Chapitre 19 - Oswald

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Je profite de la confusion de Bastien pour reprendre le contrôle du système. De toute façon, avec son attitude il met les autres en panique alors mieux vaut ne pas le laisser au commande. J'attends que tout le monde se calme et que Cyrielle arrête de pleurer.

Je lui caresse sa courte chevelure blonde, lui parle des animaux que nous irons voir à la Réserve des félins en France quand tout sera fini. Peu à peu les larmes se tarissent. Elle renifle puis me serre fort dans ses bras avant de me souhaiter bon courage.

Je reviens à ma mission.

Assis sur un banc public, je sors le calepin et le relis à la lumière d'un reverbère. Une brise vient ébouriffer mes cheveux et quelque chose se pose sur mon nez. Je passe mes doigts sur mon visage pour l'attraper et l'observe sous la faible luminosité. Un pétale de sakura*. Mes pensées m'entraînent vers Cyrielle, il faudrait que je lui montre ces arbres fleuris avant de terminer ma mission. Je suis sûr qu'elle trouvera ça magnifique.

Un chien aboie et me rappelle à la réalité.

Discipline.

Reprendre la liste et en savoir plus sur ce mystérieux H. Je feuillette plusieurs fois le carnet. Seul des pseudonymes suivis de ce qui ressemble à des titres noircissent les pages. Au bout de la ligne des dates et un montant. Je ne fais pas le calcul mais je crois que celui que je cherche est le plus gros consommateur.

J'allonge mes bras sur le dossier métallique, sa fraicheur m'aide à rassembler mes idées. Je bascule la tête en arrière et observe les nuages balayés en douceur par le vent nocturne. Je laisse mes pensées défiler, peut-être qu'un tout cohérent sortira de ces pièces de puzzle mélangées dont je dispose : papa qui mentionnaient parfois certains des noms dans le calepin, cet homme qui me choisissait chaque fois et dont les vêtements portaient un H brodé, le petit ami de Kaede, récemment décédée, qui a pris contact avec moi pour m'aider dans ma quête vengeresse, la bonne qui m'a permis de fuir au péril de sa propre vie...

Me replonger dans le passé provoque aussitôt le retour des tsunamis émotionnels : la peur, le dégoût, l'horreur. La terreur surtout... trop souvent accompagnée de la douleur.

J'ai l'impression que des dards d'insectes se plantent partout dans mon corps. Ça pique, ça brûle et ça démange. J'ai beau avoir appris que tout cela venait de mon esprit malade, je ne peux toutefois réprimer mes mains de venir gratter mes bras puis mes jambes avec frénésie. Est-ce qu'un jour tout cela cessera, ou suis-je condamné par ces enculés à souffrir jusqu'au jour de ma mort ?

Putain de pensée à la con ! Faut que je me reprenne. Le sentimentalisme, très peu pour moi. Je m'accroche à la nécessité de sauver Cyrielle, elle a plus d'importance à mes yeux que ma propre vie. Pour elle, je peux soulever des montagnes et écraser des monstres.

Je finis par conclure que le carnet ne me permet pas d'avancer. Aucune adresse, pas de téléphone, ni de mail.

J'enrage !

Au moins, cette émotion-là est un bon moteur. Je sens l'énergie revenir et se déverser dans mes veines. Mon esprit s'éclaricit. Je pense mieux, je pense vite, je recoupe les éléments.

Guetter la boutique et repérer la remise des livraisons. Voilà la solution !

À cette heure, tout est fermé, hormis les 24/24 typiquement japonais mais qui ne me serviront à rien ce soir. Je me mettrais à l'affût près du building demain dès l'ouverture. Autant retourner à l'hôtel pour ce soir.

Je me dirige vers la bouche de métro, les mains dans les poches, le pas pressé. Mon corps a besoin de dormir, sinon je ne tiendrais pas longtemps, surtout avec tous ces switchs. Ça nous a toujours épuisés !

Un métro est déjà sur le quai, je monte seul dans la rame et m'installe sur un siège à moitié affalé. Je cherche mes écouteurs et les branche sur mon téléphone. Un bon coup d'Electric Callboy me permet d'empêcher toute pensée parasite de venir mordre mon esprit. Je crains de perdre le contrôle et je dois avancer. Je vais finir par manquer de temps si ça continue.

* Sakura : cerisier japonais qui se couvre de fleurs roses pales au début du printemps.

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