— Julian ? Tu veux que je regarde s’il y a ce nom dans les archives ?

Je hochai la tête.

— Oui. Je crois que ce Noah… cache quelque chose.

Laura s’installa devant son ordinateur, les doigts déjà en mouvement sur le clavier.
Elle tapa le prénom, chercha dans les bases internes, puis affina sa recherche avec un soupir concentré.

— Y’a un Julian R. qui apparaît… mais c’est étrange. Le dossier est vide, juste une ligne.

Elle pivota vers moi, les sourcils froncés.

— Il est noté comme "ancien agent"… mais y’a aucun détail. Pas de photo, pas de rapport, rien. Juste une indication d’emplacement : archives papier, section C-4.

Mon estomac se serra.

— C’est pas normal qu’il y ait rien du tout, hein ?

Laura hocha lentement la tête.

— Pas pour un agent du commissariat, non. Même s’il avait quitté son poste, on devrait au moins voir un rapport de départ ou une fiche RH. Là… c’est comme s’il avait été effacé.

Je regardai Laura, incapable de garder ça pour moi plus longtemps.

— On peut pas juste laisser tomber, murmurai-je. Tu sais aussi bien que moi qu’il y a un truc qui cloche… avec Noah.

Laura releva les yeux de son écran, visiblement agacée, mais surtout inquiète. Une lueur traversa son regard, furtive, presque douloureuse.

— Lexie, je sais à quoi tu penses. Et c’est hors de question.

— Sérieusement ? Tu veux pas savoir ce qui s’est passé ? Ce qu’il cache ? Et surtout… pourquoi il a murmuré ce prénom ?

Je fis une pause, la fixant. Elle serra la mâchoire. Je continuai, plus bas.

— Tu peux pas me dire que t’as pas senti, toi aussi… que quelque chose cloche. Ce regard qu’il m’a lancé… c’était pas anodin. Et le dossier vide ? C’est pas normal.

Je fis un pas vers elle. Je la connaissais. Je savais lire dans ses silences.

— Laura… Tu veux savoir. Tu veux comprendre. Pas juste pour moi. Pour toi aussi.

Elle détourna le regard, croisa les bras. Défense classique.

— Tu me connais trop bien, finit-elle par souffler. Et c’est bien ça, le problème.

— Je te propose qu’à la pause déjeuner, on aille fouiller dans les archives. Le dossier papier, section C-4. C’est à ce moment-là qu’il y aura le moins de monde.

Je la regardai, guettant sa réaction.

Laura pinça les lèvres, visiblement partagée entre le bon sens et la curiosité. Son regard glissa vers le sol, puis revint vers moi. Elle soupira… et céda.

— Bon, d’accord. J’avoue… c’est beaucoup trop tentant. Je veux savoir ce qui s’est passé. Et pourquoi ce dossier est vide.

Un sourire étira mes lèvres malgré moi. Ce n’était peut-être pas raisonnable, mais on était d’accord. Ensemble dans ce foutoir.

— Merci, murmurai-je.

— Mais après, tu me dois un café. Et si on se fait choper, je dirai que c’était ton idée.

— Deal.

Les heures suivantes s’étirèrent, lentes et lourdes, comme si le temps lui-même savait ce qu’on s’apprêtait à faire.

Je jetai un coup d'œil à travers la porte vitrée et aperçus Noah, immobile, le regard perdu dans le vide. Il avait l’air ailleurs, comme coupé du monde. J’hésitai un instant à lui envoyer un message… mais je me ravisai.

À quoi bon ?

Enfin, l’horloge afficha midi.

Laura et moi échangeâmes un regard. Un frisson me parcourut l’échine. J’étais à la fois excitée… et terrifiée.

Nous attendîmes encore quelques minutes, juste pour être sûres que personne ne viendrait nous déranger dans la salle d’archives.

Puis, sans un mot, nous montâmes au dernier étage. La pièce était sombre, froide. L’ampoule au plafond grésillait faiblement, projetant une lumière vacillante sur les étagères métalliques alignées comme des soldats silencieux.

L’odeur de poussière et de vieux papiers me prit à la gorge. Laura toussa.

Nos regards se croisèrent. Pas besoin de parler. On était prêtes.

On se mit à chercher la section C-4.

Après quelques minutes, la voix de Laura brisa le silence :

— Je l’ai trouvé.

Un frisson parcourut tout mon corps, comme une vague glacée.

Je la rejoignis en hâte, le cœur battant plus fort que je ne l’aurais voulu. Sans un mot, on se mit à chercher à l’intérieur… un dossier concernant Julian R.

Les dossiers étaient rangés dans de vieux classeurs aux étiquettes à moitié effacées. Certains papiers semblaient n’avoir pas été touchés depuis des années. Laura feuilletait à toute vitesse, concentrée, tandis que mes doigts tremblaient légèrement sur les pages.

— Attends… murmurai-je.

Un nom attira mon regard, griffonné à la main sur un coin de fiche : Noah R.

Mon cœur rata un battement.

— C’est lui, soufflai-je. C’est Noah.

Laura fronça les sourcils et tira la fiche vers elle. Elle la lut lentement, puis secoua la tête.

— Non… regarde bien. Ce n’est pas un dossier d’agent. Il est mentionné… comme proche familial. D’un certain Julian R. Julian a jamais été flic.

Je sentis un nœud se former dans ma gorge.

— Donc Julian… c’est le frère de Noah ?

Laura acquiesça en silence.

Mais le reste du dossier était quasiment vide. Pas de photo. Juste une signature illisible, et un mot griffonné en rouge au bas de la page : "classé."

— C’est comme si quelqu’un avait effacé tout le reste, dis-je à voix basse.

Laura releva les yeux vers moi, pâle.

— Et si ce n’était pas un simple dossier oublié… mais volontairement enterré ?

Laura et moi nous échangeâmes un long regard, sans un mot. Puis un bruit inattendu nous fit sursauter : la porte des archives s’ouvrit.

Nous fîmes immédiatement silence, nos respirations se faisant plus discrètes, comme si ça pouvait nous sauver. Les pas résonnèrent dans le couloir, se rapprochant de nous, chaque mouvement lourd de sens. Mais avant qu'on ait le temps de réagir, la personne fit brusquement demi-tour et referma la porte derrière elle, sans un mot.

Le silence qui suivit était presque plus lourd que tout ce qui venait de se passer.

Je saisis Laura par le bras, sans un mot, et l’incitai à me suivre. Mon cœur battait encore à toute vitesse.

Je pris la direction du couloir, jetant un dernier regard derrière moi, puis nous descendîmes les marches, une à une, jusqu’à atteindre le rez-de-chaussée.

Alors qu’on atteignait le dernier palier, nos pas ralentirent d’un coup.

Noah se tenait là, adossé contre un mur du couloir principal, les bras croisés, les yeux rivés sur son téléphone. Il ne nous avait pas encore vues.

Mon cœur fit un bond, et Laura me lança un regard inquiet.

— Tu crois qu’il sait qu’on était là-haut ? chuchota-t-elle.

Je secouai la tête, mais je n’en étais pas si sûre.

Je sortis mon téléphone presque sans y penser. Mes doigts hésitèrent au-dessus de l’écran. Puis je tapai rapidement :

« Est-ce que tout va bien ? »

Je levai les yeux vers lui. Au même moment, il leva les siens. Nos regards se croisèrent. Un instant figé. Puis son téléphone vibra dans sa main.

Il baissa les yeux vers l’écran. Un léger froncement de sourcils plissa son front. Il lut mon message… mais ne tapa rien en retour.

Puis, lentement, il rangea son téléphone dans la poche de sa veste.

Il releva les yeux vers nous. Son regard glissa de Laura à moi, puis se fixa sur moi. Intense. Presque dérangeant.

— Tout va bien, répondit-il, sans le moindre sourire.

Sa voix était calme. Trop calme. Il ne bougea pas d’un pouce. J’avais l’impression qu’il nous jaugeait, comme s’il tentait de deviner ce que nous savions.

À côté de moi, je sentis Laura se crisper.

— On devrait y aller, murmura-t-elle.

Je hochai la tête, mais mes yeux restèrent accrochés aux siens.

Noah ne détourna pas le regard. Il me fixait, encore, intensément. Comme s’il voulait me faire passer un message, quelque chose d’important… mais que je ne parvenais pas à comprendre.

Une seconde de plus, et j’aurais juré voir une lueur de peur dans ses yeux.

Puis, sans un mot, il se détourna et s’éloigna dans le couloir, nous laissant seules, avec plus de questions qu’avant.

Je ne savais pas si je devais lui faire confiance… mais une partie de moi ne voulait pas le laisser seul avec ses secrets.

*****

Tu es arrivé(e) jusqu’ici, et ça me fait super plaisir

Laisse-moi un petit "j’aime" ou dis-moi ce que tu as pensé de ce chapitre en commentaire, je lis tout avec attention !

La suite arrive vite, reste dans les parages !

— Sacha

Annotations

Versions

Ce chapitre compte 2 versions.

Vous aimez lire sacha_miler ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0