-Le temps est venu...

Une flamme apparut. Lévitant dans l’obscurité, elle révéla une table en bois dont la surface cirée refléta la lumière comme un cercle rougeoyant.

– Commençons.

Une voix de femme s’était élevée dans les ténèbres, alors que les pieds d’une chaise raclaient légèrement le sol de pierre. Une main blanche apparut dans le cercle de lumière, et, d’une inflexion du poignet, créa un mouvement d’air.

D’une étagère à peine distinguable, un parchemin s’extirpa d’une pile et et flotta pour se dérouler sur la table. L’odeur de la terre envahit les lieux pendant un bref instant, alors que quatre pierres plates et épaisses venaient en tenir les coins. L’ambiance lourde amplifiait les sons, et ils emplirent les coins de la salle.

Lorsqu’ils se furent atténués, à tel point que le silence en semblait assourdissant, plusieurs individus se rapprochèrent de la table. Aucun ne parla, cependant, attendant que la femme reprenne la parole. Le rayonnement du feu n’était pas suffisant pour éclairer leurs visages, et personne ne fit mine de s’approcher plus près. Il était néanmoins possible de distinguer trois silhouettes dans la pénombre.

Pendant un très long moment où tous les autres occupants de la pièce restèrent plus immobiles que des statues, leurs respirations à peine audible, la femme plongea son entière attention dans la carte que le parchemin avait dévoilé. Un monde bien différent de celui qu’elle avait fui. A la pensée de ce qu’elle avait perdu, son poing se serra de rage sur l’accoudoir de son fauteuil, ses ongles perçant le tissu et s'enfonçant dans le rembourrage. Son empire parfait arraché et détruit par cette maudite femme !

Forçant son esprit au calme, elle retourna ses réflexions sur le parchemin. Tout semblait avoir changé, les biomes auparavant mélangés maintenant séparés en trois régions distinctes. Comment l’homme les avait-il appelé déjà ? Se penchant légèrement en avant, elle entreprit de déchiffrer les écritures qui parsemaient la carte. Les Plaines d’Unys au Nord, le Désert d’Asraad au sud et les forêts de Forn à l’Est, juste sous les Monts Désolés qui séparaient ce nouveau royaume de leur terre d’exil.

Avec une moue dégôutée, elle se recula contre le dossier de son fauteuil.

– Sriver ! Appela-t-elle d’un ton autoritaire. Ton rapport.

L’homme s’avança, son corps entra dans l’îlot de lumière, mais pas son visage, n’était son menton étroit et pointu, ainsi que la balafre qui y courait.

-Nous nous sommes instillés dans suffisamment d’esprits et avons réuni assez d’informations, Prêtresse, déclara-t-il d’un ton révérencieux. L’armée est prête.

Un rictus étira les lèvres fines de la femme. Le titre lui donnait autant la nausée que les nouvelles la ravissait. Du bout de l’ongle, le long doigt blanc suivit le relief de la chaîne de montagnes, y traçant une ligne de feu qui enflamma le parchemin et laissa une trace noircie sur la table lorsqu’il s’étouffa. Sa voix s’éleva dans l’ombre.

– Il est temps de récupérer ce qui nous appartient.