Chapitre Deux

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L'appartement de Baker Street était redevenu calme et tranquille. Le monde restait suspendu entre deux enquêtes à la morosité de la vie.

Mme Hudson continuait à ne pas jouer les gouvernantes en apportant du thé chaud et des gâteaux à ses deux locataires. Elle continuait à adorer la petite Rosie.

Le vide laissé par la mort de Marie Morstan était intolérable. On vivait tout de même.

" Rosie !, sourit John en retirant quelque chose des mains potelées de sa fille adorée. Tu ne peux pas manger ça, mon ange. C'est un...os ?"

Une silhouette dégingandée se précipita sur lui et saisit l'objet en question. Un large sourire illumina ses traits acérés.

" Merci, petite abeille. Je cherchais mon os hyoïde depuis des heures."

Délicatement, Sherlock Holmes fit tourner entre ses doigts un petit os étincelant. Le docteur Watson le contemplait, estomaqué.

" Un os hyoïde ? Tu...tu laisses traîner des os humains dans le salon ? Tu m'as promis, Sherlock de...

- Faire attention, je sais, John !, claqua Sherlock. Je le fais. Justement, j'ai cherché pendant des heures cet os. Il appartient à une affaire en cours.

- Il...il est lié à une affaire ? Mon Dieu."

John se frotta les yeux, immensément fatigué de vivre en cet instant précis.

" Lestrade ne m'en voudra pas si je le garde encore quelques jours, ajouta négligement Sherlock. Un corps a été retrouvé. On a fait fondre sa peau et ses muscles pour faire apparaître le squelette. Ce petit os est une jolie preuve de meurtre."

Sherlock se pencha au-dessus de Rosie, il lui embrassa le front et lui donna un des gâteaux de Mme Hudson.

" Merci, petite abeille. J'ai aussi perdu un osselet. Si tu le trouves, donne-le moi."

Rosie gazouilla, elle prit la main de Sherlock et lui sourit. John secoua la tête, attendri malgré sa colère qui le prenait encore.

Il comprit que Sherlock se moquait de lui lorsque ce dernier lui lança un regard brillant d'espièglerie.

" TU feras les courses aujourd'hui, Sherlock, et TU ramèneras du lait," asséna durement John.

Sherlock porta sa main à son front et poussa un long soupir dramatique.

Un applaudissement retentit près de la porte du salon et les deux hommes se tournèrent d'un même mouvement vers le nouveau venu. Rosie s'approcha de lui, à tout petits pas de bébé, heureuse de le voir.

" Myof !, s'écria la fillette.

- Bonjour, Mlle Rosamund, répondit grandiloquement Mycroft Holmes. On prend le thé à ce que je vois. C'est très bien."

Avec l'aisance de celui qui avait élevé un petit frère, Mycroft Holmes prit dans ses bras Rosamund Watson. John le regardait faire en souriant toujours. Il comprenait maintenant un peu mieux ce grand-frère mystérieux et les drames qui avaient endeuillé la famille Holmes.

Sherlock, lui, n'était pas content. Il se leva du canapé et jeta sèchement :

" Tu as terminé ton poste au Foreign Office plus tôt, Mycroft, et tu t'es dit qu'un peu de marche jusqu'ici serait bon pour ton régime. C'est une bonne idée.

- Bonjour, Sherlock, soupira Mycroft.

- Maintenant, tu peux rendre ton otage et retourner au Diogène Club.

- Merci de t'inquiéter pour ma santé, Sherlock. C'est très gentil de ta part. Vraiment."

Rosie se tenait dans les bras de Mycroft et sa petite main jouait avec la pince à cravate de ce dernier, ravie de ce nouveau jouet.

" Paix les garçons !, rit John. Je vais servir un thé à notre invité et Rosie va cesser de salir le beau costume de Mycroft avec ses doigts couverts de sucre."

Mycroft sursauta, mais il eut un doux sourire, qui fit briller ses yeux clairs.

" Le sucre s'en va. J'ai connu pire de la part de Sherlock."

Sherlock leva les yeux au ciel, John rit encore plus fort et Mycroft se contenta d'un sourire amusé.

Devant leur tasse de thé et leur gâteau à la cannelle, les trois hommes se détendirent. Le monde avait avancé depuis la mort de Marie et la chute de Moriarty.

" Alors ?, fit Sherlock. Le moteur était un faux, n'est-ce pas ?

- Oui, soupira encore Mycroft. Le scandale a éclaté et le monde de l'automobile en est éclaboussé. Le moteur n'était pas un hybride et des voix demandent à ce que tous les moteurs hybrides soient vérifiés.

- Une bonne chose, approuva le médecin militaire. On nous vend des voitures à des prix prohibitifs pour finalement nous arnaquer. C'est scandaleux."

Mycroft Holmes approuva et but son thé, satisfait que ce soit John qui l'ait fait et non son frère.

" En quoi cette affaire te concerne, Mycroft ? Un vol de moteur est une simple affaire judiciaire. Je peux expliquer comment le vol a eu lieu, mais je n'en vois pas l'intérêt."

En entendant ces mots, John Watson leva les yeux et examina son ami avec admiration.

" Tu sais comment le vol a eu lieu, mais...

- Lupin a une bonne équipe, approuva négligemment Mycroft. Nous faire croire qu'il est là, alors qu'il est ici.

- Oui, rien d'exceptionnel," rétorqua Sherlock.

John Watson leva les mains et s'exclama :

" Hola ! Doucement ! Je ne comprends pas, moi.

- Tout simplement que le conducteur de la Donkervoort n'était pas le prince Sernine, expliqua simplement Sherlock.

- Mais... On l'a vu sortir de la voiture !

- Non. On a vu un pilote sortir de la voiture, saluer la foule, disparaître quelques instants dans les coulisses et réapparaître quelques minutes plus tard. Là, seulement, il a retiré son casque et le prince Sernine est apparu.

- Mais, mais... Qui a conduit la Donkervoort ? Et où était le prince ?

- Je pencherai pour une femme, annonça Mycroft en souriant à Rosie qui dormait dans ses bras, mais Sherlock ne me croit pas."

Sherlock leva les yeux au ciel.

" Trop fine pour ressembler à Sernine.

- Une silhouette, cela se travaille.

- Mais attendez ! Vous êtes en train de me dire que Lupin est Sernine ?!, souffla John Watson, estomaqué.

- Evidemment. Là n'est pas la question. La vraie question est celle-ci : pourquoi Lupin voulait ce moteur ?"

Sherlock regardait son frère en fronçant les sourcils. Mycroft glissa sa main dans la poche intérieure de sa veste et tendit une missive.

" Je l'ai reçue aujourd'hui. D'où ma visite dans votre charmant nid douillet."

“ Monsieur le gouvernement britannique,

Vous jouez un jeu dangereux. Sans prendre soin de vos pions, vous disposez vos pièces et tirez vos ficelles, au mépris des dommages collatéraux.

Peut-on sacrifier un pion ainsi ?

Ou pire ! Peut-on sacrifier tout un jeu de pièces ?

Vous jouez durement, mais je joue aussi.

Il y a un accord secret entre plusieurs pays concernant du pétrole.

Vous jouez un jeu dangereux.

Je suis un formidable adversaire, non ?

Je n'ai pas oublié votre frère, nous n'avons pas eu la chance de nous entretenir, lui et moi. Je suppose que cela sera bientôt possible.

Que diriez-vous de Téhéran ?

Votre dévoué,

Arsène Lupin”

" Mycroft, Mycroft, Mycroft, soupira Sherlock. Qu'as-tu encore fait ?"

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