Le sixième sens

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Juin 2019 :

Un an s’était écoulé déjà depuis leur séjour à Lourdes. Sofia avait fini par délocaliser sa petite entreprise à New-York encouragée et aidée par Marje qui y vivait déjà. Elle lui avait proposé d’emménager un petit duplex dont ses parents étaient propriétaires. Elle avait installé son atelier et sa boutique au rez de chaussée et son lieu de vie était située au-dessus, c’était bien pratique. Marje lui avait fait un prix d’ami pour lui rendre cet espace accessible, les loyers sont plutôt chers à Manhattan.

Du coup, ils habitaient tous sur le continent américain désormais et ils communiquaient par Messenger de loin en loin comme on dit.

Personne n’avait plus parlé de rêves et encore moins du narrateur. Ils étaient tous passés à autre chose, tant mieux parce que d’une certaine façon toute cette histoire était plutôt anxiogène comme quand vous tombez malade et qu’aucun médecin n’est capable de vous dire ce que vous avez.

A la terrasse d’un café avec Marje.

Son téléphone sonne.

Marge : Allô ! Qui est-ce ?

- C’est moi, Norman , suis de passage à New York pour une livraison de fruits et légumes et me suis dit qu’on pourrait se voir, je repars demain en milieu d’après-midi. »

- Super idée ! Viens dîner à la maison ce soir, j’ai une surprise pour toi. Je t’envoie l’adresse sur messenger. Bises, à ce soir !

Se tournant vers Sofia, Marge un sourire aux lèvres lui lança : « c’était Norman, il vient dîner à la maison ce soir et tu es invitée aussi ; ça va être sympa. »

20h. le dîner.

Norman n’avait pas du tout changé, peut-être un peu plus enjoué que d’habitude. Il sentait étrangement bon et semblait plus séduisant aux yeux de Sofia ; elle ne pensait pas que leur amitié un peu spéciale tiendrait le coup face au temps qui passe. En général, on choisit ses amis par affinité de caractères, de valeurs … alors qu’aujourd’hui encore, aucun d’eux ne saurait dire ce qui les avait rapprochés en dehors du partage d’un même espace-temps.

Il était un peu fatigué, sans doute le voyage depuis Albuquerque.

Marje : Alors comment ça va depuis Lourdes ?

Norman : Me suis mis à fond dans le boulot, suis tout le temps sur la route ; je traverse pas mal de villes que je ne connaissais pas, je rencontre des nouvelles personnes, le temps file à toute vitesse. Suis content de vous revoir toutes les deux ; j’ignorai que tu vivais à New-York Sofia, je te croyais perdue sur ton île paillette, la Nouvelle Calédonie c’est bien ça ?

Sofia : Ben c’est pas pire qu’Alburquerque, ce coin paumé…

Ils se mirent tous à rire de bon cœur.

Marje : Est-ce que quelqu’un a rêvé depuis ?

Norman : Moi, oui mais c’était plus un mix de tous vos rêves ou plutôt c’était comme si vos rêves n’étaient qu’un fragment d’un rêve plus global, d’une mission plus globale. En dehors de ça, rien de nouveau sous le soleil.

Sofia : Que veux-tu dire par un rêve plus global ou une mission plus globale ?

Norman : Je veux dire que c’était comme si mon rêve était le film complet de vos rêves avec l’étrange sensation que ce n’était que le commencement.

Sofia : Pourquoi dis-tu ça ?

Norman : De ce que j’ai compris, l’histoire commence dans cette Eglise où nous avons prié puis nous nous retrouvons dehors sur une aire de pique-nique et c’est là qu’arrive ce prêtre et ses armes moyenâgeuses et ensuite il y a ces amas d’énergie, des cordes quantiques, des sortes d’anneaux d’énergie que Marje peut réunir pour former des structures de toute sorte, c’était impressionnant à voir.

Il s’arrête et regarde le bras de Marje.

Marje : Quoi ? Qu’est-ce qu’il y a ?

Norman : Portes- tu toujours ces bracelets ?

Marje : Ben oui pourquoi ? C’est mon ami David qui me les a offerts pour me remercier de l’avoir accompagné à Jérusalem, c’est un voyage qu’il ne voulait pas faire seul.

Norman : Il y en 3… il t’en manque 2. Dans ma vision, tu en portais 5.

Marje : Oui et alors ? Qu ’est-ce que ça peut bien faire ? Tu es bien énigmatique tout à coup. Tu ne crois pas qu’en matière de mystère, nous en avons eu notre compte en ce moment !

Norman : C’est juste que dans ma vision, tu te servais de tes bracelets pour créer ces cordes quantiques, ces amas d’énergie pour créer des tas de formes comme ces autoroutes d’énergie qui nous ont fait voyager de monde en monde. Mais tu as raison, ce n’est peut-être pas important.

En tout cas, J’ai l’impression que nous avons quelque chose d’important à faire ici et là-bas. Je ne saurais vous dire quoi exactement. J’ai vaguement compris que nous avions à chercher un objet, une sorte de sphère.

Sofia : Tu y crois vraiment à ces trucs ?

Norman : Comme tu le sais à la base je ne suis pas croyant mais Magda m’a raconté l’histoire du lotus avec toi et Marje ; et il se trouve qu’en quittant Lourdes Marje m’a dit quelque chose qui m’a bouleversé.

Regardant Marje,

- Je suppose que tu t’en souviens ? Tu m’as dit à l’oreille « ne t’inquiète pas pour tes plantes, leur énergie est bien vivace tout comme celle de ta maman, ta voisine en a pris soin., tu retrouveras un joli jardin fleuri à ton retour et ta maman va bien, elle s’en est occupée aussi ». A mon retour de France, la première chose que je vois c’est le jardin fleuri et ma voisine. »

Sofia : Pourquoi était-elle là ?

Norman : Ben ça, j’en sais rien d’autant que nous ne sommes pas vraiment amis. Je la vois peu souvent. Elle vient de temps en temps voir ma mère quand je pars pour 2 ou 3 jours. Ce qui est gentil parce que ma mère éprouve parfois de fortes douleurs articulaires et sa vue baisse de jour en jour. Mais je ne l’avais jamais vue biner la terre, son jardin ressemble plus à un joyeux fouillis qu’à un jardin entretenu alors que le jardin de ma mère est un sanctuaire. Marje m’avait seulement dit qu’elle s’était occupée de ma mère et du jardin. Il s’est avéré que ces deux affirmations étaient vraies. Et en arrivant, ma voisine me dit ce que je savais déjà.

Marje : Et elle a un prénom cette gentille voisine ?

Norman : Elle s’appelle Ondine.

Marje : Et cette Ondine a fait tout ça rien que pour les beaux yeux de ta maman ? Tu nous prends pour des idiotes..

Norman : Alors ça ! c’est typiquement une remarque de filles. Dis-moi plutôt comment tu arrives à faire ça, j’ai l’impression que tu es la seule à pouvoir voyager d’un monde à l’autre et à maîtriser l’Energie.

Marje : Je n’en sais rien. Pour l’instant, je ne maîtrise absolument rien, pas même mes pensées, ce monde nouveau pour moi fait irruption dans ma vie quand bon lui chante. J’ai plus l’impression pour l’instant de suivre le mouvement que de l’initier. Tout ça est bien mystérieux et opaque. Aucun mode d’emploi ne m’a été livré dit-elle en souriant.

Norman : En tout cas, j’ai compris certaines choses au cours de mon dernier voyage. C’est que Marje a une espèce de pouvoir lié aux énergies et comme tout est énergie sur cette Terre, tu disposes d’un grand pouvoir et Sofia, tu as une espèce de relation spéciale avec les mots. Les mots prononcés dans n’importe quelle langue ne semble pas avoir de secrets pour toi. Nous aurons besoin de ce que vous êtes pour mener à bien les combats qui nous attendent.

Sofia : Mais d’où sors-tu toutes ces histoires ? et puis, pour mener des combats comme tu dis, il nous faudrait une espèce de super guerrier non !

Norman : Justement, c’est là que je voulais en venir. Environ deux semaines après mon retour, au cours d’un dîner, ma mère me questionne sur mon séjour à Lourdes. Elle me demande si je me sens mieux et si mes idées sont plus claires à présent. Ensuite, passant du coq à l’âne, elle me demande si j’avais rencontré là-bas, le maître de l’Energie. En moi-même j’ai pensé qu’à bientôt 80 ans, ma mère devait être atteinte de démence sénile et je laisse cette information en suspens. Sauf que le soir même, je voyage dans vos rêves et je comprends que le maître de l’Energie est une femme et que cette femme est Marje. Ensuite, on te montre te baladant dans un royaume, je comprends que c’est ton royaume mais que tu dois trouver une espèce de clé pour y entrer ; cette clé se trouve quelque part sur Terre mais un obscurant fait tout son possible pour te rendre aveugle.

Sofia : Mais oui c’est ça. Dans mon rêve, tu créais des ponts d’énergie qui nous permettaient de voyager d’un monde à un autre. Je me souviens maintenant.

Marje : Le père Stanislas m’a parlé de ces obscurants, des entités de l’ombre dont le seul but est de maintenir l’humanité dans la peur, la haine, la violence et l’ignorance.

Marje et Sofia regardèrent fixement Norman. Brisant le silence, Sofia déclara « c’est donc toi le narrateur, celui qui voit et qui raconte. Tu es le passeur de temps.

Marje : Tout ça c’est bien joli mais moi suis juste une libraire et même si je commence à y croire, je me sens totalement démunie et seule. Pourquoi, ils m’aident pas là-haut ou là-bas, ceux de l’autre monde ?

Norman : Fie – toi à ton 6ème sens. Il est notre plus fidèle allié et pas que dans la vie de tous les jours.

Marje : Que veux-tu dire ? Déjà à Lourdes, tu nous parlais de ce fameux 6ème sens.

Norman : Après tout ce qui nous était arrivé… Lourdes, ma mère dont je découvre une part d’elle qui m’était totalement inaccessible, j’ai nourri certaines pensées avec l’idée que notre 6ème sens était plus qu’une boussole nous permettant de faire tel ou tel choix à un instant t, il était en plus comme un réservoir de temps. Le temps présent est celui dont nous avons conscience et sur lequel nous pouvons agir mais qu’en est-il du passé et du futur. Tout le monde a déjà fait l’expérience de pénétrer dans un endroit supposément inconnu et de se dire « mais je suis déjà passé par là ou je connais cet endroit ; il m’est même arrivé de rencontrer une amie de mon ex-femme que je ne connaissais pas et de me dire au bout de quelques minutes qu’elle était malade et qu’elle allait mourir.

Sofia : Et alors ?

Norman : Elle est décédée le mois suivant. Moi, je crois que notre 6ème sens nous permet de lire notre passé et de penser notre avenir ; La décision que nous prenons à un instant t est pour moi juste la résultante des informations du passé combinées à celle du présent tout en tenant compte de l’avenir qu’on s’est choisi. Toutes ces informations diffuses ne sont pas présentes à notre conscience mais elles sont là , stockées dans notre 6ème sens.

Marje : Tout ça c’est bien philosophiquement parlant mais dans notre présent là tout de suite, en quoi cela va-t-il nous aider ?

Norman : Tu me poses toujours un tas de questions pour lesquelles je n’ai aucune réponse. Si tu pouvais juste écouter et dépasser le cadre strictement terrien et carré de ta vie, tu pourrais peut-être découvrir de nouvelles choses, non pas parce qu’elles sont visibles et explicables mais juste parce que ton 6ème sens auquel tu te réfères souvent te dit qu’elles existent même si ces évidences te dérangent.

Sofia : Pourquoi nous parler aujourd’hui de ce 6ème sens ?

Norman : Ce que j’essaie de dire dit-il en prenant la main de Sofia c’est que la raison pour laquelle j’arrive à voyager dans vos rêves réside dans le fait que je me suis rendu compte que j’avais la possibilité de me connecter à vos réservoirs de temps.

Sofia : Comment ça ?

Norman : Je ne saurais pas l’expliquer mais dès que je suis dans une Eglise et j’y vais souvent avec ma mère, je pars dans « les rêves , je me connecte aux réservoirs de temps » de quelqu’un d’autre , ce peut-être des personnes familières comme vous ou simplement la personne qui est entrain de prier à côté de moi.

Sofia : Et tu endures ça depuis un an !

Norman : J’ai appris depuis à apprivoiser ce don grâce à ma mère.

Sofia : Ta mère est une femme un peu particulière non ?

- Elle soigne par les plantes ; je l’ai vue guérir quantité de pathologies pour lesquelles la médecine traditionnelle ne proposait aucune solution.

Magda : C’est pour ça !

Norman : C’est pour ça, quoi !!!

Magda : Qu’elle était si documentée sur la façon de prendre soin de mes rosiers et des plantes en général.

Norman : Oui mais comme tu le sais, ça fait des années qu’elle ne peut plus lire.

Magda : D’où sort-elle toutes ces connaissances alors ?

Norman : Une entité, gardienne des ingrédients de vie vient lui parler dès que ma mère a besoin d’elle. Mais de quoi parles-tu Magda, ma mère ne t’a jamais rencontrée ?

Marje imperturbable ajouta : « As-tu déjà assisté à l’une de leur rencontre ? »

Norman sourit en regardant tendrement Marje et comprit que sa soif de connaissances était sans limite et c’est bien ça qui faisait d’elle ce qu’elle était Ici et Ailleurs dans ce monde opaque et mystérieux.

-Non, Marje, je n’ai jamais assisté à l’une de leur rencontre comme tu dis.

Marje : Dommage !! Je me sens bien seule avec toutes mes questions sans réponse.

-Tu n’es pas seule.. Nous sommes là, nous, le club des 5…dit Norman en riant.

Tous les trois se mirent à rire.

Marje : blague à part…par où commencer ?

Norman : ça, je n’en sais rien ; ils sauront bien nous le faire savoir. Ah oui, j’oubliais ! Il existe un passage quelque part sur Terre. Un passage reliant notre monde au tien.

Marje : Mais où ? c’est vaste la Terre !!

Norman : Je ne sais pas vraiment. On m’a montré un endroit qui pourrait ressembler à Jérusalem. Enfin, je n’y suis jamais allé. J’y ai vu des synagogues mais ce n’est pas le seul endroit à en posséder je suppose.

Ils passèrent le reste du dîner à plaisanter et à rire. Norman s’en alla vers minuit, il reprenait la route vers 14h demain.

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