Chapitre 14

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Ecrit en écoutant notamment : A*S*Y*S – Bassturbation [Hard Dance]


Dans le bus qui nous conduit vers la préfecture du Bas-Rhin, nous faisons un point sur ce début d’année, et il me redemande quel sujet je devrai présenter en cours d’anglais. J’ai envie d’attiser sa curiosité et lui réponds qu’il verra bien lundi, mais devant son insistance, je finis par me rendre compte que si je présente le thème de l’homosexualité en ayant absolument voulu préserver le mystère, je risque fort de me confondre. Je consens donc à lui répondre, en précisant que finalement, mon sujet n’a rien de si extravagant :


— Je vais seulement vous parler de comment l’homosexualité peut à la fois persister au fil des générations, et posséder quand même une part de génétique. C’est assez contre-intuitif, non ?


Il prend quelques secondes pour réfléchir, puis déclare :


— Ah ouais, c’est vrai que je n’y avais jamais réfléchi sous cet angle-là, mais ça a l’air très intéressant en tout cas, j’ai hâte !


Chose très positive, il n’a l’air d’avoir aucun problème à aborder le sujet; il semble même impatient de m’écouter ! Ce n’est visiblement pas le cas de la cinquantenaire assise deux rangées devant nous, qui nous lance des froncements de sourcils et un regard réprobateur, puis crache :


— Vous n’avez pas honte de parler d’un tel sujet comme ça, à la vue de tous ? Non mais, cette jeunesse, quelle décadence !


— Mais on parle de ce qu’on veut, depuis quand ça vous regarde ? rétorque mon ami.


— Sachez, jeune homme, qu’il est proprement outrageux de propager publiquement cette doctrine déviante !


Alors que j’ai toujours été habitué à son détachement à toute épreuve, mon ami monte d’un coup en pression :


— Non mais vous vous entendez, la vieille peau ? Vous savez ce que vous allez faire ? Vous allez monter dans une DeLorean, accélérer jusqu’à 88 miles de l’heure et disparaître en 1955, ça vous ira mieux !


Il se retourne en s’adressant plus calmement aux passagers :


— Qui est d’accord pour cotiser ?


Plusieurs mains se lèvent, et sentant une défaite cuisante se profiler, l’ignoble femme en question peste une dernière fois en remuant son index sous les moqueries :


— Bande d’ignares, la colère de Dieu va s’abattre sur la France !


Lilian me glisse plus tard, conscient de mon étonnement le plus total, alors que je le fixais depuis un moment :


— Ah, ça fait un bien fou de remettre les gens à leur place parfois ! Mais ne t’inquiètes pas, je ne suis pas homo ! Rien ne vaut une belle paire de seins ! Ah non, juste pas ceux de l'autre débile... Par contre, hier soir, Alexia… alors là… , termine-t-il en chuchotant et en s’humectant les lèvres. Je te raconterai plus tard !

Tant mieux, car je ne suis pas convaincu de l'utilité de la chose ! Nous arrivons vingt minutes plus tard à Strasbourg, et après quelques centaines de mètres le long des quais de l’Ill, nous atteignons ‘La Nouvelle Poste’. Nous y commandons chacun une pinte, et Lilian en profite pour me charrier :


— Eh ben, je croyais que tu ne buvais pas d’alcool, toi !


— Et oui, les temps changent ! Et puis, on est en Terminale maintenant, il faut bien se faire plaisir !


Au cours d’une discussion assez animée, nous en venons à discuter de nos sports respectifs et de nos objectifs pour la nouvelle saison, Lilian faisant du demi-fond trois fois par semaine. Par fierté, je lui annonce que notre club a réussi à « recruter » un nouveau joueur, un certain Morgan - oh mais quels frissons quand je prononce son prénom ! -, et que ça devrait nous permettre de régler nos problèmes d’effectif déficitaire : il fallait bien justifier le fait que je le mentionne ! Lilian semble intéressé et s’enquiert de son nom de famille. Quand je le lui donne, il s’écrie :


— Ah mais je le connais ! Enfin, ça fait longtemps qu’on ne s’est pas parlé, mais donc, apparemment, il a décidé d’arrêter le saut en hauteur pour le foot. On se voyait de temps en temps à la piste d’athlé. D’ailleurs, je crois que c’est son anniversaire samedi prochain, il faudrait peut-être que je lui envoie un petit message...


Merde ! Ce n’est sûrement pas la semaine prochaine que je vais pouvoir retourner chez lui ; je doute qu’un mec comme lui ait vraiment envie de travailler le jour de son anniversaire. Cependant, je remercie intérieurement Lilian de m’avoir informé. Ça me permettra de prévoir quelque chose pour l’occasion !


Le programme du dimanche est bien moins passionnant : Nathan et moi sommes réquisitionnés par nos parents pour tailler la haie qui délimite notre terrain. Tour à tour, nous devons jouer les équilibristes sur l’échelle en maintenant à bout de bras le taille-haie. Et là, je m’interdis formellement de penser à Morgan en même temps, je tiens un minimum à ma sécurité !

Nous terminons notre travail d’équipe après trois heures de ronronnement incessant, et profitons ensuite d’un repas copieux bien mérité, auquel succède pour ma part une délicieuse sieste, agrémentée de quelque plaisir charnel alimenté par d'affriolantes évocations de mon amoureux.


Le soir, avant d’aller me coucher, je me rappelle que, demain pour l’entraînement, ça serait intéressant de ramener mes affaires de douche. Le seul problème est que, soit je convaincs Nathan de faire de même, ce qui rendra la chose sûrement moins intéressante pour profiter de mon Morgan, soit je ne le préviens pas et il trouvera ça forcément curieux. Par ailleurs, si je ne joue pas de malchance, nous pourrions bien être seuls tous les deux, l’état partiellement délabré des douches du club incitant plutôt mes autres coéquipiers à rentrer directement chez eux pour pouvoir profiter de plus de confort.


Belle journée en perspective, même s'il faudra d’abord supporter notre professeur d’allemand mortellement léthargique...

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