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Comme ce n’est pas très gai, je lui propose de lui faire écouter la musique que j’aime bien.

Pour bien entendre, j'installe mes enceintes.

— C'est quoi ?

— Des enceintes ! Des haut-parleurs, je précise, car je vois que ça passe pas.

Je passe sur le Bluetooth, sans lui parler d’Harald le Viking, pour ne pas l’embrouiller, même si j’aime bien cette histoire.

— Y a pas de fil ?

— Ben non. Il n'y en a pas besoin. Sauf pour recharger.

— Recharger quoi ?

Putain !

— Les batteries !

— Comme dans les voitures ?

— Oui, comme pour les voitures électriques !

— Parce que les voitures sont électriques ?

— Non, pas toutes, pas beaucoup. Mais les autres voitures ont aussi une batterie. Dans ces matériels, c’est plutôt comme des piles électriques. Tu connais ?

— Bien sûr. Comme les transistors !

— Ben non. Un transistor, c'est un composant électronique, comme un condensateur, une LED, une résistance, une puce…

— Une puce ? Une souris ! Vous avez le chic pour utiliser les mots de travers !

Et « le chic », ce n'est pas bizarre aussi ? Mais je ne lui dis pas. Il continue :

— Les postes transistors, ils marchent avec des piles…

On ne se comprend pas ! Un DuckDuckGo. Yes. Une radio, quoi.

— Ouais, c'est exactement pareil. Sauf que c'est mon phone qui fait l'émetteur radio pour la musique.

— Ça alors ! Il ne faut pas des grosses antennes ? C'est encore mieux alors que la TSF.

Là, je plie. Je n'ai pas envie de chercher des silex taillés.

Pour esquiver, je lui raconte la blague des archéologues à Jérusalem.

« Ce sont des Juifs et des Arabes qui font des fouilles pour savoir qui étaient les premiers habitants à Jérusalem. Ils tombent sur de vieux fils de cuivre, avec des caractères arabes sur une pierre.

« — Vous voyez, on a inventé le téléphone il y a plus de deux mille ans !

« — On continue de creuser ! disent les Juifs

« Ils creusent. Rien !

« — Ah ! Vous voyez, nous les Juifs, on a inventé le téléphone sans fil bien avant ! ».

Flop total. Il entrave que dalle. J'espère que je ne vais pas passer pour un raciste. Après tout, je le connais pas ce type. À moins qu’il n’y ait pas eu encore de guerre entre Israël et les pays arabes ?

Comme il ne réagit pas plus, j’embraye la musique. Je commence bien sûr par Jerusalema. Il écoute attentivement. C'est le dernier truc, mais ça va durer. C'est la peufra !

Je branche ma playlist : Angele, Dommage, My way, Alright, Bella Ciao. Bon, je vais pas vous la dérouler, vous les connaissez comme moi ! Je vois qu’il écoute avec plaisir et qu’il a l’air complètement plié. J’arrête pour le laisser redescendre.

— Tu trouves ça comment ?

— C’est bizarre, mais c’est pas mal. J’aime beaucoup le premier morceau. Tu le remets ?

— Et toi, tu as des airs préférés ?

— Oui ! Ma sœur a un Teppaz et on écoute des 45 tours. On n’en a pas beaucoup, alors elle les échange.

— C’est quoi, un tepaze ?

— Un tourne-disque.

— 45 tours, tourne-disque : je sais ! Des vinyles ! Le kiff absolu, c’est vraiment vintage ! C’est quoi tes préférés ?

— Ben, tous les yéyés !

— Yéyés ?

— Johny Halliday, Claude François, Sylvie Vartan, Sheila, Richard Anthony, Françoise Hardy, Hervé Vilard…

— Arrête, j’arrive pas à suivre ! Johny et Claude François, je connais. C’est pour les vieux et ils sont morts !

— Ah oui ? Pourtant, ils étaient jeunes.

— Jeunes, il y a longtemps, pour nous…

— Ah, oui, c'est vrai. Et les Beatles ? Tu connais ? C'est un groupe anglais. C'est à la mode en ce moment !

— Je connais aussi ! Papa aime bien et moi aussi, un ou deux morceaux. Mais ils sont tous morts, sauf deux.

— J'arrête. C'est trop triste s'ils sont tous morts. Je sais pas si tu as vu, mais on fait tous comme eux : on se laisse pousser les cheveux ! Marre de la coupe en brosse. Regarde, ils commencent à arriver aux oreilles !

C’est sûr ! J’avais pas remarqué qu’il avait les cheveux longs ! Les miens sont à la nuque, alors les siens, juste sur les oreilles, c'est ridicule. Mais il en a l’air tellement content que je le félicite. C’est vrai que ça lui va trop dar !

Il me demande s’il y a toujours SLC.

— SLC ?

— Oui, Salut les copains, le journal et l'émission.

— Nib de nib. Inconnu.

— C'est le journal des jeunes, avec toutes nos idoles et ce qu'elles font ! On se le prête, car c'est cher. Nous, les plus jeunes, on doit attendre pour le lire. Et quand t’es pas au courant, t’es nul.

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