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Il se détacha, activa le monitoring de sa visière et s’avança droit vers la sortie.

En passant la tête à travers la porte, Hêcate sentit un parfum inconnu. Malgré les filtres de sa combinaison, il perçut une odeur de tête minérale étouffée par un puissant relent indéfinissable, végétal ou animal. La fragrance puissante d’une flore et d’une faune extraterrestre. Une puanteur indescriptible imprégnait ce monde.

Il dévala les marches sans plus attendre, foula de ses deux pieds le sol craquelé.

— Un petit pas pour l’Homme… lâcha-t-il solennellement.

Un grand pas pour Hêcate Fleap, se permit-il en pensée.

Il porta son regard sur l’horizon, fit un tour sur lui-même.

Un monde désolé, ravagé par la chaleur d’une étoile naine ancestrale trop proche.

Le spectre de lumière rouge trahissait son sens de la vue. La lueur diffuse d’un coucher de soleil perpétuel enflammait l’atmosphère cramoisie. Des nuages pourpres et mauves, comme autant de colonnes de fumée épaisse et grasse, enveloppaient l’étoile que la proximité faisait paraître énorme. Le sol aux teintes violacées et la végétation composée de nuances crépusculaires ne trouvaient, de mémoire d’Homme, aucune comparaison. Entre rêves et cauchemars, l’image vibrante de l’inconnu rendait ce monde définitivement étranger.

Derrière lui, Miles, Pirtz et Letman préparaient l’expédition. Ils contrôlaient le chargement du robot Eye-1, ouvraient les paquetages, s’équipaient d’instruments de mesure. Hêcate les observait œuvrer. Le colonel retraité Teg Miles, attribué du grade de lieutenant pour cette mission, donnait les ordres à ses hommes avec efficacité. Des drones de surveillance avaient été libérés de leur nid. Ils virevoletaient autour d’eux, émettant leurs insupportables bruits de moustiques, tout en capturant les images destinées aux archives de l’Histoire. Chaque homme fut équipé d’une arme de poing. Teg Miles en tendit une à Hêcate.

— Ce n’est pas nécessaire, jeta-t-il sèchement sur leur fréquence radio. Nous sommes ici pour établir un contact pacifique. L’objectif est d’instaurer des échanges, pas de nous faire des ennemis.

Teg lui décocha un regard méprisant à travers sa combinaison.

— Vous m’avez embauché pour deux choses, capitaine. Mon expérience d’astronaute et mon expérience de militaire. J’ai pour mission de vous ramener vivants. Ici, capitaine, sauf votre respect, vous êtes un bleu — nous le sommes tous d’ailleurs, mais vous plus que les autres. Nous ne connaissons pas la faune. Rien ne me permet d’affirmer que l’accueil autochtone sera pacifique. Je suis armé, mes hommes sont armés et vous le serez aussi. Et je compte sur vous pour nous couvrir le cul si une bestiole à six pattes déboule de nulle part, ou si un putain de monstre intelligent décide de nous abattre par « sécurité ».

— Ici, c’est nous, les monstres, Miles. Montrer les crocs ne nous mènera nulle part.

— Raison de plus, capitaine. Et comprenez bien que si nous étions attaqués, je ne leur en tiendrais même pas rigueur : je n’agirais pas autrement si je voyais atterrir dans mon jardin quatre gugusses en combinaison orange qui cachent des gueules pas même imaginables dans mes pires cauchemars.

— Très bien, Miles, laissa échapper Hâcate, vaincu. Mais n’oubliez-pas qui signe le chèque.

— Lieutenant, mon capitaine. Lieutenant Miles, insista Teg. Considérez cette mission comme un exercice militaire. Vous commandez, certes ; mais je mène les troupes selon les règles de l’art. Et en cas de pépin, exécutez mes ordres ; ça vous sauvera peut-être la peau.

Hors de lui, Hêcate saisit l’arme et la glissa avec le reste de son matériel, à sa ceinture. Il tremblait de colère. Comment pouvait-il se permettre ? Il aurait dû s’entourer de scientifiques enthousiastes, dociles, pas d’une équipe de va-t-en-guerre à la rigueur martiale. Qui lui avait conseillé de s’embarrasser de militaires à l’esprit étriqué dans cette mission ? Qui que ce soit, il le virerait sur le champ dès son retour.

— Peut-on y aller à présent, lieutenant Miles ?

— Nous sommes prêts, capitaine. Nous marcherons en ligne, vous et moi au centre. Les autres, restez en retrait ; gardez un œil sur nos arrières. Le robot et le macaque suivront dix pas derrière.

Pirtz et Letman aquiescèrent d’un « à vos ordres, lieutenant » synchronisé.

— Et bien, messieurs : en avant, toute ! jeta Hêcate avec dérision.

Les trois hommes ne perçurent pas le sarcasme.

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