Chapitre 9: "Échec et mat"

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Mon Diptek se met en marche.

« Mmmh…Mais c’est pas vrai ! Laissez-moi dormir ! »

Je place un oreiller sur ma tête pour étouffer ce bruit, mais rien à faire. Je glisse un bras en dehors du lit et j’appuie machinalement sur les boutons pour arrêter cette saloperie de gadget.

L’appareil se désactive enfin. Je vais pouvoir me rendormir !

Mais quelques secondes plus tard, alors que je m’apprête à repiquer du nez, l’hologramme du Diptek se déclenche cette fois-ci.

Carlisle apparaît.

— Anna… je sais que tu es là !

— Mmmh…

— Tu dois nous rejoindre à l’Echénox de toute urgence ! Nous avons un problème.

« Un problème ? »

Après avoir retrouvé mes esprits, je réalise enfin que Carlisle est en train de me parler.

J’ôte l’oreiller qui était positionné sur mon visage et je le flanque à ma droite.

— C’était censé être mon jour de repos ! Et vous venez de me réveiller ! J’espère que c’est urgent !

Il sourit.

— Ça l’est ! La réunion va bientôt commencer. Nous t’attendons. Dépêche-toi !

Je soupire.

— Oui chef !

« Super… la journée commence bien ! »

Je me rends à l’Echénox sur-le-champ, car le message de Carlisle semblait très clair… Je n’ai pas une minute à perdre !

J’emprunte le téléporteur situé à l’intérieur de la villa. J’atterris dans le Maëlsinh puis je m’engouffre dans la paroi qui me permet de rejoindre le palais.

Une fois sur le rocher, je marche en direction du quartier stratégique où Carlisle et les seigneurs doivent m’attendre.

Je pénètre dans le bâtiment sphérique où se trouve la salle de réunion, je gravite l’interminable escalier orbiculaire et je finis par arriver dans ce couloir puis devant les portes de la salle du conseil.

J’entre.

Dolgari et Thraän me saluent. Plus loin, Carlisle est en train de discuter avec le Haut Conseiller Narvhïn et d’autres membres du conseil.

Au fur et à mesure que j’avance, je salue Bragg et Carwaty qui sont à quelques mètres.

Les garçons m’observent. Ils arrêtent de discuter et viennent m’entourer.

« Qu’est-ce qu’il se passe ? J’ai eu le message de Carlisle, ça semblait grave… », dis-je d’un air inquiet.

Au moment où je viens de terminer ma phrase, Carlisle qui semblait plongé dans une conversation trépidante vient nous interrompre.

Lui et ses conseillers nous saluent puis Narvhïn nous demande de prendre place autour de la table ovale. Je vais m’asseoir à ma place puis les garçons me rejoignent.

Narvhïn nous informe qu’il ne s’agit pas d’une réunion du conseil habituelle.

Carlisle prend ensuite la parole et demande à Dolgari où en est l’inventaire sur le contingent. Il demande ensuite à Thraän de combien de réservistes dispose encore l’armée de Nosfuria. Bragg et Carwaty apportent eux aussi des informations plutôt stratégiques à la discussion.

Apparemment, il se trame quelque chose, mais quoi ? À cet instant, je comprends que quelque chose ne va pas…

Les garçons semblent au courant de la situation, mais moi pas !

J’ai tout à coup la sensation d’être un véritable fantôme, car personne ne fait attention à moi.

Ils échangent tous dans leur jargon militaire et moi, je suis là à les observer et à essayer de comprendre.

Je tente d’en savoir plus, je décide de les interrompre en pleine conversation.

Je prononce : « Carlisle… » dans le vide.

Le vieux ne fait même pas attention à moi. Je répète son nom, mais toujours rien !

Je commence à perdre patience. J’y vais de plus belle en haussant le ton cette fois-ci.

— Est-ce que quelqu’un peut me dire ce qu’il se passe ici ?!

Je casse directement l’ambiance. Les garçons se taisent sur-le-champ et s’observent tous d’un air confus.

Carlisle s’excuse et commence à me faire un petit topo de la situation.

— Pardonne-nous Anna, mais il nous fallait revoir certains points avant toute chose…

— Avant quoi ?

Le vieux semble mal à l’aise. Il se redresse sur son fauteuil de pierre, jette un œil sur Thraän puis il m’expose les circonstances.

— Nous avons été attaqués cette nuit ! Plusieurs de nos installations ont été endommagées dont la forteresse de Golen. Nous avons déployé des hommes sur les lieux, mais nous ne sommes pas à l’abri de nouvelles attaques…

— Ah ? Mais je croyais que la puissante Nosfuria était intouchable…

— Autrefois…répond Dolgari d’un air remonté.

Je l’observe d’un air confus puis je zieute rapidement les autres avant de poursuivre.

— Et, on sait qui a fait ça ?

— Affirmatif, me répond Carlisle. Les patrouilleurs hoyük ont réussi à appréhender un homme sur les lieux. Nous avons déjà eu affaire à lui auparavant et connaissant la notoriété du personnage, nous avons du mal à croire qu’il ait pu se laisser prendre aussi facilement… nous cherchons à comprendre ses intentions.

— Qui est-ce ?

— Son nom est Rikit, un mercenaire qui n’hésiterait pas à vendre père et mère pour des éclats de pyps ! me répond Carwaty, répugné.

— Mais dans quel intérêt ? On sait au moins qui est son commanditaire ?

— Ça, nous n’en avons aucune idée et Rikit ne semble pas très coopératif ! Il refuse de parler ! Nous avons tout essayé… même mon pouvoir n’a aucun effet sur lui ! m’explique Thraän.

Thraän n’arrive pas à pénétrer son esprit même avec la télépathie. Impossible d’obtenir la moindre information de cet homme ? Comment est-ce possible ? Quelque chose cloche dans cette histoire.

— Mais où se trouve-t-il ? Je veux le voir !

— Anna ce n’est pas une bonne idée…tu...

Je coupe la parole à Bragg qui commence à m’en dissuader et je joue de l’ironie.

— Allons Bragg…je suis une grande fille et j’ai affronté beaucoup plus coriace que ça ! Je n’ai pas besoin d’un protecteur !

Bragg est mal à l’aise, il se tue et s’enfonce dans son siège d’un air mécontent.

— Rikit est retenu prisonnier au quartier militaire, me répond Carlisle aussitôt.

— Parfait !

Maintenant que j’en sais un peu plus, les garçons reprennent où ils en étaient, puis le gouverneur, après avoir donné quelques directives à ses seigneurs s’adresse à moi : « Anna, nous devons nous préparer à une éventuelle attaque. Pour cela, je compte sur toi pour prévoir un plan d’évacuation. Tu devras mettre à l’abri les Fératih et les protéger si nous étions pris pour cible. Est-ce que je peux compter sur toi ? »

Je fixe Carlisle les yeux dans les yeux. Le vieux n’a pas l’air de plaisanter. Je me redresse dans mon fauteuil et voyant l’ampleur de ce qui se prépare, je fais preuve de sérieux pour une fois…enfin à ma façon.

— Oh ! J’aurais certes, préféré une mission plus palpitante, mais vous pouvez compter sur moi !

Sur ces mots, Narvhïn, après avoir demandé la permission au gouverneur, décide de lever la séance.

Nous quittons la salle.

Je devance les garçons et je progresse dans le couloir, prête à m’engager dans l’escalier, mais Bragg me rattrape aussitôt.

— Anna, je t’en prie, promets-moi que tu n’iras pas au quartier militaire !

Je l’observe et j’essaye de comprendre le sens de sa mise en garde. Je grimace et je l’observe curieusement.

— Et pourquoi pas ?

— Rikit n’est pas là par hasard et je suis sûr que cela n’annonce rien de bon alors par pitié, restes en dehors de ça !

— Aurais-tu peur pour moi ? Je croyais que le temps où j’avais encore un peu d’estime pour toi était révolu…

— Ne mélange pas tout…

— Mais Bragg… Ce Rikit est enfermé au quartier militaire, il ne risque pas de me faire grand-chose à présent !

— Je sais, mais…

— Ne t’en fais pas… je gère… comme d’habitude ! Pardonne-moi, mais il faut que j’y aille, Carlisle m’a confié un travail !

Je termine sur ces mots en esquissant un petit sourire et en laissant Bragg au sommet de l’escalier.

Bragg n’est pas du tout enchanté et rassuré à l’idée qu’Anna puisse approcher Rikit le redoutable mercenaire.

Thraän et les autres arrivent jusqu’à lui. Le Général tente de le consoler : « C’est peine perdue, mon ami… Anna n’en fait toujours qu’à sa tête ! Inutile d’essayer de la raisonner, vous perdez votre temps », dit-il en souriant tout en progressant dans l’escalier sous les yeux découragés de Bragg.

Évidemment, j’ai bien pris Carlisle au mot et une fois notre petite réunion terminée, le jour suivant, je commençais déjà à envisager un plan de secours avec les hommes que le vieux avait mis à ma disposition.

Mais plus tard, quelque chose m’avait convaincu de faire un petit tour au quartier militaire et malgré les recommandations de Bragg, je décidais de me rendre là-bas, à l’endroit précis où était détenu ce fameux Rikit.

*

J’arrive aux portes de la garnison. Les soldats qui guettent l’entrée me saluent et me laissent pénétrer dans l’endroit.

À l’intérieur, quelques hommes me font un brin de causette et m’indiquent par hasard que les seigneurs se trouvent dans la salle d’interrogatoire.

J’y vais de ce pas, mais arrivée à destination, je n’entre pas tout de suite, car je préfère d’abord voir à qui j’ai à faire.

Au moment, ou je m’apprête à faire un pas de plus, je tombe sur Dolgari qui sort de la salle d’interrogatoire.

A en croire l’expression de son visage, Rikit a décidé de garder le silence.

Il m’accompagne dans la salle voisine où se trouve une sorte de miroir sans tain duquel une énergie bleuâtre se dégage. De là, je pourrais examiner l’homme.

Je pénètre dans la pièce. Thraän, Bragg et Carwaty s’y trouvent déjà. Tous me saluent, je fais de même puis mon regard se pose sur la vitre.

Je m’approche et je fixe l’homme sans dire un mot.

A première vue, étant donné qu’il est assis, il n’a pas l’air très grand. D’ailleurs, à mon grand étonnement, il me fait penser à une sorte de gobelin.

C’est vraiment à cela que ressemble le terrifiant mercenaire dont les garçons me parlaient ?!

Il est vêtu d’une façon plutôt ordinaire. Un débardeur vert bouteille laissant apparaître de multiples tatouages sur l’ensemble de ses bras, un pantalon bleu comme une sorte de jean et il porte d’énormes rangers noirs. Il ne parait pas très costaud, il a l’air plutôt sec, la peau claire et le crâne rasé avec cette crête au milieu du crâne. Son visage et le dessus de sa tête sont parsemés de cicatrices. Et en voyant la façon dont il se comporte alors qu’il se trouve seul dans cette pièce, je ne tarde pas à penser que ce type n’a plus toute sa tête…

D’après les dires de Bragg ou ceux de Carwaty, cet homme serait le plus effroyable de tous les mercenaires, pourtant en voyant à quoi il ressemble, il n’a pas l’air si effrayant.

— C’est lui votre forcené ? Il n’a pas l’air si méchant… dis-je d’un air sarcastique.

— Détrompez-vous chère Anna, à première vue, il semble inoffensif, mais il peut être redoutable, me déclare Dolgari.

— Ce bougre de Rikit n’a pas encore révélé la moindre information, je regrette déjà le temps où nous avions encore recours à la torture pour faire parler ces raclures de bas étage…Thraän, laissez-moi y aller ! grommelle Carwaty.

— Carwaty, contenez-vous ! s’écrie Thraän pour le rappeler à l’ordre.

Le petit homme se tue sans broncher.

Apparemment, ils auraient tout essayé pour le faire avouer, mais l’homme n’a aucunement envie de coopérer.

Je décide d’intervenir à ma façon. Je demande à Dolgari, qui se charge d’interroger le prisonnier, quelque chose de tout à fait culotté.

— Seigneur Dolgari, je ne doute pas de vos capacités à mener à bien cet interrogatoire, mais ça vous dérange si j’essaye ?

Les garçons se regardent stupéfaits et doivent sûrement s’attendre à une autre de mes folies.

Dolgari jette un œil sur Thraän. Bragg croise les bras et semble désapprouver totalement ma demande. Carwaty rigole dans sa barbe en voyant la tête de ce pauvre Bragg qui se décompose et qui n’ose plus rien dire, mais finalement Thraän, après avoir fait une petite expression qui s’apparente à un « pourquoi pas » zieute rapidement Dolgari.

Celui-ci finit par me donner son accord.

— Très bien…si vous pensez faire mieux, dit-il d’un air pas très convaincu.

— Ça ne sera pas long… dis-je avec ce petit sourire en coin.

Je quitte promptement cette pièce pour rejoindre cet homme.

J’arrive devant la porte et je passe ma main devant le dispositif qui permet l’ouverture de la cellule.

Je pénètre à l’intérieur, la porte se referme ensuite.

Je m’approche et m’assoie. Je croise délicatement les jambes et je l’observe sans dire un mot.

Il est là, menotté, en train de m’analyser attentivement.

Je le fixe droit dans les yeux, ce qui doit le perturber alors il finit par ouvrir la bouche.

— Et maintenant, ils envoient une femme pour tenter de me faire parler…Pffff… Pitoyable !

— Oh…allons, allons…détrompez-vous, je ne suis pas là pour ça !

— Ah ouais ? Et d’ailleurs, t’es qui toi ?

— Mon nom est Anna…

Derrière la vitre, les seigneurs observent attentivement Anna à l’œuvre. Et au moment où celle-ci prononce ces paroles, Bragg se donne une tape sur le front et s’écrit : « Et v’la qu’elle donne son nom !! Dites-moi que je rêve… »

— Anna ? Je n’ai jamais entendu un nom pareil par ici… plutôt bizarre comme nom !

— Parle pour toi, demeuré !

L’homme se met à rire.

Je poursuis : « Si tu veux tout savoir… Je ne suis pas d’ici… »

— Ah !! Et je parie que tu fais partie des nombreux joujoux que Swole a ramené de ses conquêtes, pas vrai heiiin ?

— C’est à peu près ça oui…

— Très bien… et peut-on savoir la raison de ta présence ? Ils n’auraient jamais engagé une femme dans l’armée…tu ne peux pas être une noktarï !

À ce moment-là, je soupire, comme soulagée.

— Voyons, heureusement que non ! Ne dis pas n’importe quoi ! Je ne suis pas une noktarï et je n’ai pas de compte à rendre à quiconque… mais toi, tu commences sérieusement à m’ennuyer avec toutes tes questions, alors je serais claire… qui t’as envoyé ?

L’homme éclate de rire puis il se rapproche de la table et pose ses mains menottées par-dessus.

— Je ne te dirais rien grin’tak ! Et une fois que j’aurais quitté cette cellule, je m’occuperai de toi personnellement. Je serais ravi de te vendre au premier marchand de prostituées du coin après t’avoir ravagé !

À cet instant, Thraän grimace et pense à voix haute : « Pauvre fou, tu n’aurais pas dû dire ça ! »

Je regarde l’homme fixement, droit dans les yeux et d’un calme olympien, en l’espace de quelques secondes, je sens l’adrénaline monter en moi. Je n’arrive plus à me contenir.

Avant de me lever brusquement pour lui régler son compte, je lâche très calmement : « Mauvaise réponse ».

Je dégaine un petit couteau et je plante la main droite du type qui se met à hurler. Le sang dégouline sur la table.

Je poursuis tout en le menaçant : « Je ne voulais pas en arriver là, mais tu ne m’as pas laissé le choix…maintenant, dis-moi pour qui tu travailles sinon je te plante l’autre main ! »

Il hurle, puis il se met à m’insulter et prononce à nouveau le mot « grin’tak » qui n’a rien de très valorisant pour une femme.

C’en est de trop ! Je l’avais prévenu…

Je deviens incontrôlable ! Je balance la table devant moi. L’homme est aussitôt éjecté sur le sol. Je m’approche de lui, je le redresse. Il tente de se débattre, mais ses poignets et ses chevilles ligotés l’empêchent de faire le moindre mouvement.

Je me place derrière lui et je le retiens fermement par le cou en exerçant une forte pression. J’attends ses révélations.

— Dis-moi ce que tu sais sinon je te jure que je n’aurais aucune vergogne à te briser la nuque !

Soudainement, alors que je m’apprête à simuler un petit mouvement comme pour lui craquer le cou, l’homme éclate de rire, à gorge déployée, mais je ressens tout de même un soupçon de peur dans sa façon de s’esclaffer.

Je reprends : « Qu’est-ce qui te fait rire ? Je suis à deux doigts de t’envoyer rejoindre le Kimdolor et ça te fait rire…très bien…tu l’auras voulu ! »

À nouveau, au moment où j’exerce le même mouvement pour feindre de lui briser la nuque, ce que bien sûr je n’avais pas l’intention de faire tout de suite, l’homme ouvre enfin la bouche et passe aux aveux…enfin presque !

— Quel navrant retournement de situation… Il fut un temps où la grande Nosfuria régnait sur l’Univers tout entier, mais aujourd’hui, son règne touche à sa fin… dit-il tout en se marrant.

— Que veux-tu dire ? Sois plus clair !

Je presse un peu plus sa jugulaire.

— Tu peux me tuer, car même si j’arrive à sortir d’ici, ils s’occuperont de mon cas de toute façon !

— Parle et peut-être qu’on pourra négocier ta protection !

— Foutaise ! Je n’étais qu’un pion… la forteresse de Golen et vos autres installations… tout ça n’était qu’une diversion, un moyen de gagner du temps et vous êtes tombés dans leur piège la tête la première ! Au moment même où nous parlons, des dizaines de vaisseaux sont au-dessus de nous et ne vont pas tarder à envahir votre monde !

— Qu’est-ce que tu racontes ? Nos radars les auraient détectés !

L’homme se met à rire à nouveau et ne semble pas plaisanter.

— Tu ne sais pas à qui vous avez affaire !

Je me rends compte que nous sommes face à un gros dilemme…

Je jette un œil dans le vide puis sur la baie vitrée qui donne sur la salle où se trouvent les garçons.

Thraän demande aussitôt à un de ces hommes de prévenir de toute urgence le Gouverneur.

— OK…maintenant, dis-moi qui est le commanditaire de ces attaques ?

— Désolé, mais ça je ne peux pas ! Ils m’ont collé un mouchard à l’intérieur.

— Hein ?

— A l’instant même où je t’aurais révélé leur identité, ce truc qu’ils m’ont implanté les en informera automatiquement… après ça, je donne pas cher de ma peau !

Soudain, alors que je retiens toujours Rikit par le cou, je sens le corps de l’homme se raidir et trembler très fortement.

Je le lâche automatiquement, car tout ceci devient soudainement très inquiétant.

Il éclate de rire et se met à délirer... ses yeux se mettent à battre d’une façon curieuse provoquant d’intenses saccades. Puis très vite, de violents maux de crane viennent l’envahir.

Dans un premier temps, il me sort « trop tard ! », puis il répète successivement : « ils arrivent ! Ils arrivent ! »

Pendant ce temps-là, une silhouette féminine pénétrait incognito dans Avraska… Elle était rapide, méthodique et elle savait parfaitement où aller ! Elle se déplaçait furtivement et n’hésitait pas à abattre les noktarï qu’elle rencontrait sur son chemin après quoi, elle dissimulait les corps afin que personne ne puisse se douter de quoi que ce soit. Elle se déplaçait si furtivement que personne n’avait encore remarqué sa présence.

L’intruse se dirigeait précisément vers l’endroit où se trouve le générateur de bouclier permettant de protéger la cité.

Là-bas, des hommes montaient la garde au niveau de l’entrée principale. Elle n’avait pas le choix que d’emprunter l’entrée secondaire, que très peu de personne connaissait, mais pour cela, elle devait atteindre le chemin d’accès situé en dessous du medh’yova. De là, elle pouvait regagner l’endroit sans se faire repérer.

Je m’éloigne encore un peu plus de lui, car il commence à me préoccuper sérieusement.

Je suis à bonne distance et j’entends à cet instant la voix de Thraän par un des transmetteurs de la salle m’ordonnant de quitter la pièce sur-le-champ.

Je désobéis comme à mon habitude.

L’homme se met soudainement à convulser quelques secondes puis l’instant d’après, sa tête se crispe et en un mouvement, se fracture brusquement sur son épaule droite.

Apparemment, il en avait sûrement déjà trop dit…

Il ne bouge plus maintenant et du sang suinte de ses orifices. C’en est terminé pour lui !

Je l’observe d’un air médusé et je tente d’imaginer quel est le salaud qui a bien pu lui faire une chose pareille. Je n’en reviens pas.

Thraän me demande de les rejoindre à nouveau.

Je quitte la salle et je regagne la pièce où sont les seigneurs.

Je pénètre à l’intérieur, les garçons m’observent.

Thraän, les bras croisés ne semble pas très ravi que j’ai outrepassé ses ordres.

Je m’approche de lui et je m’attends à de nouvelles remontrances de sa part.

— Je t’ai pourtant demandé de quitter la pièce ! Tu as été imprudente ! Et s’il avait une charge explosive dans le corps ? Tu ne serais pas là en ce moment ! dit-il d’un air sévère.

— Oh ! C’est bon Thraän, tout va bien !

— Tout va bien ? Et ton petit numéro pour le faire parler ?

Je grimace légèrement, car je sais pertinemment ce qu’il va me dire, mais je continue de prendre les choses avec si peu de sérieux.

— …

— Si mes souvenirs sont exacts, il me semble que Carlisle nous a désormais défendu de traiter nos prisonniers de la sorte ! Et par conséquent, il est interdit d’utiliser la force sur nos détenus.

Je lui rappelle alors un petit détail avec cette légère pointe d’humour pour ne pas l’énerver davantage.

— Oui…c’est vrai, mais il me semble aussi qu’il avait expressément fait ce petit rappel à ses bons et loyaux soldats, mais pas à moi ! Et techniquement, si je peux me permettre, je ne suis pas une noktarï…

Thraän sait qu’il n’aura jamais le dernier mot avec moi. Il finit par soupirer.

— Anna…

—Thraän, c’est bon… si j’avais réellement voulu le tuer, il serait déjà mort depuis longtemps… J’ai juste voulu le faire parler, d’ailleurs, j’y suis presque arrivée, en tout cas, mieux que vous Seigneur Dolgari, enfin si je peux me permettre, dis-je en dessinant sur mon visage un sourire fier adressé à ce cher Dolgari.

Je poursuis : « Il n’aurait jamais avoué de toutes les façons. Il fallait bien que quelqu’un l’encourage à le faire ! Et pendant que j’y pense, tu as bien vu que je n’y étais pour rien…c’est lui qui a perdu la tête ! dis-je d’un air moqueur.

Thraän semble plutôt mécontent, mais en même temps, je sens qu’il se contient au maximum pour ne pas éclater de rire en entendant mes âneries.

Bragg croise les bras et rigole très discrètement pour ne pas contrarier son supérieur, tandis que Carwaty ne se gêne pas pour rire très ouvertement tout en lâchant : « Je l’adore ! »

Thraän m’observe toujours avec cet air sérieux puis il prend la direction de la porte.

— Nous devons rejoindre le Gouverneur… nous devons faire vite !

Il quitte la pièce. Bragg et Carwaty l’accompagnent, quant à Dolgari, il s’arrête quelques secondes face à moi les bras repliés dans le dos avant de partir à son tour : « Je ne manquerai pas de faire directement appel à vous la prochaine fois ! »

Je n’ose pas répondre, mais j’en rigole, car pour une fois le seigneur Dolgari me témoigne un peu d’intérêt...et puis lui au moins, il ne me sermonne pas !

ó

Nous rejoignons enfin Carlisle à l’Echénox.

La priorité des garçons est de mettre le Gouverneur en lieu sûr avant de protéger la cité.

Carlisle revoit avec nous une dernière fois la stratégie à appliquer avant que l’ennemi ne pointe le bout de son nez.

Dehors les soldats commencent à évacuer les habitants vers les abris de la ville comme je leur avais ordonné quelques temps avant. Et d’autres se préparent à défendre la cité et à combattre un ennemi qui leur est encore inconnu.

Seulement, il y avait une faille, car en envoyant nos hommes, enfin ceux qui nous restaient, à Golen et aux quatre coins de la planète, l’ennemi nous avait tous dupé…

Et nous avions tragiquement précipité notre chute.

Nous avions envoyé plus de la moitié de nos forces vives à des kilomètres d’Avraska, de la cité mère, du centre de tout et nous allions très vite en payer les conséquences.

Un homme de la garde personnelle de Carlisle pénètre précipitamment dans la pièce : « Gouverneur, Gouverneur, nous sommes attaqués ! Général, le bouclier qui protège la cité a été initialisé, les hommes sont en place et les canons sont armés… »

Afin de parer à toute éventualité, le medh’yova avait été bâti au-dessus du générateur. Les gnomes à l’origine du générateur de force devaient rester à proximité au cas où.

La femme qui s’était introduite dans la ville avait rejoint le medh’yova. Avant de se glisser à l’intérieur des conduits d’aération étroits du laboratoire, elle balançait deux ozboc, des sondes permettant de détecter le moindre mouvement.

Les sphères qui émettaient des faisceaux lumineux verts parcouraient l’ensemble des gaines de ventilations puis elles rejoignaient l’endroit d’où elles avaient été lancées.

La voie était libre.

Arrivée à destination, elle souleva la large grille permettant d’accéder au couloir menant à la salle du générateur mais au moment où elle s’apprêta à descendre, des rayons laser venaient dans sa direction. Elle remonta immédiatement dans le conduit et avant de redescendre, elle dégaina une grenade al’kev qu’elle balança à l’intérieur.

Le dispositif était neutralisé. Les rayons se désintégrèrent temporairement et à présent, elle devait se diriger vers ce gigantesque cratère s’engouffrant sous plusieurs niveaux d’où émanait un important flux d’énergie de couleur bleu.

Au même moment, les alarmes de la cité retentissent.

Une fois que l’homme a terminé de faire son rapport, nous nous retournons aussitôt vers le Gouverneur : « Vous savez ce qu’il vous reste à faire ! » dit-il.

Les garçons s’empressent de quitter l’endroit pour rejoindre leurs hommes.

Je fais de même, mais le Gouverneur n’en a pas terminé avec nous et avant de partir, il nous demande de rester encore.

Nous nous tournons tous les cinq simultanément vers lui.

« Surtout, restez en vie ! » dit-il d’un air soucieux en nous observant chacun à notre tour.

Ses hommes viennent l’escorter jusqu’à son abri tandis que nous partons pour le cœur de la cité.

Avant d’emprunter le téléporteur situé sur le rocher, à l’horizon, j’observe ce triste spectacle sous mes yeux…

Avraska est envahie ! Je distingue des nuées de fumée de part et d’autre. Je n’ai pas une minute à perdre ! Il faut faire vite !

L’alarme de la cité retentit très fortement. C’est la panique ! Les Fératih hurlent. Certains sont blessés, d’autres courent pour échapper à l’ennemi.

Les garçons sont partis rejoindre leurs hommes et moi, comme convenu, avec l’aide des soldats, je conduis à l’Est, les derniers habitants vers les abris de secours dissimulés un peu partout en ville.

Avant de les rejoindre, je fini par abriter ce groupe composé d’une dizaine de personnes.

Je m’approche du mur et je saisis ce petit appareil de forme circulaire, que je place contre la paroi.

D’un coup, une fenêtre holographique menant vers une issue de secours se révèle.

Je demande à ces gens de pénétrer rapidement à l’intérieur de l’abri. Le passage se referme puis je récupère le dispositif et je me dirige immédiatement vers le centre de la cité.

Sous le medh’yova, la femme rejoignait le cœur du générateur.

Elle empruntait l’une des quatre passerelles reliées par un gigantesque pylône placé au centre de l’endroit.

Trois soldats patrouillaient en formation sur la passerelle nord, et sur l’aile opposée, trois autres montaient la garde.

L’intruse se dirigeait aussitôt vers le premier groupe qu’elle n’eut aucun mal à maîtriser mais le second groupe la repéra et l’un d’eux, une jeune recrue, tenta d’ouvrir le feu.

Très vite, un autre de ses collègues l’en empêcha.

Il bouscula l’homme et le plaqua violemment contre la rambarde : « Espèce d’abruti ! Tu veux tous nous tuer ? Nous sommes au-dessus du générateur de champ de force, un seul tir ferait exploser l’endroit tout entier ! »

La femme éclata de rire et tourna en ridicule le plus jeune.

Bravo mon garçon ! Encore un peu et tu nous expédiais tous au Valon-wëh…

Vous n’avez pas le droit d’être là ! Qui êtes-vous ? Que voulez-vous ? lui demanda l’un des noktarï.

Quelle importance ? Je suis seulement de passage…

Rendez-vous, vous n’avez aucune chance !

La femme esquissa un petit sourire.

Le mot reddition ne fait pas parti de mon vocabulaire.

Vous l’aurez voulu !

Parfait ! dit-elle d’un air fier.

Les trois hommes reformaient leur groupe et partaient en direction de la femme qu’ils tentaient d’appréhender.

Ils ne tardaient pas à riposter et l’attaquaient simultanément mais face à cette femme, ils n’étaient pas de taille.

Dès lors, le plus âgé demanda à l’un d’eux d’appeler des renforts.

La femme retenait fermement un de leurs camarades par la jugulaire avec ce poignard.

Je ne ferais pas ça si j’étais toi…

L’homme hésita. Il jeta un œil sur l’autre soldat qui lui ordonna aussitôt d’obéir.

Donne-lui ton diptek…fais ce qu’elle dit !

Le soldat s’exécuta et envoya l’appareil devant lui.

Parfait…toi à présent, envoies le tient ! Fais vite ! dit-elle au plus âgé.

L’homme balança son communicateur jusqu’à celle-ci. Elle ne tarda pas à s’en amuser.

— Voilà de bons soldats bien disciplinés ! Mais malheureusement, je ne laisse jamais de survivants derrière moi…dit-elle tout en égorgeant le malheureux sous les regards offusqués de ses compagnons.

Les deux noktarï encore sous le choc, ne tardaient pas à foncer sur elle pour l’affronter à nouveau et furieux, ils décidaient de venger leur camarade.

Après avoir envoyé le plus vieux au tapis, elle s’en prenait à l’autre. Mais après lui avoir porté un coup fatal, qu’il le fit instantanément faillir, la femme se plaça derrière lui et n’hésita pas à lui briser la nuque d’un coup sec.

A présent, elle affrontait celui qui avait empêché le premier soldat d’ouvrir le feu. Il semblait beaucoup plus coriace que les autres mais après une bonne dizaine de minutes, celui-ci ne tarda pas à rejoindre ses compagnons vers l'au-delà.

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