Un temps, la guerre était froide

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Cétait un autre siècle. Le monde était séparé d’un rideau de métal, on savait encore ce qu’était le socialisme – une belle idée qu’avait mal tournée par-delà les contrées de l’Oural, et le capitalisme un système qui, dixit Jaurès, portait en lui la guerre comme la nuée porte l’orage. Autour d’une table, quinze ans plus tôt, trois hommes réunis à Yalta avaient figé les zones d’influence. C’était au sortir de la guerre, alors sages, on avait mutuellement contenu les envies de sauter les barrières pour aller voir si l’autre y serait. Il y a peu encore, on disait la guerre froide et ça fleurait bon les années 60, les films d’espionnage, les romans de SAS, les débats idéologiques… On disait la guerre froide et des images en noir et blanc s’imposaient : un bonnet de fourrure sur une place rouge, des ponts peuplés d’espions, des couples déchirés, des inventions folles, des ambitions sans limites, des petits morceaux de bravoure et des grandes trahisons. Y avait presque un côté vintage, inoffensif. Avec le temps, on ne sait plus bien qui avait ainsi nommé cette tactique du gendarme mondial. D’aucuns avancent le nom d’Orwell. Peu importe. On sait de quoi on parle : la guerre froide, y’avait pas de sang, juste des coups de chaud, y’avait pas d’armées en marche, juste une menace qui planait, deux chefs qui se tenaient par la barbichette, le premier qui oserait risquait la tapette à neutrons. De froide, la guerre est soudainement devenue brûlante, à quelques encablures de là ou là-bas sur ces terres qu’on n’ose plus dire saintes. Tragiquement et totalement. Elle rase, broie, tue et supprime. Des êtres, autant de promesses. On affuble les guerres d’aujourd’hui de qualificatifs différents : justes pour les uns, asymétriques pour les autres, géopolitiques ou de soumissions pour d’autres encore. Fatigués de ces adjectifs qui enveloppent le barbare, on tourne le bouton. De guerre lasse.

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