Le message

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La nuit était tombée sur le village, discrète et douce, comme si elle n’osait pas troubler le calme du retour. Marie-Louise était assise au bord du lit, les jambes croisées, les cheveux encore humides d’une douche rapide. Devant elle, sur la table basse, son téléphone reposait comme un animal endormi dont elle craignait le réveil.

Cela faisait trois semaines qu’elle l’avait éteint. Trois semaines d’oubli volontaire, de silence absolu. Elle l’avait gardé dans son sac, mais l’avait presque oublié, à force de ne plus y penser. Elle savait pourtant que ce moment viendrait — celui où elle devrait rétablir un lien avec le monde qu’elle avait mis en pause.

Elle inspira. Longuement. Puis, avec une lenteur calculée, elle appuya sur le bouton.
L’écran s’alluma.
Les notifications déferlèrent : appels manqués, messages, alertes anciennes.
Mais elle n’en ouvrit aucun. Elle ne voulait pas relire le passé. Pas ce soir.

Elle ouvrit une page vierge dans son application de messagerie. Elle tapa un prénom. Côme.
Puis un autre. Marin.

Elle hésita. Longtemps.

Elle pensa à leurs visages. À la dernière fois qu’elle les avait vus, ensemble. Le poids dans leurs regards. Le déséquilibre subtil entre l’amour, la peur et l’attente.

Elle aurait pu les appeler. Entendre leur voix, écouter leur silence à l’autre bout. Mais elle ne s’en sentait pas la force. Pas encore.

Alors elle écrivit.

"Je suis revenue. J’aimerais vous voir.
Demain à 18h, au bord du lac. Là où tout a commencé.
Si tu viens, viens seul. C’est important."

Elle relut le message. Il lui semblait à la fois trop simple, et chargé d’un monde entier.

Elle changea un mot. Puis le remit.
Elle hésita à ajouter "je vous espère". Puis décida que non. Ils viendraient, ou non. Elle n'avait plus besoin de retenir qui que ce soit.

Et puis surtout — elle ne voulait pas qu’ils sachent qu’ils étaient tous les deux conviés. Elle voulait les voir tels qu’ils viendraient : pour elle, pas l’un contre l’autre.

Un seul message. Envoyé deux fois.

Elle les envoya. À quelques secondes d’intervalle.
Puis elle éteignit le téléphone et le reposa. Le calme retomba aussitôt dans la pièce.
Mais en elle, quelque chose avait bougé. Elle n’était plus tout à fait seule, même si rien n’était encore là.

Elle s’allongea sans vraiment dormir. Le cœur lourd mais vivant.

Demain, elle saurait.

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