J'ai discuté avec Vague, le Petit et Rock de mon entretien avec l'avocat. Cet entretien a duré à peu près une heure, puis on m'a remis dans la cellule où j'étais, chamboulé par la nouvelle qu'on venait de m'annoncer.

— Waouh, impressionnant ! Je ne pensais pas que tu étais accusé de ça, dit le Petit.

— Le pire, c'est que je ne comprends même pas la scène de crime en elle-même. C'est pour ça que j'ai besoin de vous pour enquêter avec moi.

— Attends, tu veux dire que tu vas essayer de te libérer tout seul ? rétorque Vague.

— Comment faire autrement ? Il le faut bien, car la justice est tellement lente que d'ici là, je serai déjà mort.

— D'accord, on veut bien t'aider, mais par où commencer ? Tu n'as aucune piste ?

— En réalité, si, j'en ai une.

— D'accord, dans ce cas, dis-nous laquelle, m'interroge Rock.

— La première piste à explorer est l'homme en question, la victime. Ensuite, ce sera les vases, et peut-être que ça nous mènera à une piste viable.

— Il n'est pas mal, ton plan, répond Rock, mais dans ce cas, si on explore le passé de la victime, il nous faudra beaucoup plus d'infos.

— Justement, avant de partir, j'ai réussi à négocier avec mon avocat pour avoir le dossier de mon voisin. À la prochaine sortie de cellule, je vous le montrerai.

Sur ces mots, une sonnerie a retenti, signifiant la fin de notre pause déjeuner. Je suis donc retourné dans la cellule lugubre dans laquelle je dors dorénavant. Je m'assois sur ce qui ressemble à un lit fait avec des planches cassées et un drap qui ne me fera pas passer l'hiver. Heureusement pour moi, nous sommes encore en été, mais l'automne va bientôt arriver et je risque de mourir de froid. Les conditions de la prison sont misérables et insalubres, ou du moins, elles sont propices aux bactéries et aux maladies. Il est fort possible que si je n'arrive pas à partir avec mes trois amis d'ici l'hiver, nous serons tous malades, voire même mourrons en ayant attrapé quelque chose qu'il sera probablement impossible de soigner.

Après quelques heures à attendre patiemment, je décide enfin d'ouvrir le dossier qui se trouve juste en face de moi. Je n'ai pas osé l'ouvrir avant car je voulais attendre l'expertise de mes trois amis. J'ai réellement envie de découvrir le passé de mon voisin. Néanmoins, la curiosité a pris le dessus, et j'ai donc ouvert le dossier. À l'intérieur se trouvent des clichés de la scène de crime, mais aussi des lettres écrites par de vieux amis et d'autres sur du papier beaucoup plus formel racontant des souvenirs. La chose encore plus incroyable, c'est que les photos de la scène de crime sont en couleur. C'est une chose extrêmement rare dans ce monde, car, à part les journalistes et quelques spécialistes, personne d'autre ne pouvait avoir accès à ces caméras extrêmement chères.

Je savais à la base que mon voisin était une personne fortunée, mais je ne pensais pas à ce point. Ça, par exemple, dans mon souvenir, coûte plus de 400 francs (60,98 € aujourd'hui). Peut-être est-ce pour ça qu'on l'a tué. Finalement, ma loyauté envers mes trois nouveaux amis a pris le pas. Je referme rapidement le dossier et j'attends la prochaine sortie. Après quelques heures d'attente supplémentaires, une sonnerie retentit. Ça y est, je vais enfin pouvoir leur expliquer.

Nous nous retrouvons dans la cour près d'un arbre, c'est notre endroit favori pour nous y retrouver. Cet arbre est dans un endroit parfait pour observer tout le monde et ne pas être vu par les gardes.

Une fois arrivé devant l'arbre, je les attends patiemment. Je vois un groupe de plusieurs personnes qui arrivent soudainement dans la cour. Parmi eux, je repère Rock, Vague et le Petit. Ils sont là et me repèrent également. Ils se dirigent vers moi, moi je les attends patiemment au même endroit. Je remarque du coin de l'œil le groupe d'hommes qui m'avait adressé la parole au réveil le premier jour, avant même mes trois amis. Ils se sont installés près du terrain de basket, là où se trouve une sorte de mini salle de sport extérieure dédiée à la musculation. Et même de loin, ils continuent à être imposants.

— Salut, me dit le Petit, suivi de Rock et Vague.

— Tenez, voici le dossier.

— Super, on va pouvoir le regarder ensemble.

Pendant un long moment, nous étalons autour de nous les feuilles et dossiers, en exposant les photos de part et d'autre pour bien les trier. Nous commençons donc à essayer de trouver un lien entre son passé et la potentielle tentative de meurtre qui aurait réussi. En regardant le dossier et en lisant chaque témoignage, nous remarquons quelques incohérences chez certains de ses amis. Notamment deux qui disent être ensemble lors d'une soirée le soir où il a été tué, mais quand on leur demande plus de détails, ils ne sont pas d'accord sur l'endroit où ils ont passé la nuit.

Et visiblement, pour ce qui est des photos de la scène de crime, je suis d'accord avec mon avocat pour dire qu'elle est étrange. Parmi toutes les photos de la scène, on voit nettement des traces de bagarre dans la pièce ; on retrouve d'ailleurs d'autres ecchymoses sur son corps qui semblent indiquer la même chose. Bien entendu, pour le moment, nous n'avons pas le rapport d'autopsie car mon avocat est en train de le demander et de trouver de nouvelles pistes afin de me libérer. Même si, lors de l'entretien, il ne m'a pas paru très motivé.

Mais bref, avec les photos prises par l'appareil, nous pouvons voir qu'en effet, sur tous les vases utilisés par sa femme, qui est botaniste, il n'y a que les vases que je leur ai offerts qui sont disposés autour du corps. Mais chose étrange, je leur ai offert cinq vases au total. Comme je ne suis pas très doué pour les cadeaux, je leur offre toujours un vase à chaque occasion : à la fête des voisins, pour leur anniversaire, ou même simplement parce que sa femme en a besoin.

Mais sur la scène de crime, seuls quatre sont disposés autour du corps. Le cinquième a été retrouvé dans sa chambre, elle aussi a été fouillée de fond en comble, comme pour trouver quelque chose. C'est quelque peu étrange, sachant que si le tueur voulait vraiment me mettre en prison, il aurait dû mettre les cinq vases ensemble. Il semble que ce soit moins contre moi particulièrement que contre la victime en particulier.

C'est alors qu'une idée m'a traversé l'esprit. Si je voulais pouvoir sortir d'ici et comprendre ce meurtre, peut-être devrais-je m'adresser aux experts. Je parle de ceux qui ont l'habitude de fomenter des plans pareils afin de tuer des victimes au hasard. Je parle évidemment des psychopathes. Ils se trouvent dans une branche isolée, mais avec un peu de chance, l'un de mes trois amis sur lesquels je compte beaucoup a peut-être un contact là-bas.

— Dites, est-ce que vous avez un contact chez les psychopathes ? Demandai-je.

— Moi, dit Rock.

— Est-ce que tu pourrais me faire rencontrer l'un d'eux ? J'aimerais lui poser des questions à propos de ce meurtre, peut-être pourra-t-il nous aider.

— Oui, probablement après ce qu'il a fait, dit-il, le sourire aux lèvres, avec un ton ironique.

— Dans ce cas, est-ce que tu sais comment tu vas l'approcher ? me questionne Vague.

— C'est vrai que cette branche est isolée de tous. Les seuls autorisés à y entrer sont des gardes qui ont un certain grade. La prochaine étape ne sera déjà pas chose facile. Mais si cela peut nous aider, alors je serai prêt à tenter le coup.

— Tu es courageux, me dit le Petit.

— Je suppose que c'est un compliment.

Après cela, la sonnerie a retenti et un garde a prononcé mon nom à haute voix. Nous avons donc rangé en vitesse le dossier, mémorisant chaque détail qui aurait pu nous échapper. Puis, avec le dossier en main, je m'approche du garde qui me remet la grosse corde autour de mes poignets. Il me ramène au bâtiment où j'ai rencontré l'avocat. Ce dernier m'attend déjà de pied ferme.