Chapitre 1

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Romane regardait par la fenêtre. Les rues de Ste-Marie-de-L'espérance étaient animées en ce dimanche de mai, malgré la température incertaine. La jeune fille aurait été enchantée de se joindre aux gens qui parlaient sur la place principale, dont elle avait la vue de sa chambre. Malheureusement, elle n'en avait pas le droit. Elle était privée de sortie.

Tout cela était la faute de Xavier Marcotte. S'il ne l'avait pas poussée dans le ruisseau de la cour d'école, elle ne se serait pas battue avec lui, c'est tout, songeait-elle.

Si seulement elle n'avait pas autant de devoirs à faire... Elle aurait probablement pu convaincre sa mère de la laisser sortir l'espace de quelques minutes, seulement pour lui permettre d'apprendre les dernières nouvelles.

— Maman dit qu'il faut que tu descendes pour les aider avec le magasin.

Romane sursauta. Elle n'avait pas entendu son frère entrer.

— Dis lui que j'ai trop de devoirs.

— T'as pas ben l'air de faire tes devoirs...

— Argh Louis ! T'es ben gossant ! J'allais m'y mettre, là !

— Ben ok. De toute façon, j'suis pas ton messager. Va lui dire toi-même.

Il quitta la chambre. Romane soupira. Son frère, Louis, était vraiment agaçant ! Il avait trois ans de moins qu'elle et passait son temps à trouver des nouvelles façons d'énerver les gens, en tout cas selon elle.

Bien à contrecœur, elle quitta son poste d'observation pour demander un sursis à sa mère.

Les Tremblay possédaient un petit magasin général depuis maintenant une dizaine de générations. Comme presque tout dans le village, il était resté dans un style vieillot des années 50. Romane se disait parfois qu'elle aurait préféré grandir en ville, à son époque, plutôt que dans ce village encore dans l'ancien temps.

En entrant dans le magasin, elle vit Stephanie, sa mère, qui portait une haute pile de caisses de bois et chancelait sous son poids.

— Romane ? Vient m'aider, s'il te plait.

La jeune fille prit quelques caisses du dessus de la pile de sa mère pour la soulager un peu.

— Où est-ce qu'on doit les amener ?

— Sur le comptoir, ce sera correct.

Une fois les caisses posées, les deux purent souffler.

— Où est papa ?

— À la ferme des Bouchard.

— J'aurais pu y aller, moi ! Ça m'aurait pas dérangée...

— Oh non ! T'es punie, j'te rappelle, Romane Tremblay. Pis c'est loin, à pied.

— Si on avait une voiture...

— Tu pourrais pas la conduire, anyway. Faque viens m'aider.

Ce n'était pas tant que Romane adorait la marche, mais elle aurait de loin préféré aller voir son amie, Sarah, à la ferme, que de travailler bénévolement pour le magasin.

Stéphanie commença à ranger le contenu des caisses da les étagères derrière le comptoir, et, d'un regard, incita sa fille à faire de même.

— Ok, je peux t'aider un peu, mais pas longtemps. J'ai des devoirs.

— T'as des devoirs quand tu dois m'aider, mais t'en aurais pas pour aller chez Sarah Bouchard. T'es drôle, des fois.

Pour couronner le tout, Louis entra à ce moment-là par la porte principale.

— M'man, j'peux aller souper chez Alexis ?

— Non, répondit-elle après un moment d'hésitation. On est dimanche, vous avez de l'école, demain.

Romane adressa un sourire moqueur à son frère. Il y avait tout de même une certaine justice, dans ce monde.

— J'ai faim, repris Louis, geignard.

— La soupe est prête, il reste juste à la faire chauffer. Viens m'aider, Louis. Romane ? Tu peux fermer le magasin, s'il te plait ?

La jeune fille grimaça. C'était la spécialité de sa mère, de donner un flot d'ordre sans même savoir s'ils convennaient aux gens. Elle alla néanmoins tourner l'affichette "ouvert" au côté "fermé". Puis elle ferma la porte à clé.

Lorsqu'elle monta à l'appartement, sa mère versait déjà les bols de soupe.

— Bon, votre père mangera quand il reviendra.

— Ouais. Heille maman, demain on va devoir choisir notre légende pour notre projet d'équipe ! lança Romane, sous l'inspiration du moment.

— Ah ouain ? Ce serait ben cool que vous en choisissiez une du village... Mais c'est p'tête pas assez "moderne" pour vous ?

Romane secoua la tête, agacée. Puis elle se résolut à écouter Louis raconter ce qu'il avait fait avec Alexis pendant l'après-midi.

Lorsque Romane s'endormit, ce soir-là, elle était loin de se douter qu'elle serait bientôt plongée au coeur d'une légende.

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