IV

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Au printemps, l'année suivante. Nous rentrâmes chez nous dans la nuit d'un dimanche. Ce voyage n'aurait pu être traduit par de simples mots tant ce fut extraordinaire !

D’un coup de pédale, puis de deux, et enfin de quelques milliers, nous avions soufflé, chemin faisant, sur la feuille de vigne de Mère patrie. La France et ses paysages en tout genre n’avaient plus aucun secret pour nous. Nous l’avions mise à nu. Pédaler, rire, contempler fut la formule en trois actes que nous rejouions ad infinitum sur le théâtre bucolique où souvent moutons, bergers, ruisseaux et oiseaux se croisèrent entourés de grands arbres bordant les sentiers. Et quand le soir arrivait, nos têtes se retrouvaient allongés sur le sable, les yeux se perdant dans le noir de l’univers. Nous dormions à la belle étoile et presque toujours au bord des eaux : caressés par la mousson des côtes alentour, bercés par le chant ou des criquets ou des vagues dans l’extrême sud-est, maternés par le clapotis de la mer et rafraîchis à l’occasion par ses embruns. Et même lors des endimanchements des heures vêtues de noir, lors des jours tout à fait sombres – qu’il pleuvât qu’il tempêtât qu’il orageât ! (Plus l’effort était rude en vélo et plus grand était le plaisir une fois la journée terminée ) –, nous, nous gardions éternellement la joie de vivre à nos côtés.

Que nulle grande discussion n’ait orbité autour de sujets de réflexion, cela n’avait pour autant pas le moins du monde gêné nos moments. Au contraire : ce voyage avait été d’autant plus merveilleux qu’un silence harmonieux fut le moyen de communication, et de loin le plus privilégié.

Sans sentir aucunement la fatigue du retour, nous rentrâmes sous le clair de lune, avec l’écume et le sable encore sur la tête. Cependant, dans la nôtre de tête, la constellation de souvenirs brillant en nous me donna pour ma part une lourde peine à quitter, cette nuit-là, mon père pour ma chambre. On avait après tout partagé chaque jour, chaque nuit à deux, côte à côté, il apparaissait donc normal qu’il me fût désagréable pour moi de rester seul à présent sur mon lit.

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