Chapitre 4 - Bastien

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Je suis dans la rue. ll me faut quelques secondes pour reconstituer le puzzle. Nouvelle amnésie. Je me ressaisis aussitôt. Trouver le fil, suivre les indices.

Ah oui, j'étais devant mon assiette au comptoir quand on m'a interpellé. Qui ? Trou noir. J'essaie de revoir la scène, moi me retournant vers cet inconnu, une voix d'homme assez grave avec une note d'anxiété... Non, décidément mon absence est survenue avant que je ne parvienne à voir son visage.

Je tourne sur moi-même. Le restaurant où je me trouvais est de l'autre côté de la rue à quelques mètres de là. Coup d' œil sur le téléphone. Nous sommes toujours le vingt-cinq mars, quinze heures trente. Ouf, une courte perte de mémoire.

Voilà ce que je voulais faire avant l'inconnu, regarder mes vidéos. J'ai souvent un message enregistré. Je fouille dans mon téléphone, pas de nouveau fichier. La plus récente remonte à huit jours, inutile. J'ai bien envie de lancer ce stupide smartphone sur le sol mais je serai encore moins avancé. Le poing crispé suspendu en l'air, je tente de calmer les spasmes de mes doigts.

Suivre les indices.

Je secoue la tête et fourgue mon smartphone dans la poche interne de ma veste. Je fouille mes poches. Ah ! Une carte... de visite. L'adresse d'un hôtel, le Sakura. J'ouvre une appli de géolocalisation pour avoir une idée de l'itinéraire : quinze minutes à pied. Avant de suivre cette piste, je vérifie ma sacoche : une petite liasse de yens, mes cartes bancaires et de santé, quelques cartes de visite, une photo de Suki, une clé qui ne me rappelle rien et un reçu bancaire... en japonais. Je décide donc de suivre mon GPS.

Je suis une grande artère bordée d'immeubles modernes cubiques qui me mène dans une rue plus petite, le long d'un canal bordé d'arbres en fleurs. C'est magnifique tous ces pétales roses dont certains virevoltent tels des flocons de neige colorés dans le ciel printanier. J'en oublie quelques instants ma situation précaire pour profiter du dépaysement.

Après quelques minutes de marche, un panneau attire mon attention, un pictogramme de temple est dessiné dessus suivi d'une flèche vers la gauche. J'hésite peu de temps, je suis mon envie, après tout personne ne m'attend. J'emprunte un chemin qui mène à une porte rouge derrière laquelle trône un temple aux bas-reliefs finement ouvragés et peints de couleurs chatoyantes. Sur la droite, des cylindres blancs, de la taille d'un tonneau, avec d'énormes idéogrammes s'étalent sur plusieurs dizaines de mètres et trois rangées de hauteur. Non loin de là, un immense trépied sur lequel repose une gigantesque coupelle de métal où quelques personnes posent de l'encens dans ce qui semble être du sable. L'atmosphère qui se dégage m'apporte tout de suite une certaine sérénité. Je pense aux bras réconfortants d'Archy lors de mes crises d'angoisse, la même sensation d'apaisement se dégage de ce lieu pourtant inconnu.

Puis une voix derrière moi me fait sursauter. Cela s'agite dans ma tête. Le timbre fait remonter des tréfonds obscurs de mon âme des visions floues que je tente autant que possible de repousser. Je prends ma tête entre mes mains, j'ai envie de me cogner contre un mur pour empêcher le trauma de revenir. Mes pieds me guident vers la façade ouest du temple. Au moment où mon front s'apprête à percuter la surface rugueuse et froide de la façade, je vois les bras d'Archy m'envelopper de leur chaleur. Je me concentre sur cette vision tout en oscillant légèrement d'avant en arrière. Peu à peu le tsunami reflue.

Je reprends mon téléphone en main et repars à petites foulées en direction du Sakura. J'arrive devant un bâtiment quelconque qui dévoile un intérieur à la fois zen et cosy, entre la modernité et le traditionnel japonais. Arrivé devant le comptoir, le réceptionniste me fait une courbette accompagnée d'une formule de politesse avant de me tendre une clé. J'essaie de cacher ma surprise pour attraper l'objet sur lequel est gravé le numéro cinq-cent-neuf accompagné d'un kanji.

Je vérifie sur le plan de l'hôtel où se situe la chambre avant de prendre l'ascenseur pour le cinquième étage. J'ouvre puis referme aussitôt la porte pour m'appuyer sur le battant. Il règne un sacré désordre dans la pièce : couette étalée par terre, vêtements éparpillés sur le sol, bouteilles de bière vides, un préservatif usagé, un petit-déjeuner à moitié entamé...

Est-ce vraiment ma chambre ? Qui a bien pu mettre un tel bazar ?

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