BALAYER LES ROSES
de
Dami
"Il faut y aller !"
- Non !
- Ah si ! Il faut y aller. Tu l'as promis !
- Non ! Embrasse-moi.
- Je ne peux pas. Je ne suis plus là. Tu ne te souviens pas, j'ai laissé les clés sur le meuble de l'entrée. C'était il y a un mois. Lève-toi maintenant ! Il faut y aller."
J'ouvre enfin les yeux. Je suis effectivement seule dans le lit. C'est un lit pour deux et depuis quelques semaines, je dors au bord d'un abîme. Je peux tomber à tout moment. D'ailleurs, j'ai certainement plusieurs chutes à mon actif. Il faut se lever. J'ai promis. J'ai promis de ne pas me laisser aller. Je l'ai promis à tous ceux qui voulaient bien m'entendre. Je l'ai dit à la terre entière si ça se trouve.
Après tout, un chagrin d'amour n'est pas une fin en soi. Il faut juste se lever et marcher. J'ai été autorisée à pleurer à chaudes larmes pendant quelques jours. Je me suis recroquevillée sur mon lit et j'ai laissé parler ma souffrance. Cela n'a pas suffit. Je pleure encore. Je pleure devant mon ordinateur, ma tasse de café, dans le bus, sous la douche, face au miroir. Je suppose que j'ai explosé le forfait larmes autorisé. Mais tout devient matière à pleurer : l'absence, le silence, la fin d'un cycle et le temps qui passe. Je n'ai plus de grosses larmes. Elles sont fines et discrètes. Mon chagrin suinte désormais.
Evidemment, Rose est arrivée la première. Armée de mouchoirs, de patisseries et d'alcool, elle me prend dans ses bras. Rose est ma soeur jumelle. Elle est née quelques minutes avant moi. Ce droit d'ainesse lui a donné le rôle de précurseur. Son tempérament, ses opinions tranchées, sa générosité et ses éclats de rire m'ont permis d'avancer sans trop d'encombres. Rose deblaye, écarte les ronces, piétine les mauvaises herbes et d'un signe de la main elle me fait signe d'avancer sur un chemin que je sais désormais plus doux.
J'écoute Rose. Elle me raconte les histoires de ces femmes trahies et humiliées qui se sont redressées en se servant de leur souffrance comme d'un glaive. Ces femmes charmées par des astronomes du dimanche, des jardiniers soudains qui, après avoir remplis toutes les pièces de fleurs et de promesses sont partis sans penser à ramasser les fleurs séchées.
Rose me console. Elle arrange mes cheveux. Elle me fait rire et surtout elle me fait promettre que j'allais continuer à vivre. Nous parlementons. Je lui explique que je suis épuisée. Elle accepte ma faiblesse et l'idée que je fasse l'impasse pour un temps sur des projets d'avenir mais je dois lui promettre que j'allais me relever, regarder droit devant et recommencer à avancer.
"La vie n'est pas éternelle, Marie, me dit-elle, ne la gaspille pas.
J'ai promis.
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