Comme annoncé dans la description, ce "récit" résulte d'une partie d'AI Dungeon. Si vous ne connaissez pas le principe, sachez seulement qu'il s'agit d'un jeu de rôle, dont le Maître du jeu est une IA.
Vous voilà prévenus, d'autant que j'ai fait en sorte que mon personnage soit une raclure de première.
Préparez les surligneurs, parce que je ne me suis pas beaucoup relu, la beauté de la langue n'étant pas ma priorité pour cette histoire.

Un vent chaud fouette la poussière. Sur le sentier balayé par la bise, Gorgory l'Étrangleur, deuxième fils de feu-Ator l’Imprenable, avance à pas réguliers. Trois jours qu’il marche sans relâche, traversant plaines et déserts sans jamais faillir dans sa détermination. Deux nuits à défier les maux gangrénant le royaume de Larion. Qu’importe, Gorgory a une mission.

Éliminer Jeneid, l’Obscur. Tuer le dragon qui a ôté la vie de son père, son frère, son clan et libérer les Terres Désolées de Nygmart de l’Hiver Eternel

Seul dans l’immensité glacée, la légendaire lame d’Arcane au poing, Gorgory n’a plus d’autre choix que de gagner les profondeurs de la Forêt de l’Oubli. Entre les conifères et les larges épicéas millénaires, sommeillent les secrets des voyageurs égarés et des seigneurs querelleurs. Quiconque y pénètre sans but aucun, erre dans ses abîmes pour l’éternité.

Gorgory n’est pas de ceux là. Sa lame virevolte, tournoie entre les hautes herbes, taillade les fougères et pourfend les spectres errants. Chaque mètre parcouru, le rapproche de son mortel ennemi. Chaque goutte de sang versé, arrache une partie de sa frêle humanité. Au coeur des bois ombreux, il marque une pause. Grave erreur malheureusement, car s’arrêter en pareil endroit sonne le glas de l’existence. Sans doute la quête du chevalier se serait-elle d’ailleurs arrêtée ici, si un étrange voyageur, sorti de la brume, n’était pas venu à sa rencontre.

A sa vue, Gorgory laisse échapper un reniflement de mépris. L’homme est drapé d’une large soutane noire, maintenue par une cordelette brune, laborieusement nouée à la ceinture. Son visage et ses mains, seules parties du corps à nue, sont couverts de pustules dégoulinant d’un liquide noirâtre poisseux. Encore une victime du Fléau, pense le chevalier.

Alors que l’homme titube vers Gorgory, celui-ci l’interpelle :

- Oh là, paysan ! Reste où tu es.

Le “paysan” se fige et dévisage Gorgory avant d’esquisser un sourire, chargé de dents cariés.

- Mes excuses messire, je ne voulais pas vous effrayer.

- Humpf…

Inutile de perdre son temps à questionner ce type sur sa présence ici. Gorgory s’en fiche comme de sa première gourgandine . Cependant, son arrivée lui a fait perdre tout ses repères. Où est le nord ? Le sud ? Quelle est cette fichue sensation qui lui engourdit les sens ?

Gorgory s’assène une vigoureuse gifle sur la tempe. Pas terrible, mais mieux que rien. En face de lui, l’homme le regarde toujours, son sourire de lépreux étiré jusqu’aux oreilles. Qu’est ce que veut ce gueux ? Mal à l’aise, Gorgory reprend la parole.

- Dis moi paysan, comment se tire-t-on de cette fichue forêt ?

- Je l’ignore messire.

- Hum, hum. Sais-tu dans ce cas où se trouve la rivière la plus proche ?

- Je l’ignore messire.

- Je vois, en ce cas, as-tu entendu parler de Jeneid l’Obscur ?

- Pas que sache, messire.

- Sais-tu au moins comment tu t’appelles, sombre idiot ?!

- Oh oui, hé hé hé… Je suis Gorgory le malicieux. Voulez-vous une de mes pommes ?

Le type plonge une main dans les profondeurs de sa toge et en ressort une poignée de pommes flétries, couvertes de mousse. Gorgory grimace, mais se reprend rapidement.

- Une petite minute, tu dis t’appeler Gorgory ?

- Oui, je suppose messire.

- Comment ça tu supposes ? Tu t’appelles Gorgory oui ou non ?

- Gorgory est mon nom, quel est le vôtre ?

- Cette question, c’est… euh…

Le chevalier s’interrompt. Hum… C’est vrai ça qui est-il déjà ? Gorgory ? Ou est-ce le nom du vendeur de pomme éphébophile planté devant lui ? Il réfléchit, se frappe le front et se fige. C’est pas vrai… Il ne sait plus qui il est. Déconcerté, il se tourne vers le dénommé Gorgory.

- Je ne sais plus… Vous savez-vous qui je suis ?

- Non messire, mais je connais quelqu’un qui peut vous aider.

- Vraiment ? Qui ?

- Un sorcier légendaire isolé dans un château, malheureusement loin d’ici. Avez-vous le mal de l’air ?

- Comment ?

- Fort bien. Prenez cette missive. Ouvrez la lorsque vous serez sur place, messire. Tenez bien le manche et laissez-vous guider.

L’homme jette une pomme dans les airs en murmurant des mots incompréhensibles. Sans crier gare, le fruit s’allonge, se durcit pour devenir un balai brosse à poils bleus. Éberlué, le chevalier regarde avec circonspection le manche se planter dans le sol, à deux pas de ses pieds nickelés. Il n’a guère le temps de se reprendre ou de demander une quelconque clarification, car l’homme a disparu, laissant le valeureux héros seul, empêtré dans les ronces et les souvenirs, en compagnie d’un balai domestique.