Le Vendeur de bougies

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 — Pardonne-moi, petite fille, mais tu me sembles avoir vécu une vie tragique… je me trompe ?

L'interpellée sursauta et se retourna. Elle qui s’était crue seule dans la nuit glacée faisait désormais face à un homme qui lui souriait. Il était grand et revêtait une vieille toge rapiécée et mal entretenue, comme l'un de ces cultistes qui s’étaient décidé à vivre avec les plus pauvres. Il portait au dos un grand sac, dans lequel elle aurait pu aisément se glisser. S’il exposait toutes ses dents aussi blanches que la neige tombante dans un sourire insistant, ses yeux étaient cachés par le vieux chapeau trop grand pour sa tête et dont s’échappaient de longs cheveux tout aussi blancs. L’enfant resta d’abord incrédule puis déglutit. Avait-il vu ce qu’elle avait fait apparaître ?

 — Hé bien, tu étais sur le point de faire un vœu, je crois ? poursuivit-il. Mais avant qu’il ne se réalise que pour un temps limité, éphémère espoir dans la faible flammèche, me permettras-tu de te proposer un humble cadeau ?

 L’enfant cligna des yeux. Un cadeau ? Elle n’avait jamais entendu ce mot auparavant. Elle ne savait pas de quoi il s’agissait. Méfiante, elle fit un pas en arrière tandis que l'homme plongeait une main dans son dos pour fouiller dans son sac. Puis il lui tendit son présent.

 — Je suis un vendeur de bougies, expliqua-t-il. Et je suis persuadé que ma marchandise est exactement ce dont tu as besoin ! En l’allumant, tes rêves ne cesseront que lorsque toi, ou quelqu’un d’autre, décidera d’éteindre la flamme qui t’anime. Ils ne se briseront pas simplement sous l’effet du vent ou d’un geste inconscient. Ils perdureront.

 Il tendait vers elle trois grandes bougies d’un air insistant. L’enfant hésita, toujours grelotant. Puis elle s’avança et attrapa une première bougie qu’elle observa avec un étrange pressentiment. Pour la première fois, l’espoir animait son esprit. Voyant la flamme qui brûlait dans son cœur regagner en vivacité, le vendeur de bougies accentua son sourire. Il déposa par terre, dans la neige, les deux autres bougies.

 — Je ne te demanderai aucun payement, dit-il en lui tournant le dos. Je suis de bonne humeur aujourd’hui. C’est une belle journée d’hiver.

 La petite fille releva le visage des bougies, souhaitant dire ces mots de remerciement qu’elle n’avait jamais entendus que de la bouche de feue sa grand-mère. Mais le temps qu’elle regarde vers lui, il avait déjà disparu, et ses traces de pas dans la neige s’arrêtaient brusquement.

 La petite resta interdite. Était-ce une hallucination de son cerveau mourant ? Mais quand elle baissa la tête, les deux bougies étaient encore là, tout comme celle qu’elle tenait en main. Elle déglutit et s’agenouilla. Puis, attrapant de nouveau son allumette, elle réfléchit d’abord à ce qu’elle souhaitait. Et enfin, elle la gratta.

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