Chapitre 3

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Un murmure parcourut la salle, aussitôt étouffé par la voix grave du conseiller. Diane sentit un frisson lui remonter la nuque.

— Si vous êtes parmi nous aujourd’hui, c’est que vous avez franchi la première épreuve. Mais ne vous y trompez pas : l’examen d’entrée n’était qu’une mise en bouche, un simple aperçu de ce qui vous attend ici. L’Académie ne tolère ni la complaisance ni la faiblesse. Beaucoup rêvent de briller, certains murmurent déjà le mot Élite, mais seuls les plus constants y parviendront. Ici, tout se mérite.

Il marqua une pause, le temps de jauger son auditoire, suspendu à ses lèvres. En quelques phrases, il avait éteint tout enthousiasme dans la salle.

— Nous suivrons de près vos parcours et avons hâte de vous connaître davantage. Madame la directrice va maintenant vous présenter le programme et les règles de fonctionnement.

Madame Fouquet s’avança, mais Diane ne pouvait détacher son regard d’Adalric Van Grendal. Cet homme dégageait quelque chose de magnétique : un visage calme, une posture d’une maîtrise absolue. Son regard noir, en revanche, transperçait. Sa cape le recouvrait presque entièrement, et malgré sa courtoisie apparente, il émanait de lui une autorité troublante. C’était donc lui, l’un des plus influents membres du Conseil. C'était la première fois qu’elle le voyait, et déjà elle sentait cette étrange dualité : à la fois charismatique et dérangeante.

Madame Fouquet enchaîna sur le fonctionnement de l’Académie, débitant des informations que Diane connaissait déjà par cœur. Autour d’elle, les élèves s’impatientaient, se tortillant sur leurs chaises. Au bout d’un temps interminable, la directrice conclut enfin :

— Vos chambres ont été préparées. Nous vous laissons vous installer. Le repas sera servi dans une heure. Merci de revenir dans ce délai.

Les voix éclatèrent de nouveau dans le réfectoire tandis que les premières années retournaient dans le hall, où les professeurs formaient les rangs : filles à droite, garçons à gauche, pour se diriger vers les dortoirs.

Ils montèrent plusieurs volées d’escaliers. Diane ne pouvait s’empêcher d’observer les élèves des années supérieures qu’ils croisaient. Certains se retournaient sur son passage, ce qui lui donna un léger malaise. Grande blonde au teint doré par le soleil, elle contrastait avec Mélissa, plus brune et plus réservée. Et, à sa grande frustration, cette différence semblait attirer les regards. Combien de fois avait-elle dû remettre à leur place des clients trop insistants sur le marché ? Trop souvent. À force, elle avait pris l’habitude de parler d’une voix sèche, presque rocailleuse, qui dissuadait toute tentative.

— Voilà la porte du dortoir des filles, annonça le professeur Lysanne, une femme d’une quarantaine d’années, au chignon parfait et au visage doux.

Elle caressa la porte, et une poignée émergea de l’encadrement.

— Heureuse de vous revoir, Madame Lysanne, dit la poignée d’une voix claire.

— Plaisir partagé, répondit la professeure. Voici les nouvelles élèves de cette année. Je te laisse les visualiser et répartir les informations pour tes complices.

— Bien entendu, répondit la poignée, sur un ton presque amusé. Vous pouvez entrer. Vos numéros de chambre sont affichés dans la salle commune.

Les filles défilèrent en file indienne. Diane avait entendu parler de ces poignées magiques propres à l’Académie : des vestiges d’une magie ancienne, aujourd’hui disparue. Le château en était truffé, disait-on, et elle comptait bien en découvrir tous les secrets.

Une fois le passage franchi, elle pénétra dans la salle commune. Le lieu était chaleureux : des fauteuils, quelques tables, et une grande cheminée éteinte. Diane s’imagina déjà y passer ses soirées à lire.

Elle chercha son nom sur la liste affichée au mur :
Miss Diane Calven : chambre 016.

— Chambre 022, lui dit Mélissa derrière elle.

Chacune prit la direction de son couloir. Diane posa la main sur la poignée, mais la retira aussitôt : le métal était chaud. Un mot s’inscrivit à la surface : Bienvenue, Diane.

Elle déglutit bruyamment. Il lui faudrait du temps pour s’habituer à cet endroit.

La chambre était simple mais lumineuse : ses valises attendaient contre une armoire, un lit large occupait le centre, et un bureau faisait face au mur. Un plan indiquait la salle de bains commune et les toilettes.
C’était mieux que tout ce qu’elle avait imaginé.

Elle hésita à s’asseoir, craignant d’abîmer quelque chose, puis s’approcha de la fenêtre. Au loin, elle aperçut le parc et, derrière les falaises, la mer étincelante. Un sourire lui échappa. Ranger ses affaires lui prit peu de temps, mais, sur un élan soudain, elle déplaça son bureau pour le mettre face à la fenêtre.

Mélissa et Diane descendirent à l’heure au réfectoire et trouvèrent une table libre.

— Tu as vu l’emploi du temps ? demanda Mélissa.
— Oui. C’est assez chargé, répondit Diane. Éthique et obéissance demain matin, puis cours de survie dans la nature. Il paraît que cette matière est…
— Horrible, compléta Mélissa avec une grimace. Effectivement.

L’atmosphère changea soudain. Diane le sentit avant même de comprendre pourquoi : une tension subtile, presque électrique. Des silhouettes venaient d’entrer dans le réfectoire, revêtues de l’uniforme réglementaire et de lourdes capes grises.

C’était eux.
Les membres de l’Élite.
Les rares à avoir tenu trois années.

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