— Tu sais ce qu'on dit, mon cher Adumhazare ?

 — Non Hesvetel, mais tu brûles de me le dire, je crois !

 Vous pourriez, avec raison, vous demander comment deux êtres si différents et s’haïssant l’un-l'autre peuvent vivre ensemble, se côtoyer depuis au moins six mille ans. On répondra que c’est ineffable, « qui ne peut être exprimé par le langage ». L’amitié entre Hesvetel, un blond ange gardien, et Adumhazare, un roux ange déchu, dépassait la compréhension humaine. Malgré leurs nature bonne ou mauvaise, une solide et ineffable relation s'était nouée entre eux. Ils se venaient mutuellement en aide, on se demandait pourquoi Dieu ne faisait pas déchoir Hesvetel qui s'était lié avec démon. Les voies du Seigneur sont impénétrables, comme on dit.

 Les deux êtres vivaient à Grenoble, dans les Alpes françaises. Quand ils rentraient du travail après quelques miracles ou malédictions, chacun donnait à l'autre des nouvelles de son travail journalier. Mais on se rendait seulement compte des affaires courantes : d’autres choses, comme la prochaine attaque contre un groupe d'anges ou de démons, étaient jalousement gardées par chaque partie.

 — Eh bien, dit Hesvetel, on dit que l'ange Manny vient de mourir.

 Adumhazare s'arrêta de regarder la course hippique se déroulant à la télé, se tournant vers lui :

 — Nom de Dieu ! Comment cela est-il arrivé ?

 — On dit qu'il a été tué par un démon la semaine dernière, mais cela devait être un démon fort puissant. Je ne sais pas pourquoi il tenait tant à protéger un occultiste nommé… Constantine, je crois. C’était d’autant plus incompréhensible, il s’agit d’un véritable pécheur ! C'est en tout cas ce qu'Anihachaël m'a dit…

 — Ah ? Hum, je crois que j'ai déjà entendu parler de ce Constantine… Je nre ferais pas confiance aux infos d’Anihachaël, il a tendance à se tromper..! Il est bon qu'à frapper de cécité les pécheurs de Sodome avec Aménadiel.

 — En attendant, je crois que c'est le cheval n°4 qui va finir la course : vois comme il est en tête !

 Hesvetel sautait de joie sur le canapé, Adum ne pouvait pas supporter de perdre. Par un tour de passe-passe, le cheval perdit soudainement de la vitesse et s'écroula de fatigue. L’ange gardien tourna vite la tête vers son colocataire, en affichant une moue pleine de reproches :

 — Je ne suis pas dupe, tu as triché !

 Le roux se retenait de rire en se mordant la lèvre inférieure.

 — Adumhazare, tu m'agaces ! Tu triches et tu m'agaces !

 — J'aime quand tu es colère : c'est là que tu es le plus mignon des anges.

 Hesvetel rougit plus violemment, d’embarras cette fois, comme à chaque fois que le démon lui faisait ses yeux de chats. Mais il se contenta de lui tirer la langue, et de montrer un visage plus en colère, quand bien même il posa sa tête sur son épaule.

 —Je sais bien pourquoi nous ne sommes pas dans le même camp !

 — Confidence pour confidence, j’aurais bien aimé…

 Soudain, le téléphone sonna dans l'entrée. Adumhazare soupira :

 — Eh merde… Je vais répondre.

 Il décrocha, énervé. Une voix qui lui était inconnue lui demande son colocataire. Celui-ci prit le combiné et entendit une voix familière :

 —Oh, Azraël ! … Oui, bien entendu ! … Je ne sais pas, c'est Anihachaël qui m'a vaguement informé que cela s'était passé… Mais pourquoi moi ? … J'aimerai bien qu'elles soient impénétrables moins souvent, tout de même ! … D’accord, est-ce qu’ils furent prévenus ? … Ah bah, si c'est lui qui le veut... Et je dois partir quand ? … D'accord, bonne nuit aussi.

 Après avoir raccroché, Hesvetel tomba dans le canapé et soupira longuement.

 — Que voulais l'ange de la mort ?

 — Que j'amène John Constantine chez le pape dès demain.

 Adumhazare acquiesça distraitement, avant de réaliser ce que l’ange blond venait de lui dire :

 — Attends, quoi !?

Générique de la série.