Chapitre 7

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Un violent coup de tonnerre me réveille brutalement. J’enfile mon tee-shirt et vais fermer les fenêtres. Je regarde l’heure : 4h45.

De retour dans la chambre, je distingue la silhouette de Grégoire, étendue dans mon lit.

« Ce n’était donc pas un rêve ».

J’écoute sa respiration régulière. Je me revois dans ses bras et cette simple pensée me trouble, sa présence m’intimide.

Je m’allonge tout doucement et maintiens une certaine distance, je ne veux surtout pas créer une fausse intimité. Nous ne sommes pas au début d’une nouvelle histoire. Demain, il partira et je ne le verrais plus, je suis amère car je sens que quelque chose de très fort vient de se produire entre nous cette nuit.

Je pense à mon examen de lundi, ma gorge se serre. La peur envahit de nouveau tout mon être. Je me recroqueville en chien du fusil et commence à avoir des frissons. Grégoire se retourne, se colle contre mon dos et embrasse doucement mes cheveux en murmurant

- Ne t’en fais pas... tout ira bien, j’en suis certain.

Ces paroles me surprennent « Comment est-ce possible de se sentir aussi connecté à quelqu’un en si peu de temps ? »

je me retourne et je l’embrasse tendrement.

- Je suis contente que tu sois resté.

Il répond avec douceur à ce baiser puis prend appui sur son coude pour effleurer délicatement mes jambes, ses caresses sont légères comme des nuages. Je frissonne. La peur s’estompe petit à petit laissant place à un vif désir.
Ses doigts remontent le long de mon ventre, puis il enlève mon tee-shirt.
Je sais que cette belle parenthèse sexuelle ne mènera à rien, pourtant, je refuse de raisonner, je veux savourer pleinement ce moment de pure folie.

Demain sera un autre jour.

D’ailleurs, le jour suivant, commence à arriver, les premières lueurs du matin pénètrent dans la chambre. Nous sommes tous les deux suspendus entre jour et nuit, rêve et réalité

Il se lève, tire les rideaux sans me quitter des yeux. Je le vois en contre-jour, nu, avec toujours ce regard de braise posé sur moi.
Il s’allonge et son baiser est si tendre que j’aimerai que cet instant ne s’arrête jamais. Nous faisons de nouveau l’amour, mais cette fois, il n’y a plus cette folle urgence, nous prenons tout notre temps, nous nous découvrons encore et encore avec une douceur infinie.

Des bips me ramènent à la réalité. Je me lève et part à la recherche de mon téléphone, il est sur le bar de la cuisine, ce n’est pas le mien qui a émit ce signal. Je vois son téléphone posé un peu plus loin, j’ai envie d’aller regarder le message « Est-ce sa femme ? ou des patients ? » Je réfrène cette impulsion, je n’ai jamais fouillé dans les affaires de Nicolas, je ne sais pas pourquoi cette idée me traverse l’esprit ?

Le téléphone bip à nouveau.

Je quitte cette pièce sinon, je risque de faire une connerie. Je trouve refuge dans la salle de bains, j’allume une bougie à la figue, fais couler de l’eau dans la baignoire et je sélectionne le morceau « Take this waltz », la musique et la voix envoutante de Léonard Cohen envahissent la pièce.

Je me regarde dans le miroir avec attention. Mes cheveux, sont décoiffés, mes lèvres sont gonflées, j’ai les joues roses, et je remarque toujours cette même étincelle dans mes yeux.

Je me glisse dans le bain chaud, plonge la tête sous l’eau, des flashs de nos ébats me reviennent. Je repense à la douceur de ses caresses et la puissance de nos orgasmes. C’est étrange de se sentir aussi proche d’un inconnu.

Mon regard s’attarde sur ma silhouette. C’est vrai que je suis beaucoup trop mince, il faudrait que je reprenne quelques kg pour être plus sexy et attirante.

Je ne suis pas le genre de fille que l’on remarque. Durant mes études, tous les garçons étaient systématiquement attirés par mes amies. J’étais toujours copine avec des filles qui ne me ressemblaient pas. Je projetais sur elles tous mes fantasmes. Elles étaient exubérantes, avaient confiance en elles et multipliaient les conquêtes. J’étais la confidente. Les garçons venaient me parler d’elles et elles d’eux.

A cette époque, j’avais énormément de complexes, j’étais trop grande et sans forme. Les choses ont commencé à changer au lycée. Les garçons semblaient un peu moins attirés uniquement par les seins et s’intéressaient aussi aux filles qui possédaient de l’esprit. Et moi, j’en avais. J’étais la bonne copine, toujours de bonne humeur avec un humour décapant.

Avec Nicolas, ce fût la même chose. Nous nous sommes rencontrés lors d’une fête. Je suis tombée amoureuse au premier regard, pourtant, nous n’avons pas parlé. Nous nous sommes croisés à maintes reprises par la suite. Plus tard, il m’a avoué qu’il avait séduit par tous mes petits défauts : mes grands yeux noirs, mes dents pas totalement bien alignées et mes lèvres charnues.

Nous nous sommes aimés avec passion pendant de nombreuses années, sans aucune contrainte. Nous ne pensions qu’à nos plaisirs : nous avons écumé les bars, les soirées, les salles de concerts, nous avons été dans tous les restaurants qui faisaient le buzz, et avons aussi beaucoup voyagé... jusqu’au jour ou nous sommes devenus parents et là notre quotidien à changé. Lui n’a pas accepté ce changement.

De légers coups à la porte me ramènent à la réalité

- Oui ?

- Je peux rentrer ?

Je n’ai pas envie qu’il me voit nue à la lumière brute du jour et qu’il prenne conscience de « cette beauté atypique » comme aimait le répéter Nicolas.

- Constance ?


Je me ressaisis en me disant que nos corps n’ont plus de secrets l’un pour l’autre, que je dois avoir plus confiance en moi. En même temps, je ne me vois pas lui dire « Au fait, merci pour la levrette, maintenant c’est bon tu peux rentrer chez toi ».
Je lui réponds de rentrer.

Il entrouvre la porte, passe la tête, sa présence me paraît irréelle. Il est si touchant avec les cheveux en bataille et les yeux encore plein de sommeil.
Je n’arrive pas à comprendre comment cet homme est ici avec moi. Cela me paraît tellement improbable.
Je lui souris pour l’inviter à rentrer. Il est torse nu et porte juste son pantalon.
Il me regarde, je suis intimidée,

- Hello, tu as bien dormi ?

« Pourquoi, lui ai-je posé une question aussi conne, mais bon, il fallait que je dise quelque chose ».

Il ne répond pas et s’assoit sur le bord de la baignoire, il se penche pour mettre sa main dans l’eau et effleure l’une de mes cuisses au passage « Mon dieu que ce mec est sexy ».

Au même moment, ma playslit passe « Memory hotel » des Rolling stones

Il me dit avec un sourire :
- C’est la température idéale pour prendre un bain.

J’ai l’impression qu’il est expert dans l’art de la séduction, il semble très l’aise, alors que je suis totalement déboussolée. Je ne sais pas quoi faire, quoi dire. Sans réfléchir, je lui réponds

- Viens me rejoindre si tu veux ?

Il me sourit, tout en enlevant son pantalon. Il sort un préservatif de sa proche, je suis surprise qu’il en ai autant sur lui. Je voudrais lui faire une remarque mais je me retiens. En une fraction de seconde, il est dans le bain. Nous nous regardons longuement sans bouger, je suis submergée par un délicieux sentiment de plénitude, je me sens belle dans ses yeux. Je pense à sa femme, j’ai honte de constater que je n’ai aucun remord.

Quant à lui, j’ai l’impression de déceler dans son regard une étrange étincelle qui va au delà de la simple attirance sexuelle. Je m’avance et l’embrasse dans le cou, il penche la tête en arrière, j’explore son cou avec délice. Il baisse la tête pour embrasser mes seins. Je soupir de plaisir.

Je prends son visage entre mes mains et l’embrasse avec avidité. J’ai encore envie de découvrir sa bouche et de jouer avec sa langue. Nous nous embrassons pendant de longues minutes sans reprendre notre souffle. Ses mains parcourent mon corps, je suis tremblante de désir, je ne souhaite qu’une chose, le sentir en moi. Je prends le préservatif, déchire l’enveloppe, je le mets sur son sexe dur, et très lentement, sans le quitter des yeux, je le chevauche.

Le parfum envoutant de la bougie, ses mains sur mes hanches, la chanson « sheepskin tearaway » de Peter Doherty contribuent à faire de ce moment, un instant absolument à part. Je voudrais le figer à tout jamais dans ma mémoire.

Ainsi, assise sur lui, je plante mon regard dans ses yeux. Je suis surprise par la force de mon désir pour cet homme. Il me renvoie un regard hardant, je sens ses mains qui remontent le long de ma colonne vertébrale.

Il me sourit, je l’embrasse. Commence alors une chorégraphie de pur plaisir. Je retrouve les mêmes sensations que la nuit passée. J’aime sa peau, son odeur, sa bouche, sa langue, ses mains, son sexe.

La chanson de Ghinzu « The dragster wave », me fait perdre complétement la raison. Je me laisse envouter par la musique. Je veux profiter encore et encore de sa présence, je sais que c’est la dernière fois que je peux le tenir dans mes bras. Je n’ai qu’une idée, le faire jouir très fort pour qu’il se souvienne de moi à jamais, je veux lui laisser une empreinte indélébile.

J’accélère le rythme, je l’embrasse avec fouge, je lui mordille les lèvres. Il halète, il enfonce ses doigts dans ma chair.

Il plante ses prunelles vertes dans mes yeux, et me murmure


- Continue, Constance, ne t’arrête pas. C’est si bon.


Je me mords les lèvres pour me concentrer sur notre plaisir, une chaleur envahit mon entre-jambe et quelques secondes plus tard, un plaisir immense me terrasse.
Aucun de nous, ne souhaite vouloir rompre cet étrange lien qui nous unit l bouge légèrement, je me lève pour me retirer.
- Non attend un peu.
Je le regarde tendrement et ne bouge pas.

- C’était encore vraiment très fort pour moi
- Oui, pour moi aussi.

Je pose ma tête contre son épaule et savoure sa présence. J’entends au loin un nouveau bip. Ce bruit nous replonge dans le présent.

- Je vais devoir y aller, Constance
- Tu veux un café ?
- Non ça ira, merci.

Je sors de la baignoire, je prends mon peignoir et me retire dans ma chambre pour cacher ma déception. Il me rejoint.

Nous sommes assis chacun à une extrémité du lit pour nous habiller, nous nous tournons le dos, je redoute le moment de la séparation.

Nous n’échangeons aucune parole. C’est une sensation étrange. Il y a encore quelques minutes nous étions intimement connectés et là soudainement, je réalise que je suis en présence d’un inconnu avec qui je viens de faire l’amour.
Une irrésistible envie me pousse à l’observer, je me tourne, il se retourne également, nos regards se croisent quelques instants, je détourne la tête timidement et je crois voir un tendre sourire se dessiner sur ses lèvres.

Il se lève, vient me déposer un baiser sur le front, et sort de la chambre sans dire un mot de plus. Je le suis en silence, le cœur battant à tout rompre.

Je tends l’oreille pour écouter la musique qui vient de la salle de bains, et je reconnais le morceau de Louise Attaque « Insouciance »
Je suis incapable de prononcer une seule parole, il ramasse ses affaires. Je vois le chèque qui est sur le bar. Je lui tends


- N’oublie pas ton chèque.
- Ah ? merci.

C’est bizarre, j’ai l’impression que je me suis payée un gigolo. Il le prend et le glisse dans la proche de son pantalon , il semble gêné lui aussi.

- Tu m’appelles pour me tenir informé de ton examen lundi ?
- Oui, bien sûr.

Il se dirige vers la sortie et s’arrête. Il est sur le point de dire quelque chose, mais ne prononce aucune parole. C’est moi qui brise le silence

- Avant que tu ne partes, je voulais te préciser quelque chose d’important Grégoire.

Je marque une pause puis je reprends,

- Je n’ai pas l’habitude, enfin, tu sais de ramener des hommes chez moi. En fait, tu es le premier depuis ma séparation.

Je n’ose pas le regarder

- Pourquoi me dis-tu cela ?
- Je ne sais pas, c’est important pour moi que tu le saches.
- Enfin, je ne vais pas te juger Constance. Tu fais ce que tu veux.


« Merde, je n’avais pas prévu cette réponse » J’ai juste envie qu’il me dise que lui non plus il n’avait pas l’habitude de se taper des filles d’un soir, que je suis la première depuis la séparation avec sa femme. Il ne prononce aucune des paroles qui m’apaiseraient.
Il me regarde, je vois ses yeux se poser sur mes lèvres.
Pourtant, il se contente me déposer un baiser sur la joue.


- A très vite, j’espère. Et surtout appelle moi après tes examens

- Très bien docteur

Le ton de ma voix est plus cassant que je ne l’aurais voulu.
Nous sommes à nouveau à notre place : Lui le médecin et moi la patiente.

Il sort, la porte se referme, je l’entends descendre les escaliers. Puis le silence et le vide se font dans mon appartement et dans mon cœur.

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