
Ebi
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de toujours
Anton est un lycéen ordinaire en apparence, notes correctes, cercle d'amis restreint, comportement irréprochable. Mais derrière son masque de normalité se cache une vérité plus sombre. Sociopathe, il ne ressent ni remords ni empathie, dissimulant avec brio ses pulsions. Il manipule, ment, joue avec son entourage. Jusqu'au jour où il croise la route d'Elias, un nouvel élève qui l'intrigue comme jamais auparavant... Méfiants, les deux se testent, se défient, puis se légitiment. Ce qui commence comme un jeu de manipulation devient une danse macabre où chacun cherche à prouver sa supériorité. Mais à force de jouer avec le feu, qui finira par se brûler en premier ?
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Il est 3h06 quand elle abandonne. Le sommeil ne viendra pas. Il ne vient plus vraiment depuis des semaines. Il semble parfois approcher, juste assez pour frôler son esprit avant de disparaître, comme un compagnon cruel. Elle reste là, les yeux ouverts dans le noir, figée dans un lit qui ressemble de plus en plus à une scène vide. Son corps est lourd et pourrait dormir. Mais sa tête, elle, tourne sans fin. Elle se lève doucement, enfile un pull trop grand qui garde encore une légère odeur de tabac froid. Pieds nus sur le parquet, elle traverse silencieusement l’appartement avec son chat à ses côtés. Dans le salon-atelier, la toile l’attend, blanche, inerte. Elle la regarde un instant, soupire, prend un pinceau... puis le repose. À quoi bon ? C’est toujours la même question. Qu’elle peigne ou pas, qu’elle crée ou pas, le monde tourne sans elle. L’impression d’être un détail flou dans un tableau immense, insignifiant. Elle prépare un café même à cette heure avancée. L’amertume du liquide lui brûle la gorge, mais au moins cela prouve qu’elle est encore là, présente dans ce corps fatigué par ses pensées incessantes. Elle ouvre son carnet où se trouvent des dessins inachevés, des croquis
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Ça ne fait pas de bruit. Ça ne hurle, et ne saigne pas. Mais ça détruit. Le Tako-Tsubo, cœur brisé, dit-on. Joli nom et jolie légende japonaise. Un piège à poulpe , où une jarre d’argile dont la forme bombée, piège l’animal sans le blesser. Et c’est exactement ça. Une douleur qui prend, qui garde et qui enferme, sans laisser de trace. C’était un de ces matins d’automne sans lumière, tout juste assez gris pour se fondre dans l’oubli. Un silence flottait dans l’air et puis un message. Quelques mots sans cris, sans gifles. Juste une phrase. Quelqu’un ne reviendrait plus. Et alors, mon cœur s’est recroquevillé. Pas comme dans les romans, pas en images. Mais littéralement, physiquement. Il s’est contracté, tordu, déformé, comme si une main invisible l’avait serré. J’ai senti un poids immense se poser sur ma poitrine. Pas un coup. Pas une flèche. Mais une pression, lente et continue. Comme si on voulait m’éteindre, sans me tuer. Comme si la vie devait rester, mais à genoux. Le souffle m’a manqué. Pas d’hyperventilation, pas de panique. Non. Juste un souffle qui s’efface. Une absence d’air. Et au milieu de cette lente asphyxie, une douleur pure et précise. Je me suis assis, ou peut-être e
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Komoru, esprit-lapin, très jeune, un peu trop curieux « On dit qu’Asanoha choisit qui elle laisse entrer. Moi, j’sais pas. J’étais là quand la dernière est arrivée, la Voyageuse, toute triste autour des yeux. J’ai plié un origami pour elle. C’était un souvenir heureux, je crois. Pas le mien. J’en ai pas encore. Mais parfois, les souvenirs des autres suffisent pour commencer une vie » Témura, tisseuse de brume, vieille comme les rochers « Ici, on ne répare pas les gens. On les laisse reprendre forme, à leur manière. C’est pas pareil. Dans le monde d’avant, ils veulent te remettre droit, comme une chaise bancale. Ici, on t’apprend à aimer le bancal » Renkai, corbeau noir aux yeux humains « J’suis tombé ici sans savoir comment. La pluie, la fatigue, un instant d’abandon. Asanoha, c’est pas un refuge. C’est un miroir. Tu crois que tu viens pour oublier, mais c’est pour te souvenir sans douleur. Les gens là-bas disent qu’on rêve trop. Moi j’dis : faut du cran pour rêver sans fuir » Yuna, fille des reflets, gardienne de la Source de l’Âme Douce « Les étrangers s’attendent à se voir dans l’eau. Mais ici, l’eau ne reflète pas ce que tu es. Elle montre ce que tu fais semblant d’être. Ça sec
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Il n’a pas crié. Peut-être parce qu’il ne s’y attendait pas. Peut-être parce qu’au fond, il savait qu’un jour, cela arriverait. Il était allongé sur le canapé, un verre à moitié vide à la main, la télévision diffusant en boucle des images qu’il ne regardait pas. J’ai utilisé ce qu’il aimait le plus, le vin rouge du samedi soir. Je l’ai versé doucement, avec précision. Une dose. Puis deux. Puis un peu plus. Le poison était lent, pas fulgurant. Il a suffoqué, a eu un mouvement de recul. Ses yeux ont changé. J’y ai vu la panique, et une question silencieuse : "Pourquoi ?" Mais il n’y avait plus de pourquoi depuis longtemps. Je n’ai pas pleurée. Cacher un corps est une autre histoire. L’odeur, le poids, la réalité. On croit que ce sera comme dans les films, rapide, propre, maîtrisé. Ça ne l’est pas. J’ai tout lavée trois fois, même si je savais que le sang n’était pas sorti. J’ai démontée le coffre du vieux 4x4, enveloppée le corps dans deux bâches et du plastique épais. J’ai roulée jusqu’à la carrière abandonnée, là où plus personne ne va depuis que la ville a fermé la route. Il a fallu creuser, lentement, en silence. L’aube pointait à peine quand j’ai recouvert ce qui restait de lui.
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