Chapitre 10
5h30 du matin, impossible de dormir, je ne cesse de retourner dans mon lit. Je me lève et vais prendre une longue douche.
Le cabinet médical ouvre tôt, je veux être la première à appeler pour être certaine de pouvoir être reçue dans la journée ou dans semaine. La secrétaire me donne rdv à 10h, je suis soulagée.
Depuis le retour des enfants, je n’ai pas eu de temps de penser ni Grégoire ni à mon examen. J’ai été happée par un tourbillon de vie. Ils me racontent dans le moindre détail le week-end avec leur père et sa nouvelle compagne. Je prends sur moi pour paraître enjouée et ravie.
Avec eux, je suis par la force des choses, une maman à temps complet, plus une femme avec ses doutes et ses angoisses.
A 8h nous quittons la maison, direction l’école. Quand je leur dit au revoir, j’ai l’impression d’avoir déjà fait une journée complète. Je pars directement au cabinet, j’attendrai dans un café.
Dans le métro j’engage plusieurs conversations SMS pour m’occuper l’esprit.
-MOI vers ma boss : Bonjour, j’arriverai en fin de matinée, je dois passer une radio urgente. Je te tiens au courant si retard.
-MOI vers Paul : Alors ce week-end en amoureux c’était top ?
- Ma Boss vers MOI : OK, pas de pb, tant que le travail est fait sur le dossier BP
- MOI vers ma boss : Oui ne t’inquiète pas tout sera géré.
- MOI vers Flo : Oh là là, toujours pas remise de la soirée de samedi soir. Ca va toi ?
- Paul vers MOI : Bien, on se voit dans la semaine pour boire un verre ?
- Flo vers MOI : KO suis ressortie avec Ange hier... chui dans un sale état, je ne sors pas cette semaine, DETOX
- MOI vers Paul : Ok jeudi soir ? tu viens chez moi ?
- MOI vers Flo : Tu ne tiendras pas... ai revu docteur Ross hier... mais j’ai résisté
- Paul vers MOI : OK j’apporte du porto
- Flo vers MOI : Well done, tu passes à kelle heure ton exam ?
-Numéro inconnu: As-tu obtenu un rendez-vous ? Surtout pas de stress. Pense à me téléphoner. Je t’embrasse. Grégoire
Mon cœur bat à la chamade quand je vois ce message, je le relis à plusieurs reprises.
« Comment a-t-il eu mon portable, je ne lui ai pas donné. Ah, la fiche de renseignements » Ce message me laisse très perplexe. Je suis à la fois ravie qu’il pense à moi mais je ne sais pas si c’est l’amant ou le docteur qui parle.
- MOI vers Paul : NON pas de porto !!!!!! me réjouis de te voir
- MOI vers Flo : je suis en route, j’ai peur. Paul passe jeudi soir à la maison, tu veux venir ?
Je sors du métro et je ne vais pas boire un café, je suis suffisamment stressée. J’attendrai dans la salle d’attente.
A l’accueil, je suis surprise de voir un homme derrière le comptoir. Il lève la tête et me regarde
- Bonjour J’ai RDV à 10h pour une mammographie. Il semble très embarrassé.
- Euh bonjour, en fait je suis l’informaticien, euh je vais chercher la secrétaire
« Merde, les boules », je suis à mon tour super gênée.
La secrétaire arrive, après toutes les informations d’usage, j’attends, incapable de lire. Je regarde mes messages
- Paul vers MOI : Moi aussi
- Flo vers MOI : j’te dis ça plus tard... trop décalquée pour le moment. Call me après exam. Tout ira bien.
Elle a du vraiment abuser hier car Florence est du genre très résistante habituellement.
- MOI vers Flo : OK
Je ne sais pas si je dois répondre au message de Grégoire. Je décide que non.
Il ne peut plus être mon médecin dorénavant, nous devons rester éloignés l’un de l’autre. J’appellerai Alain pour qu’il me recommande un autre confrère.
C’est mon tour.
Quand je ressors du cabinet 1heure après, je me sens légère. Grégoire avait raison. Tout est bénin, je dois y retourner la semaine prochaine pour percer cette poche. Le professeur a été très rassurant. Je suis si soulagée.
J’arrive à l’agence, et passe la journée les yeux fixés sur l’ordinateur, à répondre à de nombreux mails, tous plus urgents les uns des autres.
J’envoie juste un message à Flo pour la prévenir que tout est OK.
La semaine passe à une allure fulgurante entre le boulot et les enfants, je n’ai pas une minute à moi. Depuis que je suis seule, je dois réussir péniblement, à bosser, à gérer les courses, à cuisiner, à faire le ménage, les câlins, à réprimander, à assurer la logistique des occupations des enfants et si j’ai encore un peu d’énergie je peux enfin m’occuper de moi.
Juste avant l’arrivée de Paul je reçois un appel d’Alain
- Bonjour Alain
- Bonjour ma chère Constance. Tout va bien ?
- Oui
- Tu es certaine que ça va ?
- Oui. Pourquoi ?
- Je suis passé au cabinet aujourd’hui, j’ai appris que tu étais venue en consultation
vendredi soir, paniquée au sujet d’une grosseur à la poitrine. Grégoire attendait ton appel pour le prévenir si tu avais obtenu un RDV et pour lui donner les premiers résultats. Il m’a demandé si j’avais de tes nouvelles. Il était assez agacé je dois dire, et comme tu n’as pas précisé dans quel cabinet tu allais, il ne pouvait pas le contacter.
- Oui je sais, mais je pensais que...
- Finalement, le laboratoire a envoyé hier les résultats, il y a eu un problème de
transmission. C’est une bonne nouvelle, rien de grave.
- Oui je suis soulagée
- Je voudrais juste comprendre pourquoi tu n’as pas téléphoné.
- J’ai oublié, je suis navrée. Je suis partie travailler immédiatement et j’ai été happée par le travail et les enfants. Voilà, j’ai oublié c’est tout. Je savais que le cabinet lui enverrait une copie. Ils ont tardé à le faire, je suis désolée.
- Je suis surpris, ça ne te ressemble pas Constance. Enfin, passons, donc tu as fait sa connaissance
- Oui
- Et ?
- Et... je marque une pose, tu veux que je sois franche ?
- Oui
- Et bien je n’ai pas été à l’aise avec lui.
- Pourquoi ?
- Je ne sais pas trop, il est distant et très direct. J’avais tellement l’habitude que ce soit toi qui s’occupe de moi du coup, je crois que je n’étais pas très à l’aise.
- Ah ? Je suis surpris, j’ai vu d’anciens patients et contrairement à toi, les avis sont très positifs, notamment Stella. Tu vas t’habituer tu verras.
- En fait je ne suis pas sûre de vouloir continuer avec lui
- Prends le temps de réfléchir Constance, en tous les cas, sache que c’est un
médecin très compétent. C’est long de créer une relation de confiance avec ses
patients.
- Oui j’imagine.
- On en reparlera. Je te téléphonais aussi pour te rappeler que ma soirée de départ
a lieu ce samedi à la cave de Belleville. Tu t’en souvenais ?
- Bien sûr.
- Paul sera là aussi ?
- Je crois que oui, d’ici là je vais sélectionner des ballets, on fera notre choix
- Passe vers 19h30. Bonne soirée
- Bonne soirée à toi aussi
Je fais dîner les enfants et vers 20h30 Paul arrive juste à l’heure pour leur raconter l’histoire et les coucher.
Les enfants adorent Paul, je pense qu’il ferait un merveilleux père, je sais qu’il aimerait avoir des enfants, Emma n’en veut pas pour le moment.
J’en profite pour préparer notre dîner : au menu une assiette italienne : salade de Trévisse, jambon blanc, légumes marinés et pommes de terre à la vapeur.
Flo ne vient pas, elle tient le cap de sa semaine détox. Ca me va. Cela fait un moment que nous n’avons pas eu de soirée en tête à tête.
Nous passons un excellent moment comme toujours.
Il me raconte son week-end à Lisbonne et je lui explique ma frayeur de vendredi soir. Etonnamment, une certaine pudeur m’empêche de lui raconter ce qui s’est passé avec Grégoire, je ne comprends pas cette retenue. Est-ce le fait que je n’ai jamais eu ce genre de conversation avec lui ou ai-je peur de son jugement ?
Il faut que je tourne la page, mais comment l’oublier ? je ne cesse de penser à lui, dès que je sors de mon immeuble je ne peux m’empêcher de regarder si je l’aperçois dans la rue, je n’arrive pas à effacer notre nuit de ma mémoire. Il est plus de minuit quand Paul part.
- On se voit samedi soir à la fête d’Alain ?
- Oui bien sûr, Emma ne sera pas là, elle bosse.
- On se retrouve là bas. Je serai sans Romy, elle dort chez une amie.
- A samedi
- A samedi
Arrive enfin le week-end. Le matin est consacré aux courses, après un déjeuner dans une cantine chinoise et une sieste, nous passons une partie de l’après-midi aux Buttes Chaumont.
Romy retrouve des copines dans le parc, je la laisse sous la surveillance des autres mamans pour suivre mon fils qui ne se déplace qu’en trottinette.
Simon enchaine les descentes et les remontées à une vitesse vertigineuse. Je le suis, car je suis incapable de le laisser s’éloigner trop loin.
En fin de journée, je dépose Romy chez une de ses amies et nous rentrons. En me préparant pour la soirée, j’ai envie d’écouter Fauve. Le premier morceau qui passe est
« Oh les cœurs » je monte le son et danse. Simon me regarde, sourit et commence à bouger lui aussi, de façon totalement chaotique. Je chante et saute comme une adolescente. Je prends mon fils dans les bras et nous dansons tous les 2. J’adore ce genre de moment. Je tourne et tourne, Simon dit « encore encore encore... » c’est magique. A la fin de la chanson, il passe à autre chose, va dans sa chambre. Je baisse le son, notre instant est terminé.
Comme je suis avec mon fils, ce soir, j’opte pour une tenue confortable : pantalon large et court, pull noir col V et une paire de doc martins basses. Je rajoute un pendentif, puis je me maquille légèrement.
Je prends une pochette noire vernie que j’ai chinée dans un dépôt vente, demande à Simon de prendre un jouet et nous voilà partis pour la fête.
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