L'entre-Deux
Marie-Louise resta silencieuse un moment. L’eau du ruisseau caressait toujours ses doigts, comme pour lui rappeler que tout continue de couler, même quand on s’effondre.
Elle se redressa lentement. Tourna enfin les yeux vers Côme.
— Tu sais, dit-elle d’une voix posée, si j’étais venue pour choisir… je ne serais pas là. Je serais restée, là-bas, à vous regarder vous battre pour moi, comme si j’étais une cause ou un trophée. Mais je suis venue ici pour moi. Pour respirer. Pour comprendre.
Côme baissa les yeux. Il n’insista pas. Il savait que rien ne se forçait avec elle.
— Je crois que tu as raison, murmura-t-il. J’aurais dû parler avant. J’ai laissé trop de vide. J’ai voulu t’aimer sans vraiment me montrer.
Elle sourit tristement. Pas de rancune dans ce sourire, juste un constat.
— Tu m’as aimée avec tes silences. Marin m’a regardée comme si j’avais encore quelque chose à dire.
Elle marqua une pause, surprise par la clarté de sa propre pensée. Puis elle reprit, plus doucement :
— Mais je ne suis pas prête à aimer quelqu’un. Pas encore. Pas tant que je ne me serai pas pardonné à moi-même d’avoir attendu aussi longtemps que quelqu’un me choisisse… au lieu de me choisir, moi.
Elle fit un pas en arrière, son regard toujours franc.
— Je vais partir quelques jours. Toute seule. J’en ai besoin. Je ne fuis pas. Je me retrouve.
Elle se tourna vers la forêt, prête à s’éloigner à nouveau.
— Et peut-être qu’un jour, je reviendrai. Pas entre vous deux. Juste… vers celui qui saura m’aimer sans m’éclipser.
Elle n’ajouta rien. Et cette fois, quand elle s’en alla, elle ne fuyait pas.
Elle avançait.
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