Chapitre 5
Jorys sort de mon bureau avec en sa possession le numéro de téléphone de Sanchez m’assurant de faire le nécessaire de son côté. Je prends ensuite quelques minutes pour peaufiner les derniers détails de la mission et me dirige sans plus attendre vers le club.
Et sans surprise, comme tous les soirs, il est bondé.
Je passe devant la longue file d’attente et ignore les regards curieux. David, le videur ce soir, m’adresse un salut de la tête et me laisse entrer. Une agréable chaleur m’accueille quand je pose les pieds à l'intérieur. Je me fraye un chemin parmi les tables et la foule qui commence à s’amasser. C’est avec un soulagement non feint que j'arrive au bar et prends place sur le dernier siège libre.
— Hey Catelyn ! siffle une voix aiguë de l’autre côté du comptoir.
Je tourne la tête et pose les yeux sur une chevelure bleue turquoise dont le propriétaire me fait de grands signes de la main. Ce à quoi je réponds par un franc sourire. Je l’observe s’empresser de servir une jeune femme et orienter gentiment le prochain client vers un autre serveur qui n’est autre que Thomas, avant de se rapprocher de moi.
— Je suis contente de te voir.
Elle récupère un verre derrière le bar et le remplit d’un double cognac avant de le glisser vers l’homme assis à mes côtés. Elle s'arrête dans son mouvement et plisse les yeux.
— Tu as l’air fatigué.
Elle termine de servir un autre client et s'arrête finalement devant moi.
Rose travaille au club depuis deux ans maintenant et alterne entre son travail ici et sa passion pour le DJing dans un autre établissement en ville. Les jours où elle est là, comme aujourd’hui, je viens discuter avec elle. Enfin, discuter… je l'écoute surtout bavarder. Elle me tient au courant des derniers potins du club, et je feins la surprise, comme si je l’apprenais à l’instant. J’aime l’écouter parler, mais si je reviens, c’est pour ses points de vue. Elle a encore cette vision innocente et optimiste du monde, que j’envie. C’est agréable de parler avec quelqu’un que cet endroit n’a pas encore corrompu.
— Longue semaine, dis-je tout simplement.
Elle a une moue dubitative mais j'enchaine avant qu’elle ne se mette à me poser plus de questions.
— Bleu ? dis-je en montrant du menton ses cheveux.
Visiblement, la coloration est une autre de ses passions, à en juger par les teintes qui changent à chaque fois que je la croise. Aujourd’hui, du bleu. Étonnamment, ça se marie bien avec les tatouages qui recouvrent tout son bras gauche.
— T’as vu ! ça déchire n’est-ce pas ! dit-elle en faisant un tour complet sur elle-même.
Son enthousiasme est si contagieux qu’il m’arrache un sourire. Je me souviens encore de la fois où j’ai dû la menacer de lui couper les cheveux avec des ciseaux pour qu’elle me laisse enfin en paix, à force de trop vouloir me les colorer aussi. J’aime le noir corbeau de mes cheveux, et encore plus le fait qu’ils demeurent intacts. Ma mère le portait avec une magnificence que je lui enviais, et c’est l’un des seuls traits que j’ai en commun avec elle.
En six ans, mon corps a changé. Je ne suis plus la gamine rebelle qui exaspérait les sœurs à l’orphelinat. Ma manière de voir le monde aussi. Et le moins qu’on puisse dire, c’est que ça a changé. Je savais que des choses inimaginables s’y tramaient, mais aucune de mes suppositions n'égale ce qui est devenu mon quotidien. J’étais encore moins préparée à en devenir un acteur majeur.
— Et qu’est-ce qui te rend si heureuse ? dis-je en observant ses yeux pétiller encore plus qu’à l’accoutumé.
— Je pensais que tu n’allais jamais me le demander.
Elle se penche vers moi, et murmure comme une confidence.
— J’ai créé un nouveau cocktail.
Elle se redresse et passe un coup d'œil dans la salle. Je suis son regard et repose mon attention sur elle. Rose semble être ravie de ce qu’elle voit.
— Devine quoi ?
Je ne prends pas la peine de le faire parce que je sais qu’elle me le dira sans tarder.
— Il déchire ! Tous ceux qui y goûtent en redemandent.
Elle trépigne d’excitation. Dans le même élan, elle attrape un verre à cocktail sous le comptoir et enchaîne des gestes si rapides que j’ai du mal à suivre. Une fois son œuvre achevée, elle dépose devant moi une mixture à la couleur unique. À la surface, un rose éclatant ; à l’intérieur, un violet profond qui, par moments, semble virer au vert sombre, presque noir.
— Goûte, lance-t-elle, fébrile.
J’observe le mélange avec méfiance pendant quelques secondes.
— Allez, goûte ! s’impatiente-t-elle.
Je relève les yeux du verre et les pose sur elle. Son regard déborde de fierté, d’attente et d’impatience mêlées. N’ayant aucune envie de la décevoir, et malgré ma réticence, je porte enfin le verre à mes lèvres et prends une gorgée.
Aussitôt, je tousse.
— C’est... c’est super fort, peiné-je à articuler.
Ma gorge brûle et mes yeux s’emplissent de larmes. Pourtant, Rose ne perd rien de sa gaieté, bien au contraire.
— Allez, prends-en une autre ! Tu vas aimer.
Je suis toujours aussi réticente, mais tant qu’à faire, autant aller jusqu’au bout. Je m'exécute et prends une petite gorgée. À la troisième, je commence à apprécier. Passé le temps d’adaptation, c’est même excellent.
— Finalement, c’est pas si mal ton truc, Rose, dis-je en vidant mon verre.
Je lui tends mon verre, prête pour une autre tournée.
— Je te l’avais dit. Attends... "pas si mal", t’as dit ? répète-t-elle, faussement choquée. C’est carrément dément, oui ! Je bosse sur cette recette depuis un moment. Ça fait toujours cet effet-là au début, puis après, ça passe tout seul. Je devrais peut-être ajuster la recette avant de le proposer à la carte, histoire d’éliminer ce petit inconvénient.
Elle marque une pause, puis m’observe avec un regard plein d’espoir.
— D’ailleurs, en parlant de la carte… Catelyn ?
Je hausse un sourcil, délaissant un instant ce cocktail carrément addictif pour me concentrer sur elle.
— Ce n’est pas moi qui décide, et tu le sais, dis-je en comprenant sa demande avant même qu’elle l’ait formulée. Il faudra voir ça avec Éric.
Éric est le gérant du club. Un homme bien trop imbu de lui-même, avec, par moments, des accès d’acrimonie. Entre lui et moi, ça n’a jamais été l’amour fou. Notre dernière discussion s’est soldée par mon arme pressée contre sa tempe. Il s’en est fallu de peu pour que je lui colle une balle entre les deux yeux.
— Ouais, mais tu sais comment il est. Il n’aime pas qu’on lui fasse des suggestions et je ne veux pas qu’il s’approprie mon cocktail. Et…
— D’accord. Je lui en toucherai deux mots, la coupé-je net.
Une fois lancée, impossible de l’arrêter.
— Oh, merci, merci ! Je t’aurais bien fait un câlin, mais je sais que tu as horreur de ça.
Je termine mon cocktail et lui tends mon verre pour être resservie.
— Je ne te promets rien, la prévins-je avant qu’elle ne s’emballe.
— Tu n’as qu’à lui montrer ton arme, tu sais ! lance-t-elle à toute vitesse avant de s’éclipser vers un autre client, me laissant sans voix, sans même me laisser le temps de répondre.
Je détourne mon attention d’elle pour observer les alentours. Je parcours du regard la salle entière et me rend compte que nous avons fait du chemin.
Le club est vaste et soigneusement décoré. Il peut accueillir jusqu’à mille cinq cents personnes. L’éclairage est savamment dosé : assez tamisé pour ceux en quête d’intimité, mais suffisamment vif pour se tailler les ongles sans risquer de se couper. À mon arrivée, c’était différent.
Tout était différent.
Le mobilier était loin d’être aussi luxueux et confortable, et le coin VIP, situé au troisième et dernier étage, n’existait même pas. Un architecte et une décoratrice d’intérieur ont été engagés pour tout remodeler.
L’accès au coin VIP est dissimulé derrière un rideau transparent : invisible depuis les étages inférieurs et le rez-de-chaussée, mais offrant à ses occupants une vue imprenable sur l’ensemble du club. En dessous, les étages abritent des mini-salons avec des fauteuils rembourrés de plumes d’un oiseau dont je ne me rappelle plus le nom. Au rez-de-chaussée, une piste de danse circulaire trône au centre, animée par trois stripteaseuses au talent indéniable. Tout autour, à une distance raisonnable de la piste, des tables pour deux ou trois personnes accueillent des clients absorbés dans leurs conversations et leurs verres. Le bar se trouve à l’opposé de la salle.
L’endroit allie élégance et raffinement sans jamais sombrer dans l’excès sauf pour certaines occasions spéciales.
Je détaille distraitement les clients à moitié éméchés quand un frisson d’appréhension me parcourt.
Je n’ai pas besoin de me retourner pour savoir exactement qui se tient derrière moi.
— Tu ne devrais pas boire autant à la veille d’une mission aussi importante, ma belle, murmure lentement Vladimir.
J'ignore cette boule qui se forme dans mon ventre à chaque fois que je suis en sa présence, et je termine mon verre d'une traite avant de me tourner vers lui. Mais déjà, il me contourne et s’interpose entre moi et l’homme à ma gauche.
Le client le reconnaît instantanément. Sans attendre que Vladimir prononce le moindre mot, il se lève précipitamment et disparaît dans la foule, abandonnant son cocktail fraîchement servi.
Vladimir pivote vers moi et plante son regard sombre dans le mien. Il porte son costume noir habituel, assorti d’une chemise de la même couleur. Dans son regard, je décèle de la fatigue mêlée d’une pointe d’irritation, ce qui me met en garde quant au choix de mes prochains mots. Sa barbe est plus fournie qu’à notre dernière entrevue, et ses cheveux effleurent désormais le bas de sa nuque.
Vladimir est indéniablement un bel homme. À condition d’ignorer la noirceur et la perversité qu’il traîne dans son sillage.
— Je pensais que tu ne rentrerais pas avant demain, dis-je en me redressant complètement, soudain hyper consciente du moindre souffle.
Il effleure la bordure de mon verre du bout de son index, le seul dénué de bagues, feignant la réflexion.
— J’ai changé d’avis, dit-il.
Sa voix est basse et étonnamment posée.
— Je voulais constater moi-même l’état dans lequel tu es ce soir.
Toujours sans détourner son regard du mien, il effleure mes cheveux, replaçant quelques mèches derrière mon oreille.
Je verrouille la porte à chaque émotion qui menace de transparaître et me plie à son jeu. Il sait combien je déteste être touchée, surtout par des gestes qui évoquent une intimité que lui et moi ne partageons pas. Son regard s’intensifie à mesure que ses doigts explorent mes cheveux. Il cherche à s’immiscer dans mon esprit, à jauger les limites de ma patience et à voir si je suis toujours maîtresse de mes émotions.
Ce jeu pouvait durer toute la nuit.
Je ne suis plus l’adolescente farouche et imprudente qu’il a arrachée à son ancienne vie. Je suis parfaitement consciente des enjeux et de la mise… et surtout, je sais comment y gagner.
— Je suis au courant du cadeau que tu lui as fait parvenir, dit-il, son ton restant impassible. De petits bonbons enrobés de sucre et incrustés de gomme… Comme c’est attendrissant.
Je referme un peu plus fort cette porte intérieure qui menace de céder et force ma respiration à rester régulière.
— Tu pensais que je ne le saurais pas ?
Un tic contracte sa mâchoire.
J’ai pris le risque en priant pour qu’il ne le découvre pas.
Une énième prière vaine.
— Elle ne sait pas que c’est moi. J’ai… rien ne peut relier ce cadeau à moi. J’ai pris mes précautions, dis-je, tentant de garder le contrôle de ma voix.
Vladimir continue son geste dans mes cheveux, mais la légère raideur de ses doigts ne m’échappe pas. Il m’observe encore quelques secondes. Je suis incapable de deviner ses pensées et redoute les mots qui s’apprêtent à franchir ses lèvres.
Il s’arrête net et retire sa main de mes cheveux.
— Toi et moi, ma belle, dit-il en se redressant de toute sa hauteur, avons un accord concernant ta sœur. Ne me donne pas de raisons de le regretter.
Sur ces mots, il tourne les talons et disparaît dans la foule.
Je prends une profonde inspiration, réalisant soudain que j’avais retenu mon souffle tout ce temps.
L’anniversaire de Sandra est la raison pour laquelle j’ai été distraite toute la semaine, mon sommeil étant rare et hanté par des souvenirs qui me tourmentent. L’accord avec Vladimir m’accorde le droit de la voir une fois par an, sans jamais entrer en contact avec elle. Et chaque année, je choisis son anniversaire. Je lui ai fait parvenir ses bonbons préférés dans son nouveau foyer… du moins, si ses goûts n’ont pas changé après toutes ces années.
Comme je m’en doutais, Vladimir me fait surveiller. Pourtant, une part de moi ne peut s’empêcher d’être blessée en réalisant qu’il ne me fait toujours pas confiance.
Mais s’il y a bien une chose sur laquelle il a raison, c’est qu’il est imprudent de boire autant. Surtout ce soir. Une gueule de bois demain ne m’apportera que des ennuis.
Le cocktail de Rose est vraiment bon. Je ferai un effort pour en parler à Éric. Je finis mon verre et me redresse.
Du moins, j’essaie.
Aussitôt, je vacille et me rattrape de justesse à ma chaise. Je ne pensais pas avoir autant bu… Quatre verres, ce n’est pas tant que ça. J’essaie de me ressaisir, de mettre un pied devant l’autre mais plus facile à dire qu’à faire.
Mais soudain, une présence inconnue derrière moi déclenche mes réflexes.
— Un pas de plus et je te castre avec mon verre, lâché-je en avançant la main vers lui.
Dans ma tête, ça sonnait bien plus menaçant. Ma voix me semble trop lente, trop lointaine, comme si elle résonnait dans un tunnel. J’ai l’impression de parler au ralenti.
— Ce n’est que moi, dit une voix posée, que je reconnais immédiatement et dans laquelle je note l’absence de frayeur que mes mots ont pu provoquer chez plus d’un.
Pourtant, il recule d’un pas, emportant avec lui sa chaleur.
— Je n’ai aucune intention de te faire du mal. Laisse-moi te ramener, Catelyn.
Suis-je à ce point mal en point pour que mon état hurle au secours ? L’idée m’agace encore plus que mon état lui-même.
— Je peux rentrer toute seule, Adrian.
Je tente de le contourner, mais chaque pas me semble interminable. Ça s’annonce compliqué. Je me dirige vers la sortie, essoufflée après seulement quelques mètres. Qu’est-ce que Rose a bien pu mettre dans ce cocktail ?
Je capitule et m’arrête net au milieu de la foule. Adrian manque de me heurter de justesse.
— Quitte à me suivre comme mon ombre, autant me raccompagner, maugréai-je.
Il ne répond pas et se rapproche. Il glisse une main sous mon bras, et je l’utilise comme appui. Ça fait du bien de s’appuyer sur quelqu’un, pour une fois.
— C’est Ricky qui t’a envoyé me surveiller ? Il aime se comporter comme mon garde du corps, parfois, dis-je, désapprobatrice.
On progresse tant bien que mal jusqu’à une file menant vers la sortie.
— Je ne crois pas qu’il m’apprécie assez pour me confier cette tâche, dit-il.
Il me faut un moment pour percuter. En plus de tout l’alcool que j’ai ingurgité, notre proximité ne m’aide pas vraiment.
— Hmm… Pourquoi il ne t’aime pas ?
Nous finissons par sortir, et je m’arrête un instant pour savourer la fraîcheur de la nuit. Je sens le regard persistant d’Adrian sur moi. Quand j’ouvre les yeux, sous la lumière des réverbères, je réalise à quel point nous sommes proches.
Cette proximité ne me gêne pas. Au contraire, je me rapproche encore un peu plus. Son parfum me chatouille les narines et la chaleur de son corps m’enveloppe, formant un rempart contre la fraîcheur nocturne.
— Je ne sais pas. C’est juste une impression.
J’acquiesce simplement. Nous nous fixons un moment et, quand son regard devient trop insistant, je détourne les yeux.
— Tu es triste.
Il lève une main vers mon visage, mais je me dérobe à son contact et me remets en marche.
— Je ne suis pas triste. J’ai trop bu, ça me fait toujours cet effet-là.
Le meilleur mensonge est toujours celui qui contient une part de vérité.
— Ou bien ça fait ressortir la partie de toi que tu t’efforces d’enterrer.
Il me rejoint, et nous marchons un moment en silence avant que je ne reprenne :
— N’essaie pas de m’analyser, Adrian.
Je marque une pause avant d’ajouter, plus bas :
— Et au fond, ne sommes-nous pas tous tristes ?
Je fais un geste ample, désignant le club d’un mouvement de bras.
— Regarde où nous sommes. Un endroit où certains viennent pour oublier leur vie merdique et où…
Je m’interromps juste à temps. Adrian me fixe, attendant la suite.
— Laisse tomber. Je suis bourrée, je dis n’importe quoi.
Il n’insiste pas, et nous reprenons notre marche en silence. Quelques minutes plus tard, sa voix s’élève doucement :
— Où se trouvent tes appartements, Catelyn ?
Je tourne la tête vers lui, plissant les yeux.
— Tu veux monter dans ma chambre ? dis-je, troublée.
Un éclair d’incompréhension traverse son visage avant que ses yeux ne s’agrandissent d’horreur.
Au moins, ça a le mérite de me désaouler instantanément.
— Quoi ? Je… non. Pas du tout, bafouille-t-il.
Je roule des yeux et souffle d’agacement.
— Respire un coup, je rigole. Mais ça fait plaisir de voir à quel point je te répugne, dis-je avant de le contourner et de me diriger vers les portes du Centre.
J’espérais un ton plus léger, mais mes mots sortent sec et tranchants. J’entends ses pas précipités derrière moi, mais je n’y prête aucune attention.
— Je ne voulais pas… commence-t-il avant d’être interrompu.
— Adrian !
Nous nous retournons d’un même mouvement pour découvrir Ricky juste derrière. Je me demande d’où il sort, je ne l’ai même pas entendu arriver.
— Je vais la ramener, dit-il. Tu peux t’en aller.
Adrian se tourne vers moi, légèrement irrité, et me fixe attendant mon approbation. Je le lui donne, résignée. Il se retourne vers Ricky, acquiesce, puis disparaît dans la nuit.
Je reste figée un instant, le regard perdu dans le sillage d’Adrian, n’entendant pas les pas de Ricky se rapprocher. Son départ me laisse une sensation étrange de vide.
— Qu’est-ce qui t’a pris de boire autant, putain ? fulmine Ricky à ma hauteur.
— Es-tu là pour me raccompagner ou pour me faire la leçon ? répliqué-je, agacée qu’il ait interrompu ma conversation avec Adrian. J’étais bien, avant que tu n’arrives.
Ricky m’observe, un demi-sourire faussement dédaigneux aux lèvres.
— Bien ? On aurait plutôt dit un couple qui se dispute.
Je me contente de lever deux majeurs bien hauts dans sa direction avant de me détourner pour entrer dans le Centre.
Un rire étouffé me parvient, ce qui m’arrache un sourire, mais je ne ralentis pas pour autant.
— Tu me remercieras demain, lance-t-il sur mes talons. Quand tu te rendras compte que je t’ai empêchée de dire ou faire une connerie.
Il ne se doute pas que ma promenade improvisée avec Adrian en est déjà une.
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