Chapitre 17
Mon téléphone vibra sur la table basse, dans le petit appartement de Noah, interrompant le silence pesant.
Un message de Tom.
Je n’avais aucune envie de le voir, encore moins de lui répondre. Mais une boule d’angoisse se forma dans mon ventre.
Je déverrouillai l’écran, les mains tremblantes.
« Lexie, tu vas bien ? Tu crois vraiment que tout ça est fini ? C’est toi qui as tout gâché. Je voulais qu’on règle ça calmement, mais toi, tu préfères fuir comme une lâche. Réfléchis bien… Tu vas le regretter. »
Le message était froid, parfaitement maîtrisé, mais chaque mot était un poison déguisé en menace.
Je serrai le téléphone dans ma main, un mélange de colère sourde et de peur paralysante se disputant en moi.
Je laissai mon pouce suspendu au-dessus de l’écran, incapable d’effacer ce message ni de répondre. C’était comme si ses mots étaient une ombre froide qui s’étendait sur toute la pièce, me paralysant.
Je ne voulais pas replonger dans ce cauchemar. Pas maintenant. Pas avec Noah juste à côté, avec qui je commençais à trouver un peu de répit.
Je décidai finalement de bloquer son numéro. Pas parce que j’avais peur, mais parce que je devais me protéger. Pour moi. Pour tout ce que je commençais à reconstruire.
Je rangeai mon téléphone dans mon sac, le cœur encore battant trop fort.
Un bruit dans l’entrée me fit sursauter. Noah revenait avec deux cafés, sans un mot, mais son regard disait tout : il avait vu que j’étais troublée.
— Tu veux en parler ? demanda-t-il doucement, posant une tasse à côté de moi.
Je secouai la tête, tentant de rassembler mes pensées.
— Pas encore. Mais merci d’être là.
Il me sourit, et je sus que, quoi qu’il arrive, je ne serais plus jamais seule face à Tom.
Je laissai mon regard glisser sur l’écran, la menace à peine voilée pesant dans chaque mot. Un frisson désagréable me parcourut.
Je soufflai, essayant de chasser ce poids. Puis, pour me distraire un instant, je lançai, avec un petit sourire en coin à Noah :
— Tu sais, si jamais je deviens trop lourde avec tout ça, on pourrait toujours regarder Teen Wolf. Paraît que ça marche comme thérapie d’urgence.
Noah me regarda, un sourire amusé mais tendre aux lèvres.
— Je prends note. Mais tu devrais me prévenir avant, histoire que je prépare le popcorn.
Ce bref échange ne dissolvait pas mes angoisses, mais il installait un souffle de normalité, une bulle fragile où j’avais encore un peu prise sur moi-même.
Je déposai ma tasse à moitié vide, quand mon téléphone vibra de nouveau. Un appel inconnu.
Je bloquai ma respiration, puis décrochai, la voix tremblante.
— Allô ?
— Lexie ? C’est Camille.
Le prénom ne me disait rien. Une voix féminine, légèrement tendue, qui semblait peser chaque mot.
— Camille ? Euh… je ne crois pas qu’on se connaisse vraiment.
Un silence.
— Je suis une connaissance de Tom. Enfin, pas vraiment proche, mais… disons que je sais des choses.
Je me raidis.
— Quelles choses ?
— Écoute, je sais que tu essaies de t’éloigner de tout ça, mais Tom est dangereux. Et ce que tu crois être fini, ça ne l’est pas.
Je sentis un frisson me remonter le long de l’échine.
— Pourquoi tu me contactes, alors ?
— Parce que je ne supporte pas qu’il fasse du mal aux gens.. Tu dois être prudente.
Je serrai les dents.
— Que veux-tu que je fasse ?
— On se voit demain, quelque part où on ne pourra pas être écoutées. J’ai des informations qui pourraient t’aider.
Le ton de sa voix laissait entendre qu’elle savait plus que ce qu’elle voulait dire.
— Très bien. Où ?
— Je t’envoie le lieu par message. Fais attention, Lexie.
Elle raccrocha avant que je ne puisse répondre.
Je restai figée, le téléphone chaud contre ma main.
Noah, qui avait suivi toute la conversation, posa une main douce sur mon épaule.
— Ça va ?
Je hochai la tête, mais au fond de moi, tout était en alerte.
Le lendemain, j’étais arrivée en avance au petit parc indiqué par Camille. Un endroit banal, près d’un vieux kiosque fermé, entouré de bancs fatigués et de buissons trop touffus. Le genre d’endroit où personne ne fait attention à personne. Parfait pour un rendez-vous discret.
Noah avait insisté pour m’accompagner, mais j’avais refusé. Je devais entendre Camille seule. C’était une affaire entre moi et les fantômes de Tom.
J’aperçus enfin une silhouette s’approcher. Petite, nerveuse, la trentaine peut-être, habillée sobrement, lunettes noires sur le nez malgré le ciel couvert.
— Lexie ? dit-elle, en jetant un coup d’œil rapide autour d’elle.
— C’est moi. T’es en retard.
Elle haussa les épaules, regard fuyant.
— Désolée. J’ai failli pas venir. C’est risqué, ce que je fais.
Je croisai les bras, méfiante.
— Alors parle. Dis-moi ce que tu sais.
Elle regarda encore une fois autour d’elle, puis sortit un petit carnet froissé de sa veste. Elle l’ouvrit à une page couverte de notes écrites à la hâte.
— Il te surveille. Pas juste toi. Noah aussi. Et quelqu’un d’autre… Une femme que tu connais ?
Je fronçai les sourcils.
— Comment ça ?
— J’ai entendu une conversation, chez lui. Il parlait à quelqu’un au téléphone. Il a dit que « le plan devait continuer », que tu allais « craquer sous la pression ». Et qu’il fallait « que tout tombe sur elle ».
Un froid glacial se répandit dans ma poitrine.
— Tu es sûre de ce que tu dis ?
Elle me tendit une feuille arrachée du carnet, où des bribes de phrases étaient griffonnées.
— J’ai noté ce que j’ai pu. Je crois qu’il veut te piéger pour quelque chose. Un truc plus gros que ce que tu imagines.
Je pris le papier, les doigts tremblants.
— Pourquoi tu m’aides, Camille ?
Elle hésita, puis murmura :
— Parce que j’ai failli être toi.
Je rentrai chez Noah le cœur en vrac, les doigts crispés sur la feuille que Camille m’avait donnée. Ses mots résonnaient encore dans ma tête, comme un écho que je n’arrivais pas à faire taire.
« Il veut que tout tombe sur toi. »
« Il vous surveille. »
Je poussai la porte d’entrée, et Noah se redressa aussitôt du canapé.
— Alors ? demanda-t-il. Tu l’as vue ?
Je hochai lentement la tête, puis lui tendis la feuille. Il la lut en silence, son expression se durcissant à chaque ligne.
— Tu crois que c’est vrai ? demanda-t-il finalement.
Je haussai les épaules, fatiguée, vidée.
— Je sais plus. Elle semblait sincère. Mais elle connaît Tom. Et je la connais à peine.
— C’est peut-être un piège.
— Ou peut-être un avertissement.
Je me laissai tomber sur le canapé. Mon esprit tournait à toute vitesse.
— Il prépare quelque chose. Et si Camille dit vrai, il ne veut pas juste me harceler. Il veut me détruire. Publier quelque chose, me faire passer pour folle, ou pire… me faire porter le chapeau pour un truc qu’il a prévu.
Noah s’assit à côté de moi, plus grave que jamais.
— Tu penses à quoi, exactement ?
Je le regardai droit dans les yeux.
— Je pense que je dois fouiller. Chercher ce qu’il essaie de cacher. Il y a peut-être un dossier, des messages, quelque chose que Camille a vu mais n’a pas compris. Et s’il me surveille vraiment, il faut que je sois plus rapide que lui.
Un silence.
Puis Noah dit :
— Tu veux dire… retourner chez lui ?
Je pris une grande inspiration.
— Oui. Juste une fois. Je sais où il cache son ordinateur. Et s’il y a quoi que ce soit qui prouve ce qu’il prépare, je dois le trouver.
Il me regarda longtemps, puis répondit :
— Alors je viens avec toi.
Je posai ma main sur la sienne.
— Non. Ce serait trop dangereux pour toi.
Il ne répondit pas, mais je vis dans ses yeux qu’il ne me laisserait pas faire ça seule. Et au fond, peut-être que je ne le voulais pas.
Il était presque minuit quand on s’introduisit dans l’appartement de Tom.
J’avais gardé un double de la clé. Une erreur, peut-être. Ou une précaution inconsciente. Peu importe : ce soir, c’était une porte d’entrée vers la vérité.
L’air à l’intérieur était moite, lourd, comme figé dans le passé. Chaque pas semblait résonner plus fort que le précédent.
— Il est pas là ? murmura Noah.
— Non. Il bosse tard les vendredis. On a trente minutes. Pas plus.
Je me dirigeai droit vers le bureau. C’était toujours là qu’il planquait ce qu’il ne voulait pas qu’on voie. Dans la commode basse, troisième tiroir, sous une fausse pile de dossiers de boulot. Je le savais. Je l’avais déjà vu faire.
— Bingo, soufflai-je en soulevant un vieux cahier.
Derrière, un ordinateur portable. Verrouillé. Mais pas éteint.
— Il l’a juste mis en veille, dit Noah derrière moi. Essaie son mot de passe habituel ?
Je tapai le nom de sa chienne d’enfance. Ça marcha.
Le bureau s’afficha, sobre. Un seul dossier trônait au milieu de l’écran, nommé “ATHÉNA”.
Je sentis mon estomac se nouer.
— T’as vu ? Il a nommé un dossier comme ça… murmurai-je.
Je l’ouvris.
À l’intérieur : des photos. Vieilles, pour certaines. Moi, dans la cuisine, en train de préparer le café. Athéna sur le plan de travail. Des selfies qu’on avait pris ensemble, que je pensais avoir effacés. Même des vidéos de soirées, de conversations privées, filmées à la va-vite, parfois sans que je le sache.
Je cliquai sur une vidéo. Ma voix, un rire. Puis un moment de dispute. Un échange houleux que je ne me souvenais même pas avoir été filmé.
— Il a gardé tout ça… soufflai-je, écœurée. Même les pires moments.
Noah fronça les sourcils.
— C’est pas juste de la nostalgie. C’est une sorte d’obsession. Il a trié, classé. C’est pas sain.
Je retournai au dossier principal. Un fichier Word : "Étapes finales – phase 2"
Je l’ouvris.
Objectif : isolement émotionnel. Confusion des repères. Surveillance passive achevée. Prochaine phase : manipulation externe via Camille ? Étape finale : effondrement. Documenter réactions. Prévoir intervention semaine prochaine.
Je me redressai, glacée.
— Il me considère comme un projet.
— Il te dissèque, murmura Noah.
Et à ce moment précis, un bruit retentit derrière la porte de l’immeuble. Une clé dans une serrure. Un pas.
Noah et moi nous regardâmes.
Quelqu’un rentrait.
*****
Tu es arrivé(e) jusqu’ici, et ça me fait super plaisir
Laisse-moi un petit "j’aime" ou dis-moi ce que tu as pensé de ce chapitre en commentaire, je lis tout avec attention !
La suite arrive vite, reste dans les parages !
— Sacha
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