L'ombre du mensonge 

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Le vent sifflait entre les branches, traçant des frissons glacés sur la peau d’Eron. Plus il s’enfonçait dans la forêt, plus le silence semblait épais, chargé d’un poids invisible qui comprimait sa poitrine.

Quelques heures plus tôt, Eron s’était arrêté dans une clairière, seul au milieu des arbres tordus. Alors il avait crié. Pas un cri de douleur — un cri de rage, brut, presque animal. Il avait hurlé le nom de son père, balancé des insultes dans l’air froid, comme si les sapins pouvaient comprendre son injustice.

Puis, le calme. Étrangement calme. Juste son souffle court et la brûlure de sa gorge. Il s’était senti vide, et dans ce vide, un seul réflexe : revenir au campement.

Le retour s’était fait à pas lourds, les yeux encore humides. Il avait franchi les premières toiles de tente sans adresser un mot à personne, croisé les regards inquiets sans y répondre. Dans un geste mécanique, il avait attrapé sa cape et une gourde, puis s’était glissé hors du cercle des feux, de nouveau attiré par cette chose qu’il ne pouvait pas nommer. Une tension au creux du ventre, un appel.

À quelques pas, une lumière vacillante dans l’ombre attira son regard. Une lanterne, posée à côté d’une énorme cage en fer, dissimulée derrière un rideau.

Il s’accroupit, l’œil collé aux barreaux. À l’intérieur, une silhouette repliée tremblait, à peine visible sous un voile de ténèbres. Lentement, la forme se redressa, dévoilant une peau d’un gris bleuté, parcourue de lignes sombres et scintillantes, presque comme une carte étrange gravée sur son corps.

Les yeux de la créature s’ouvrirent sur Eron. Grands, brillants, pleins de peur et de douleur. C’était un regard humain, pourtant tout en lui criait autre chose .

Eron sentit ses jambes fléchir. Il voulut détourner les yeux, mais le besoin de comprendre était trop fort. Ce n’était pas un animal. Ce n’était pas un monstre. C’était… un être vivant, fragile, piégé.

Derrière lui, un bruit sourd le fit sursauter. Garrick. Son père. Le visage fermé, les traits durs comme le roc.

— Qu’est-ce que tu fais ici ? Sa voix était un murmure, mais elle portait la menace d’une tempête.

— C’est quoi ? Eron désigna la cage du regard, incapable de masquer sa terreur et sa curiosité.

Garrick s’agenouilla à côté de lui, l’air fatigué, les épaules lourdes d’un secret qu’il traînait depuis trop longtemps.

— Des Anomalies. Il prononça le mot comme un poids. Des êtres nés d’expériences, de magie, ou de ce que tu veux, mais qui ne devraient pas exister.

— Pourquoi tu ne m’as rien dit ? La voix d’Eron se brisa, trahissant la déception et la colère. Pourquoi tu me caches ça ?

Le père serra la mâchoire, incapable de répondre immédiatement.

— Parce que tu n’étais pas prêt. Parce que cette vérité peut te détruire.

Eron détourna les yeux vers la créature, qui tendait une main tremblante vers lui. Il sentait la douleur et la peur dans ce geste, un appel muet à l’aide, à la compassion.

Son père posa une main ferme sur son épaule, un avertissement silencieux.

— Tu dois oublier ça.

Mais Eron ne voulait pas oublier. Pas cette fois.

Il fit un pas en avant, déterminé.

— Non. Je veux comprendre. Je veux savoir ce que tu fais vraiment.

Garrick le regarda, une fatigue infinie dans les yeux.

— Demain, tu resteras au campement.

Sans attendre de réponse, il se releva et s’éloigna, laissant Eron seul face à cette nouvelle réalité qui déchirait tout ce qu’il croyait savoir.

Les battements de son cœur résonnaient dans le silence de la forêt. La vérité, une fois découverte, ne pouvait plus être enfouie.

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