Chapitre 54 : Le prix de ma valeur

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Après ces confessions, ils reprennent leur footing pour finir leur boucle, toujours sous la houlette de Quentin, décidé à montrer le chemin à Manuella. À leur arrivée à la villa, ils retrouvent le clan d’Erwann en train de faire des jeux de société dans un des salons. Les participants sont dispatchés en deux équipes, sous le contrôle de Richard, qui se fait aussi arbitre à ses heures perdues. Anthony, qui a passé une excellente nuit entre ses bras, se montre de meilleure humeur et prend la tête avec son équipe. Enthousiaste et joueur, il s’éclate à massacrer ses adversaires et a remporté victoire sur victoire depuis tout à l’heure.

Debout, l’épaule posée contre un mur, son père l’admire du coin de l’œil. Il n’a pas encore osé avoir une vraie discussion avec lui, inquiet à l’idée de le déranger, mais passe beaucoup de temps à l’observer et à l’analyser. Et Anthony, avec son âme de gagnant et sa volonté de se hisser au-dessus du lot, lui rappelle le jeune homme qu’il était lui-même à son âge.

Seules manquent à l’appel Manon-Tiphaine et Clara qui ne sont pas encore descendues prendre leur petit-déjeuner. Erwann ne s’en inquiète pas, persuadé que les deux adolescentes ont trouvé une meilleure façon de se réveiller. Et vu le malaise qu’il ressent à cette idée, ce n’est certainement pas lui qui ira les déloger de leur chambre, sous peine d’entendre encore des bruits explicites qui vont le traumatiser. Il se fait la réflexion que s’il entendait Anthony en pleins ébats avec sa dulcinée, cela ne lui ferait, en revanche, ni chaud, ni froid. Mieux, allez savoir pourquoi, il trouverait ça formidable et serait fier de lui.

Cette pensée le met mal à l’aise. Lui qui s’est toujours perçu comme un père féministe, défenseur de la cause des femmes, ne serait-il pas finalement qu’un gros con ?

À leur retour à la villa, voyant la bruyante animation qui règne dans le salon, Manuella propose à Quentin de se mettre à l’écart, pour prendre un café ensemble. Elle prétexte en avoir besoin pour se remettre de son footing improvisé et reconnait ne pas avoir l’habitude de courir autant, surtout en pleine nature et surtout entourée de cet air marin aussi oxygénant qu’exténuant. Il accepte volontiers la suggestion et propose de les leur préparer. Elle en profite pour aller s’installer sous un barnum chauffé, encore déserté en cette fin de matinée. Là, en l’attendant, elle recoiffe ses cheveux, mouillés de transpiration, à l’aide de sa main, et attend, fébrile, que Quentin la rejoigne...

Il arrive les bras chargés d’un plateau contenant cafés, verres d’eau, jus de grenade, fruits frais et quelques viennoiseries survivantes du petit-déjeuner. Manuella est bluffée et s’extasie, ce qui ravit Quentin, heureux d’avoir fait mouche. Dans un coin de sa tête résonne encore le seul et unique conseil que Gwendoline lui a donné la veille : traiter Manuella comme une princesse. C’est sûr que c’est un peu à l’opposé de ce qu’il avait l’habitude de faire avec les femmes qu’il rencontrait par le passé.

Mais ce temps est révolu et le café est ma nouvelle boisson préférée !

Ne voulant pas laisser de blanc s’installer entre eux, Manuella, revigorée par son breuvage chaud, se lance :

— J’imagine que tu n’as pas de book sur toi, pour me montrer ton travail de tatoueur.

— Non, effectivement. Mais j’ai un site en ligne où une partie de mes œuvres sont exposées.

Manuella saisit la perche tendue et lui demande de le lui montrer, ce qu’il s’empresse de faire dans la foulée. Il sort son téléphone et fait défiler ses plus belles pièces, en couleurs, ou en gris et noir. Elle lui indique qu’elle a une préférence pour ces dernières et qu’elle aimerait se faire tatouer prochainement. Pour prouver ses dires, elle sort à son tour son smartphone et fait apparaître un dessin sur l’écran. Il s’agit d’une inspiration qu’elle a trouvé sur Pinterest et dont elle souhaiterait un motif similaire.

— Tu saurais faire quelque chose comme ça ?

— Bien sûr, répond-il en souriant, c’est mon métier.

Ben oui, quelle cruche d’avoir demandé ça !

Cherchant à se rattraper, Manuella demande aussitôt :

— Comment cela se déroule ?

— J’ai besoin que tu me donnes l’emplacement et la taille. Ensuite, à partir de ton inspiration, je te refais un dessin, propre à mon style. Si ça te convient, on attaque la première séance. Si le dessin ne te convient pas, je le retravaille.

— Et pour le budget ? Si je veux faire tout le haut du dos, avec un énorme papillon, en noir et gris, mais avec des traits pas trop épais, cela chiffrerait à combien à peu près ?

Professionnel, Quentin réfléchit quelques instants avant de répondre :

— Si tu ne veux pas de gros traits, on peut partir sur une pièce en dot, c’est-à-dire, en pointillés. L’avantage c’est que c’est moins douloureux, plutôt pas mal pour un premier essai, si tu ne connais pas ton niveau de tolérance à la douleur. L’inconvénient c’est que c’est assez long. Pour la surface à couvrir, ça nous prendrait deux ou trois séances, entre douze et quinze heures je dirais, tout dépend de ton degré de résistance à la souffrance.

Passer beaucoup de temps en tête à tête avec lui, en train de toucher sa peau pendant des heures, un inconvénient ? Elle en doute fortement. Enthousiaste et concentrée, elle boit ses paroles avec plaisir, papillonnant des cils sans s’en rendre compte. Puis déclare :

— Tu ne m’as pas donné le prix.

— J’ai besoin de nouveaux modèles à exposer sur la devanture de ma vitrine. Puisque tu as l’air d’avoir un dos très photogénique, si tu me laisses te tatouer et te mettre en photo pour la boutique, sur le magasin et sur internet, je ne te demanderai rien.

Elle rougit sous le compliment. Voilà que tous ses cours de fitness ont payé : elle a un très beau dos. Il faut dire qu’hier, elle l’avait mis en valeur dans une tenue dévoilant la majeure partie de celui-ci, ce qui, apparemment, n’a pas échappé à Quentin. De plus en plus confiante à côté de ce bel homme, elle poursuit ses questions pour marquer son intérêt :

— Une pièce comme ça, cela irait chercher dans les combien à peu près ?

— Pour un projet entre douze et quinze heures, compte entre 1200 à 1500 euros.

— Wow. Et tu m’en ferais cadeau ?

— Bien sûr. C’est normal puisque tu serais mon mannequin.

Mannequin ? Ah ouais mais là, il lui sort la brosse à reluire ! C’est vrai qu’elle est très belle et qu’elle le sait, et que ses mensurations sont parfaites et attractives, mais mannequin, il a vraiment envie de la flatter là... Pour autant, elle ne joue pas la modeste en lui disant qu’il exagère. Au contraire, elle se prend au jeu des confidences sur leur métier et décide de lui parler du sien :

— Tu sais que je suis hôtesse sur les salons et congrès.

— Cela ne me surprend pas du tout avec le physique que tu as. D’ailleurs, je cherche souvent des hôtesses pour gérer les nombreuses conventions auxquelles je dois participer dans l’année. Certaines ont lieu dans le coin, mais parfois cela se déroule sur toute la France, et même, de temps en temps, à l’étranger. Tu pourrais faire partie de ma team. C’est très bien payé. Pour un week-end sur le secteur Bretagne, tu peux gagner jusqu’à mille euros, même si, à mon humble avis, tu vaux beaucoup plus que ça.

Waouh... et bien en voilà un qui sait parler aux femmes... Seigneur, mais retenez-moi, je vais le bouffer !

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